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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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pardon. Mais on m’a menacé des pires tourments...
    Le délateur se replia sur lui comme un insecte délivré de son poison. Le Premier président le fit évacuer ; il avait obtenu ce qu’il en attendait. Le magistrat vrilla un regard glacé dans celui, plus fiévreux que jamais, de l’accusé.
    — Vous êtes un traître, monsieur. Et vous n’avez même pas le courage de vos engagements.

    La fièvre, chez Saint-Vallier, redoubla si bien qu’il fut dès lors parcouru de frissons et secoué par la toux. On l’avait, avec mépris, remonté jusqu’au cachot dont on ne le sortit, quelques jours plus tard, que pour lui tirer des aveux complets sur sa présence à Montbrison en ce jour fatidique, et sur sa pleine et entière connaissance de la trahison.
    — Dieu m’est témoin que j’ai pourtant bien tenté de dissuader monseigneur d’aller au bout de son projet...
    — Mais pourquoi, lui demanda l’un des commissaires, pourquoi, dans ce cas, n’avoir pas dénoncé le complot ?
    Assez piteusement, Jean de Saint-Vallier prétendit qu’il en avait eu le projet, mais l’avait différé dans le seul but d’en apprendre davantage.
    — Mon intention était, par la suite, d’aller tout révéler au roi...
    — Eh ! Mais que vous fallait-il de plus ? demanda le premier président en haussant les épaules.
    Les trois magistrats échangèrent un regard entendu. À leurs yeux, le sort du gentilhomme était scellé.
    Château de Blois.
    Q uand François remonta de Lyon, son plus grand bonheur fut de revoir Marguerite. Leurs retrouvailles, comme toujours, furent mieux que chaleureuses ; et le souvenir pénible de l’après-dînée d’orage semblait s’être dissipé. Leur liaison si forte avait retrouvé la franchise, l’assurance qui, seules, permettent d’épancher les sentiments. Et sans rien oublier, sans doute, d’un douloureux épisode, ils firent le choix tacite de n’y plus faire la moindre allusion.
    François, pour autant, n’avait pu s’extraire du crâne certaines impressions funestes ; plus que tout, il gardait à l’esprit, prêt à ressurgir à l’occasion, ce regard affreux – regard de mort – que la sœur adorée, surprise et comme tétanisée, lui avait décoché au moment de la faute. Il arrivait même qu’au milieu de la nuit, le roi s’éveillât d’un coup, le cœur démonté, la sueur au front, tiré de rêves agités par ce coup d’œil effroyable et tenace.
    Il n’avait osé en parler à son confesseur, s’était juste risqué à évoquer l’affaire, à mots couverts, avec un Bonnivet qui ne prenait rien au sérieux. Le plus simple, et le plus naturel, eût été, assurément, de s’ouvrir discrètement de son remords à Marguerite elle-même ; toutefois lorsque François tenta quelque approche en ce sens, il comprit que le remède, en la matière, serait sans doute pire encore que le mal, et qu’en cas de blessures très intimes à la conscience, le silence seul pouvait cautériser les plaies. Le silence et le temps...

    Insensible à ces crises intestines, Louise de Savoie ne l’était nullement, en revanche, à celles qui agitaient le gouvernement. Ainsi, à peine eut-elle son fils près d’elle, de nouveau, qu’elle multiplia les occasions de noircir à ses yeux le baron de Semblançay  20 . Écarté du pouvoir, avec ses parents et alliés, le vieux financier commençait à payer pour ses indiscrétions de l’an passé. Madame, qui remâchait volontiers ses vengeances, avait juré sa perte ; et sans relâche elle œuvrait à susciter une commission chargée de pointer les registres du vénérable commis. Le roi semblait prêt, du reste, à se laisser fléchir : il espérait peut-être que – miracle de l’arithmétique – ce créancier gênant se révélerait, en fin de compte, débiteur de la Couronne...

    Parmi les seigneurs qu’avait retrouvés François sur les bords de Loire, le grand sénéchal se montrait fort assidu à son service. Il est vrai que les aveux de son beau-père , le transfert de celui-ci au Châtelet de Paris et, dans la foulée, sa condamnation par le Parlement, avaient beaucoup fragilisé sa propre position. Quand Louis de Brézé avait appris, à la mi-janvier, que son beau-père, déjà privé de ses dignités et prérogatives, allait être mis à mort, il s’était senti pris de vertige... En d’autres temps, il aurait sûrement dû remettre sa charge et se retirer honteusement sur ses terres de Normandie ; mais

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