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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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d’une journée par ailleurs bien remplie.
    — Françoise, m’amie !
    Elle le fit taire en avançant une main délicate vers ses lèvres. Les amoureux s’embrassèrent, timidement d’abord, puis à pleine bouche ; ils s’enlacèrent tendrement, sans se préoccuper du tout des éventuels témoins. L’un comme l’autre étaient trop emportés, soulevés trop loin de la terre des hommes, pour s’en soucier le moins du monde.
    Ce fut sans doute Françoise qui reprit pied la première. Depuis tant de semaines et tant de mois, elle avait espéré ces retrouvailles ; elle n’allait pas, à présent, se laisser déborder par ses sens ! Exactement comme dans ses rêves, elle tira Gautier par la main – toucher sa main ! – et, discrètement, comme en cachette, le conduisit jusqu’aux marches menant aux étuves.
    C’était la seule destination possible pour un cavalier rompu – destination interdite, évidemment, aux jeunes filles bien nées... L’attrait n’en était que plus vif. Et c’est le cœur battant que Françoise, elle-même surprise de sa propre audace, menait au bain son galant.
    Lui, souriait et se laissait faire. Lentement, posément, elle lui ôta son bonnet de velours, dégrafa son pourpoint, dénoua ses aiguillettes. Il fit au mieux, de son côté, et vint à bout, sans trop de peine, de la robe de velours bleu tendre, des cottes, vertugale et vasquine, et des jupes de la demoiselle... Seulement l’impatience de Gautier, son avidité même, ne valaient pas la méthode de Françoise, exquise et désarmante de doigté. Des frissons de plaisir parcoururent le corps du garçon quand elle lui défit sa chemise et tira sur ses bas-de-chausses. Il était nu bien avant elle, et ne chercha pas à cacher les avantages dont la nature l’avait doté.
    Ils n’étaient rien, cependant, comparés aux appas de la jeune fille. Tout en elle fascinait les regards et ravissait les sens : la douceur nacrée de la peau, la perfection d’un corps aux hanches galbées, au ventre menu, aux seins ronds et fermes ; et ces tétons pointant haut ; et cette ineffable magie se dégageant de la plus opulente des chevelures...
    Sans le secours de ses mains, Gautier caressa de son corps les parties les plus cachées, les plus sensibles de celui de Françoise. Sa bouche fit merveille où ses doigts s’interdirent d’aller, et l’eau tiède, presque chaude, qui les couvrait tous deux tour à tour, leur semblait un voile de douceur ajouté à d’autres douceurs.
    Quatre fois, cinq fois même, émergeant d’un éther savonneux, c’est un Gautier plein de vigueur qui honora sa Françoise offerte. À chaque fois, elle accompagna sa jouissance extrême, la devança même et la sublima. Quand, à la fin, les amants comblés se trouvèrent fatigués de leurs propres sens et repus de la chair de l’autre, enfin Françoise consentit à parler.
    — Bonjour, mon aimé, dit-elle.
    — Oh m’amie, bonjour à toi.
    — Tu as fait bon voyage ?
    — Puisque je chevauchais vers toi !
    — Et quelles nouvelles avais-tu...
    À ces mots, comme piqué d’un coup d’éperon, Gautier sursauta et s’assit. Il était revenu tout à lui.
    — Mon Dieu, la lettre !
    — Quelle lettre ?
    — Celle que m’a confiée le maréchal à destination de Mme de Brézé. Il faut que je la porte à l’instant !
    — Rhabille-toi, mon cœur. La grande sénéchale est assez farouche...
    Françoise rit de bon cœur ; mais Gautier s’affolait.
    — J’ai failli à ma mission, dit-il. Je devais remettre cette lettre à mon arrivée.

    Le jeune Coisay, séché, coiffé, paré par des mains amoureuses, fut bientôt introduit dans les appartements de la reine Claude. La souveraine, alors souffrante, gardait le lit. Rideaux tirés. Gautier s’inclina néanmoins dans cette direction, bien respectueusement ; puis il salua très bas la mère du roi qui se chauffait les mains au foyer. Enfin il se dirigea vers la grande sénéchale et, baissant la voix autant qu’il était possible, lui révéla l’importance de la missive et sa provenance.
    Le ciel chargé avait avancé la nuit, et la grande sénéchale dut s’approcher de bougies allumées pour déchiffrer la fine écriture du maréchal. À mesure qu’elle lisait, Gautier vit le sang disparaître de son visage ; il se dit que, décidément, la destinée lui confiait un bien étrange office...
    À la fin, presque évanouie, Diane se précipita vers Madame et, tombant à genoux,

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