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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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demanda pitié d’une voix meurtrie.
    — Oh, madame, c’est un coup terrible...
    Louise de Savoie la toisa, étonnée.
    — Eh bien, ma chère petite, mais qu’est-ce donc ? De quoi me parlez-vous ?
    — C’est mon père, madame... Mon père, Jean de Poitiers...
    — Mon Dieu, serait-il mort ?
    — Non, madame, mais je crois qu’il eût mieux fait.
    La mère du roi, tournant le dos à la cheminée, tenta de relever Diane de Brézé ; mais celle-ci s’abîmait dans une révérence exagérée.
    — Pardon, madame, ayez pitié de nous !
    — Mais qu’en est-il, à la fin ?
    Rassemblant ses esprits, la grande sénéchale se redressa, recomposa quelque peu son visage et, d’une voix blanche, livra enfin l’explication de sa détresse.
    — Le roi, madame, vient de faire arrêter mon pauvre père. On l’accuse nommément d’avoir trempé dans l’affreuse conspiration. Celle du connétable !
    Madame ouvrit de grands yeux.
    — Si cela était, Brézé, je vous avoue que je serais bien ennuyée.
    — Oh, madame !
    — Il suffit ! Relevez-vous et tâchez d’en savoir davantage.
    La mère du roi s’interrompit un instant, puis elle ajouta un de ces mots dont on disait qu’ils finiraient par lui aliéner les meilleures volontés.
    — Les jeunes princes vous aiment beaucoup ; ils seraient bien chagrinés de vous perdre !
    Prison de Loches.
    C ommencée à Tarare, la détention de Jean de Saint-Vallier devait se poursuivre en Touraine, à Loches. C’est au vieux donjon de Foulques Nerra, faisant office de prison depuis le règne de Louis XI, que l’on avait conduit le père de Diane. Sa cellule, au sommet de la tour, était de tradition celle des criminels ; on avait eu soin, pour sa honte, de le lui préciser.
    Du reste le malheureux, très accablé, sujet depuis son arrestation à un regain de cette fièvre qu’il avait rapportée d’Italie, n’était que l’ombre de lui-même. Un valet fidèle, Chabaud, installé non loin du château à l’auberge de la Tête noire, était régulièrement admis à le visiter ; et c’était à chaque fois pour constater, impuissant, la dégradation de son état. Fort amaigri, le teint blafard, les yeux tout enfiévrés, le « gentil seigneur » donnait le sentiment d’aller au-devant de sa déchéance.

    Le valet, ce matin-là, fut admis peu après l’aube dans la geôle de son maître. Un petit jour blafard s’insinuait à peine en ces lieux sinistres.
    — Messire, lança Chabaud en exagérant son entrain, l’on m’a fait quérir afin de vous rendre tout beau !
    Le captif émergea, presque hagard, d’un coin d’ombre.
    — Dieu du Ciel... Ont-ils parlé d’une visite ?
    — On ne m’a rien dit, mais c’est probable !
    Le gentilhomme voulut se jeter, plein d’espoir dans les bras du valet ; mais une chaîne retint son élan, qui le reliait au mur par un collier de fer. Il retomba sur les genoux.
    — Ah, Chabaud, faut-il que tu me voies dans cet appareil ?
    — C’est grand pitié, mon maître, je le déplore autant que vous !
    La douleur altérait la voix du serviteur. Il n’en poursuivit pas moins, d’un ton faussement enjoué.
    — Dites-vous que c’est tout passager... Bientôt les juges verront leur méprise.
    — Chabaud, gémit le prisonnier, ils m’ont enchaîné comme une bête.
    Le valet s’enhardit à le prendre par les épaules, pour l’aider à se relever ; pendant un moment, les deux hommes mêlèrent leurs soupirs. Puis Chabaud entreprit la toilette du captif : le pauvre homme paraissait vieilli ; il était sale. Ses cheveux et sa barbe, de blonds, avaient viré au blanc.
    — Plaise à Dieu que mes lettres aient touché leur but, qu’enfin je puisse voir ou mon gendre, ou ma fille ! Ma petite fille...
    — Allons, messire, allons !
    Le gentilhomme tenta de se ressaisir.
    — Si c’est mon gendre qui est venu, je m’en vais tout lui justifier. Lui, sait bien que je ne suis pas un traître ! Il va me prendre en pitié. Nous allons concevoir ensemble un moyen de m’ôter de là au plus vite. Il est grand sénéchal, tout de même, grand sénéchal !
    — Il faut vous calmer.
    — Seigneur Dieu, implora Saint-Vallier en levant au ciel un regard déchirant. Faites que je sorte de céans !
    — Il faut songer d’abord à vous vêtir...
    Le valet l’assista pour passer une chemise sur son torse étique, cacher ses cuisses osseuses sous un haut-de-chausse, couvrir de bas, tant bien que mal, ses jambes et ses

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