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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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éclatant... Seulement elle était de ceux qu’on ne remplace pas.
    Le duc se contenta de secouer la tête.
    — Ma mère, en vérité je suis monté quérir votre conseil.
    D’un geste, la princesse renvoya le médecin et son aide.

    Quand ils furent sortis, elle interrogea Charles du regard. Il hésitait. La lettre qu’il venait de recevoir provenait en droite ligne de Charles Quint, et ne lui proposait rien moins que la main de la sœur de l’empereur. Autant dire que le Habsbourg l’invitait à trahir le Valois son maître, s’il désirait sauver ses vieux territoires et en récupérer de nouveaux...
    Pour élaborer sa réponse, Charles aurait eu grand besoin de l’avis et des conseils de l’ancienne régente. Mais pouvait-il lui révéler le contenu d’une telle lettre, au risque de la tuer sous le coup de l’émotion ? Au risque, surtout, de voir cette mourante prendre trop vite un parti trop extrême... Charles, au dernier moment, choisit de biaiser.
    — Vous savez que Madame nous attaque devant le Parlement de Paris...
    — Cette Louise de Savoie ! fulmina la vieille princesse. Cette vipère que j’ai nourrie dans mon sein ! Ah ! la méchante ! La vilaine grande perche !
    Charles souriait sous cape du soudain emportement de sa marraine. S’il avait eu l’ambition de lui rendre un peu d’énergie, la manœuvre était un succès.
    — Madame rêvait de m’épouser, dit-il pour le seul plaisir de voir sa marraine pester de plus belle.
    Anne haussa les épaules.
    — Elle rêve surtout de votre fortune ! De notre fortune... Et de nos apanages, et de nos fiefs ! Cette femme est insatiable. Elle n’en aura jamais assez. La couronne elle-même, dont elle a pourtant ceint son fils, la couronne de saint Louis ne lui suffit pas.
    Elle eut une quinte de toux qui redonna des couleurs à son visage. Ses grands yeux gris-de-lin étaient demeurés beaux, et leur noblesse impérieuse donnait une haute idée de la régente qu’elle avait dû être, quarante ans plus tôt, lorsqu’elle matait les nobles et défendait le trône de son jeune frère, Charles VIII. Ce sont ces yeux de chat qui, dans la pénombre du chevet, scrutèrent l’éclat des petites médailles entretenant le souvenir des enfants de Suzanne, tous morts au berceau.
    — Les auriez-vous oubliés, Charles ?
    — Ma mère !
    — Auriez-vous jeté le voile sur ce que cette ogresse a fait subir à votre descendance ?
    Anne cherchait à tâtons les mains de son filleul, pour les saisir avec force.
    — Jurez-moi, Charles, de n’oublier jamais le mal que nous a fait cette horrible femme. Et jurez de nous venger.
    — Ma mère...
    — Jurez !
    D’une voix brisée, le connétable articula tout bas les mots fatidiques.
    — Je vous le jure.
    Il détourna vivement la tête pour dissimuler son aigreur. Elle avait fermé les yeux et soupirait profondément.
    — Je ne regrette qu’une chose : c’est d’avoir renoncé à vous envoyer à Paris, lorsque mon mari est mort... Vous n’aviez alors que quinze ans, certes ; mais vous auriez prêté hommage au roi Louis XII. Votre qualité de duc de Bourbon eût alors été reconnue ; et nous n’en serions pas là...
    — N’ayez aucun regret, ma mère. Cela n’aurait sûrement rien changé.
    La vieille dame ferma les yeux.
    — Je m’en vais, souffla-t-elle, je m’en vais doucement, mais sûrement. Or je veux être certaine qu’après moi, les terres des Bourbons ne vous seront point arrachées !
    Une angoisse perçait dans sa voix.
    — Remariez-vous, mon enfant, remariez-vous très vite et faites-nous de petits Bourbons ! Je ne serai plus ici pour les élever, mais je vous promets que, de là où le Bon Dieu m’aura mise, je veillerai sur eux comme sur vous.
    — Il n’est point temps...
    — Il est grand temps, au contraire ! Trouvez-nous donc une femme, Charles !

    Le duc de Bourbon considéra que le moment était venu, peut-être, de révéler à sa belle-mère la teneur de cette maudite lettre... Mais comment s’y prendre ?
    — J’ai revu hier Jean de Saint-Vallier, dit-il. Il m’a supplié, encore une fois, de demander à la reine la main de sa jeune sœur.
    — Sa jeune sœur ?
    — Oui, la petite Renée de France.
    — Ha ! Votre Saint-Vallier ne vient jamais ici qu’en mission ! Dites-vous bien que s’il vous propose cela, c’est qu’on l’a prié de le faire. D’ailleurs sa fille a l’amitié de la reine Claude... Diane de Brézé ! Je l’ai faite,

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