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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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étrange » la marche arrière du connétable vers Moulins – encore ignorait-il qu’au même moment, son cher « cousin » recevait la visite d’un envoyé solennel du roi d’Angleterre...
    Quand il atteignit Gayette à son tour, le 7 septembre à l’aube, Gautier fut surpris de n’y trouver ni Bourbon, ni sa suite. Il est vrai que celle-ci, depuis La Palisse, s’était fort allégée dans un souci de mobilité. Le jeune écuyer tenta de se renseigner ; mais la population, visiblement achetée, demeurait muette sur les mouvements du prince. À Varennes, cependant, un batelier finit par éclairer sa lanterne : il avait vu passer le connétable de France, apparemment en bonne santé, au milieu de ses hommes ; il avait eu le temps d’admirer sa belle haquenée baie, mais ne s’était nullement enquis de sa destination... Heureusement, un vivandier des environs s’était montré plus curieux ; il fut capable de préciser que la troupe avait l’intention de parcourir d’une traite six ou sept lieues, jusqu’à Chantelle.
    Chantelle ! Au nom de cette forteresse qu’il savait sous la garde d’une vingtaine de canons, Coisay ne put réprimer un frisson. Ainsi, le duc se réfugiait ; il avait enfin franchi le Rubicon et, sans défier ouvertement le roi, se mettait toutefois à l’abri de ses coups éventuels...

    Gautier piqua des deux 1 en direction de l’ancienne demeure d’Anne de Beaujeu ; or il fit si bien, si vite, qu’il atteignit Chantelle sur les talons du connétable. Après une longue attente imposée à sa pesante assiduité, le duc de Bourbon accepta de le recevoir. Il avait cette fois tombé le masque, et ne prit même pas la peine de s’asseoir sur son lit pour mimer la maladie ou la fatigue. C’est debout qu’il reçut l’écuyer royal, tandis qu’il soupesait et admirait une épée somptueuse, dont la garde était d’or ciselé.
    — Soyez le bienvenu, lança-t-il à Gautier du ton le moins chaleureux.
    — Monseigneur, je...
    — Vous êtes bon cavalier, je le savais ; mais il me semble tout de même que vous me serrez les éperons de bien près.
    Gautier ne s’attendait pas à tant de franchise. Il hésita un instant avant d’adopter, pour répondre, le même ton d’ironie faussement bienveillant.
    — C’est aussi que vous avez, monsieur, de bien meilleurs éperons que je ne pensais...
    Le connétable fit disparaître la lame de l’épée dans un fourreau doré. Il paraissait léger, comme libéré d’un poids, et consentit à sourire à l’impertinente remarque de l’écuyer.
    — Vois-tu, petit, se confia-t-il en adoptant tout à coup le ton le plus familier, ce repli dans Chantelle pourrait passer pour un acte de défiance à l’égard de notre souverain. En vérité, il n’en est rien. Simplement, je sais le roi en colère ; je connais la malveillance de ceux qui l’entourent, et j’ai pu maintes fois juger des intentions de la Couronne à mon égard.
    — Monseigneur, je puis vous assurer que le roi n’est point du tout en colère, et que...
    — Tes dénégations, petit, sont ridicules ; elles ne changeront rien !
    Gautier sentit le sol se dérober sous ses jambes fourbues ; il n’avait pas été préparé à de tels échanges, et se savait, du reste, peu versé dans la politique.
    — Monseigneur...
    — Tais-toi ! Et retiens bien simplement que si j’ai préféré mettre cette distance entre le Maître et moi, c’est pour nous donner, à lui, le temps d’infléchir ses décisions, à moi, celui d’affermir les miennes.
    Le duc de Bourbon avait reposé sa belle épée. Il fixa le jeune Coisay droit dans les yeux.
    — Apprends-le : j’ai su, il y a quelques jours, que ces messieurs du Parlement étaient revenus sur leurs positions, et qu’ils rendaient exécutoire un arrêt de séquestre de tous mes biens et possessions. Dit-on cela chez le roi ?
    L’écuyer demeura court. L’autre répéta la question sur un ton soudain véhément.
    — Dit-on cela chez François ?
    Gautier baissa les yeux. Il ignorait, forcément, qu’en Gascogne, les troupes espagnoles pointaient le nez ; que des lansquenets allemands chevauchaient déjà par centaines en Champagne. Il ignorait qu’un gros détachement de quatre mille hommes, en ce moment même, marchait sur Chantelle. Il ignorait toutes ces choses que le duc de Bourbon, lui, savait pertinemment...

    Le lendemain, dès avant l’aube, le connétable de France se mettrait en route entouré

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