Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
Vom Netzwerk:
par la peur, et moins par la peur encore que par le regret.
    À genoux, Jean accepta de demander pardon à Dieu et au roi, de réclamer justice, de dire hautement qu’il acceptait la mort qu’on s’apprêtait à lui donner.
    — Je vais mourir, dit-il, je veux mourir.
    Son esprit devenait confus, mais une image ne le quittait pas : celle de Diane, naguère encore, le recevant à Blois du côté des loges neuves, si belle et souriante et menue dans sa belle robe ; Diane qui l’avait gavé d’écrevisses et de beaux projets, et qui croyait pouvoir compter sur lui pour assurer son ascension à la Cour...
    Deux larmes douloureuses perlèrent aux joues du condamné.
    Autour de lui, les bourreaux préparaient l’appareil de son trépas. À trois reprises, déjà, le plus corpulent des deux avait soupesé lentement la longue et lourde épée qui, dans un instant, allait détacher sa tête de son corps. Plus d’une fois, dans sa vie, Jean avait eu l’occasion d’assister à une décollation. Il s’était dit, alors, qu’il préférerait n’importe quelle autre mort. Cette idée redoubla ses douleurs ; des frissons le secouèrent de plus belle. Un voile, par moments, venait lui troubler la vue.

    Dans la foule, un murmure naquit et s’amplifia : le public, avide de sang, s’impatientait. Les spectateurs les plus proches de l’échafaud se sentaient gagnés, peu à peu, par l’angoisse du condamné ; ils auraient aimé qu’on abrégeât son attente et la leur.
    — Qu’est-ce qu’on guigne ? demanda une voix perdue.
    — C’est bien cruel, enchérit une autre qu’un grondement sourd approuva.
    Monsieur de Paris 1 tardait à remplir son office. De longues, très longues minutes s’égrenèrent. Pour soulager le condamné, toujours agenouillé dans le froid, et secoué de tremblements irrépressibles, on hissa sur les planches une sorte d’escabeau sur lequel il put s’appuyer. Ses mains liées étaient réunies dans une prière fervente. À deux pas, le billot attendait, massif et lugubre, plein d’entailles et peint couleur de sang.
    — Tuez-le, maintenant ! criait-on dans le public.
    — Allons-y, que se passe-t-il ?
    Des sifflements, des huées s’élevèrent de la foule, que l’attente rendait plus compacte et fébrile. Le jour, déjà chiche, commençait à décliner. Dans la tribune, certains représentants de la Cour et du Parlement bâillaient ; d’autres toussotaient d’agacement. Sur l’estrade, des signes de nervosité se manifestèrent jusque chez les bourreaux eux-mêmes. Le curé de la Madeleine, rouge et suant en dépit du froid, passait son temps à s’essuyer le visage avec une de ses manches de laine. Seul Jean, apparemment serein – à moins qu’il ne fût déjà inconscient à demi – subissait maintenant sans broncher l’interminable délai.

    Une pluie fine, imperceptible mais pénétrante, se mit à tomber.
    Enfin d’un pas lourd, l’exécuteur se saisit, pour la quatrième fois, de l’épée de Justice. Il assura sa prise, respira plusieurs fois, et vint lentement se placer tout près du billot rouge. Deux aides, déjà, se saisissaient du condamné qui émit un maigre gémissement dans le silence. On lui fit appliquer le côté gauche de la tête sur le billot humide, frais.
    Une rumeur venue d’un coin de la place, progressait vers son cœur. Un lointain cavalier, peinant à se frayer un passage, tentait de se faire entendre des exécuteurs. « Holà, criait-il, holà ! » Le confesseur se retourna, comme appelé par une apparition.
    — Cessez, cessez !
    Quand le chevaucheur, dans un brouhaha maintenant général, fut parvenu à une toise de l’estrade, il brandit un rouleau bien visible, cacheté de cire verte.
    — J’apporte céans la rémission du roi !

    Sur le coup, la tribune parut moins surprise que la foule. Ces messieurs avaient-ils été prévenus ? L’un des clercs du greffe criminel quitta prestement sa place pour se précipiter vers l’échafaud. Il s’était saisi au passage de la lettre de grâce, dont il donna lecture aussitôt. L’édit rendait un hommage appuyé au mari de Diane.
    « Comme notre cher grand sénéchal de Normandie, ainsi que les parents et amis de Jean de Poitiers, nous ont, en très grande humilité, suppliés d’avoir pitié dudit Poitiers, et eu égard aux grands services qu’ils nous ont rendus depuis notre avènement, et puisque le grand sénéchal nous a montré loyauté et fidélité en aidant

Weitere Kostenlose Bücher