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La polka des bâtards

La polka des bâtards

Titel: La polka des bâtards Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen Wright
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si elle avait passé sa vie à répéter la scène,
elle se jucha agilement sur une boîte à biscuits et, avec un parfait naturel,
glissa sa carabine dans une meurtrière pour défendre sa ferme et sa famille
d’une horde de bandits pillards et impies.
    « Allez, sortez de là, ordonna une voix de l’autre côté
des murs.
    — Qui êtes-vous ? répondit le capitaine Gracie.
    — Des amis de l’homme blanc. C’est Conklin que nous
voulons. Envoyez-nous ce putois et on vous laisse tranquilles.
    — Il est malade. À peine conscient.
    — Et vous, qui êtes-vous ?
    — Rapprochez-vous un peu et je vous le dirai. »
    Un silence interminable. Puis une autre voix :
« Vous êtes dans quel camp ?
    — Je t’entends pas, l’ami. Viens jusqu’à la porte.
    — M’est avis qu’on a affaire à un foutu abolitionniste
qui a le cou qui lui démange.
    — Il n’est pas tout seul ! rétorqua Potter.
    — Il y a assez de corde pour tout le monde. On n’est
pas mesquins.
    — Ils vont attaquer », couina le P’tit Johnny
Phelps. Sa voix, déjà encline en temps ordinaire à grimper les octaves, avait
complètement largué les amarres.
    « Si j’en trouve un dans ma ligne de mire, se jura
doucement Potter, je vais lui faire un trou dedans, à ce bouffeur de crottin.
    — Du calme, les gars, répéta le capitaine Gracie. Visez
leurs boutons de culotte. Il faut leur laisser le temps de se préparer à
rejoindre Dieu. »
    Dans un mugissement soudain, la nuit se brisa sur un rocher
de flamme délirante surgi d’un royaume inconnu qui perça cette cloison de
ténèbres mince comme une feuille de papier ; lévitant dans les airs, il
fondait à toute allure, quoiqu’un peu branlant, droit sur la porte. « Mon
chariot ! » hurla M me  Conklin, tandis que chaque
fusil, chaque pistolet se déchargeait en même temps, dans une orgie sonore et
incandescente qui arracha au bébé une plainte inhumaine, trop puissante pour
ses petits poumons, emplit aussitôt l’espace confiné de nuages suffocants de
fumée soufrée, et ne contribua en rien à empêcher la boule de feu enragée de
poursuivre sa course bancale, comme entraînée par un treuil, crachant et
postillonnant un feu d’artifice d’étincelles, de cendre et de paille enflammée
avant de s’arrêter enfin, en cognant doucement, contre la porte de la cabane.
Le front plein de sueur, les yeux pleins de larmes, la bouche pleine de jurons,
les Régulateurs continuèrent avec une vigueur inentamée à prodiguer leur
sagesse de plomb via un arsenal bigarré – fusils Hawken, fusils Western,
carabines Sharps, mousquets Hall, fusils à alligator – puis, à court de
munitions pour les gros calibres, ils passèrent sans heurt aux Colt et aux
pistolets Austin tandis que le bébé braillait à pleins poumons, que la poudre
leur obstruait la gorge et que les balles ennemies faisaient plonk-plonk en
s’enfonçant dans les murs de rondins.
    « Démons, soyez maudits ! » s’écria Ike le
Velu, et le capitaine Gracie : « Faites-en du hachis, les gars,
faites-en du hachis ! » « Je suis aveugle ! », gémit
le P’tit Johnny Phelps, qui bascula en arrière dans le noir en se tenant le
visage et tomba seul dans la poussière. On voyait des flammes orange et jaunes
de sinistre augure griffer frénétiquement la porte, cherchant un accès par les
fentes étroites entre les planches.
    Potter remarquait à peine la vibration perpétuelle de ses
tympans, tant il était déterminé à planter une graine de métal dans les sillons
putrides de quelque esclavocrate, et il tirait avec un abandon farouche sur
tout ce qui semblait bouger dans le chaos ambiant. Il estimait avoir fait
mouche cinq ou six fois, grosso modo, lorsque, avec des cris étouffés et une
salve d’honneur, les cavaliers de la nuit sautèrent en selle et disparurent au
galop dans les ténèbres de l’ouest.
    Potter ôta le verrou et, avec l’aide du capitaine Gracie et
d’Ike le Velu, écarta de la porte le chariot en flammes. Trop englouti dans le
monde du feu pour espérer le salut, on le laissa brûler, et les derniers seaux
d’eau servirent à étancher les braises qui jonchaient le toit. Le P’tit Johnny
Phelps, après s’être roulé par terre dans sa panique aveugle, s’aperçut que les
particules inconnues qu’il avait reçues dans les yeux au plus fort du combat
s’étaient écoulées avec le flot de ses larmes et que, miséricordieusement, il
avait recouvré la

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