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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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glaciales.
    — ... Viens donc, Otsū !
cria Takuan en se couvrant la tête de ses mains. Nous allons nous faire
tremper.
    Elle ne répondit même pas.
    — ... Tout ça, c’est de ta
faute, Otsū ! Tu es une pleurnicheuse ! Tu te mets à pleurer, et
le ciel t’imite.
    Puis il abandonna le ton de la
taquinerie :
    — ... Le vent se renforce, et
il semble que nous soyons bons pour un gros orage ; aussi, rentrons. Ne
gaspille pas tes larmes pour un homme qui mourra de toute façon. Allons !
    Takuan remonta le pan de son
kimono sur sa tête, et courut vers l’abri du temple.
    Quelques secondes plus tard, c’était
le déluge ; les gouttes faisaient de petits points blancs en tambourinant
par terre. L’eau avait beau lui ruisseler dans le dos, Otsū ne bougeait
pas. Elle ne pouvait s’arracher du tronc, même lorsque son kimono trempé lui
colla à la peau et qu’elle fut glacée jusqu’à la mœlle. Quand sa pensée se
tournait vers Takezō, la pluie n’avait plus d’importance. Il ne lui vint
pas à l’idée de s’étonner de souffrir pour la simple raison qu’il souffrait,
lui. Elle priait en silence pour que la vie de Takezō fût épargnée.
    Elle errait en cercles autour du
pied de l’arbre, levant souvent les yeux vers Takezō mais incapable de le
voir à cause de la tempête. Sans réfléchir, elle cria son nom mais il n’y eut
pas de réponse. Le soupçon germa dans son esprit qu’il risquait de la
considérer comme un membre de la famille Hon’iden, ou comme une simple
villageoise hostile de plus.
    « S’il reste dehors sous cette
pluie, se dit-elle avec désespoir, il ne passera sûrement pas la nuit. Oh !
n’y a-t-il donc personne au monde qui puisse le sauver ? »
    Elle se mit à courir de toutes ses
forces, en partie poussée par le vent furieux. Derrière le temple, le bâtiment
de la cuisine et le logement des prêtres étaient hermétiquement clos. L’eau qui
débordait des gouttières creusait dans la terre de profondes rigoles en se
précipitant vers le bas de la colline.
    — Takuan ! cria-t-elle.
    Arrivée à la porte de sa chambre,
elle se mit à cogner dessus de toutes ses forces.
    — Qui est là ?
demanda-t-il de l’intérieur.
    — C’est moi... Otsū !
    — Qu’est-ce que tu fabriques,
à être encore dehors ?
    Il ouvrit promptement la porte, et
la considéra avec stupeur. Malgré les vastes auvents, une douche de pluie tomba
sur lui.
    — ... Entre vite ! s’écria-t-il
en voulant lui saisir le bras, mais elle recula.
    — Non. Je suis venue pour te
demander une faveur, et non pour me sécher. Je t’en supplie, Takuan,
descends-le de cet arbre !
    — Quoi ? Il n’en est pas
question ! répondit-il, inflexible.
    — Oh ! je t’en prie,
Takuan, il le faut. Je t’en serai éternellement reconnaissante.
    Elle tomba à genoux dans la boue,
et leva des mains suppliantes.
    — ... Ne t’inquiète pas de
moi, mais tu dois l’aider, lui ! Je t’en prie ! Tu ne peux tout
bonnement le laisser mourir... tu ne le peux pas !
    Le bruit de la pluie torrentielle
couvrait presque sa voix pleine de larmes. Avec ses mains qui restaient levées
devant elle, elle ressemblait à un bouddhiste qui pratique des austérités en se
tenant sous une chute d’eau glacée.
    — ... Je m’incline devant
toi, Takuan. Je te supplie. Je ferai tout ce que tu voudras, mais je t’en prie,
sauve-le !
    Takuan gardait le silence. Il
avait les yeux étroitement clos comme les portes du sanctuaire où l’on garde un
Bouddha secret. Poussant un profond soupir, il les rouvrit et lança feu et
flammes :
    — Va te coucher !
Immédiatement ! D’abord, tu es fragile, et rester dehors par ce temps est
un suicide.
    — Oh ! je t’en prie, je
t’en prie ! supplia-t-elle, la main tendue vers la porte.
    — Je me couche. Je te
conseille de faire la même chose.
    Sa voix était glaciale. La porte
se referma en claquant.
    Elle ne voulut toujours pas
renoncer. Elle rampa sous la maison jusqu’à l’endroit qu’elle supposait se
trouver au-dessous de celui où il dormait. Elle lui cria :
    — Je t’en prie ! Takuan,
c’est pour moi la chose la plus importante qui soit au monde ! Takuan, m’entends-tu ?
Réponds-moi, je t’en prie ! Tu es un monstre ! Un démon sans cœur et
sans chaleur humaine !
    Le moine l’écouta quelque temps
patiemment sans répondre, mais elle l’empêchait de dormir. Enfin, dans un accès
de colère il se releva d’un bond en

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