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La Régente noire

Titel: La Régente noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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Frias, gouverneur de Castille, chargé par l’empereur de s’occuper des otages. La reine se méfiait de ce grand seigneur un peu cassant ; elle avait toujours ressenti, confusément, un certain malaise en sa présence. Le duc salua noblement les dames, et s’approchant de la reine Éléonore, demanda la grâce de s’entretenir avec elle en particulier. Aussitôt les dames s’éloignèrent, pour former conciliabule à quelques jets de pierre.
    — Madame, commença le duc avec cérémonie, j’ai reçu tout à l’heure, de l’empereur et roi, des nouvelles préoccupantes. Sa Majesté s’inquiète pour le moins du tour pris par les événements ; elle constate que les Français ne se pressent pas de ratifier le traité ; elle craint fort que leur roi ne fasse injure à sa parole de chevalier... En un mot, Sa Majesté me demande, afin de marquer hautement sa déception, de renoncer pour le moment à vous conduire en France, et de prendre, au contraire, le chemin du sud et de Valladolid.
    La reine parut interloquée.
    — Mon frère souhaite nous voir le rejoindre à Valladolid ?
    — Les otages s’arrêteront en chemin, avec leur suite ; j’ai ordre de les loger dans mon domaine de Villalba.
    — Villalba ? Mais c’est une forteresse ! Ne me dites pas, monsieur, que vous allez jeter ces enfants en prison !
    — Madame, je ne fais qu’obéir aux ordres de Sa Majesté.
    Éléonore était consternée. Son visage, décomposé, fit comprendre à ses dames que l’entretien était néfaste ; et dès que Frias se fut éloigné, toutes accoururent aux nouvelles.
    — Mes amies, gémit la souveraine, c’est une catastrophe. Une catastrophe !
    — Madame, que se passe-t-il ? demanda la duchesse de Brissac.
    Un silence ; puis la reine Éléonore regarda dans les yeux la gouvernante du dauphin.
    — Nous n’allons plus en France, annonça-t-elle.
    — Comment cela, madame ?
    — Nous descendons en direction de Valladolid. Mon frère exige que les petits princes et leur suite soient mis en résidence à la forteresse de Villalba.
    — Oh, mon Dieu ! Aidez-nous, madame. Vous êtes bonne, vous comprendrez...
    — Je comprends, ma chère, seulement je n’y puis rien.
    La voix d’Éléonore s’était brisée. Elle parut d’autant plus désemparée que les dames, autour d’elle, avaient pris la nouvelle avec une résignation qui paraissait tout rendre inéluctable.
    — Que va penser le roi, mon mari ? demanda-t-elle non sans une pointe de candeur.
    — Le roi ne cède jamais au chantage, répondit amèrement Mme de Brissac.
    Pour la future reine de France, c’était un beau rêve qui semblait devoir s’écrouler. Éléonore redoutait la colère de François, sa réaction outrée en apprenant l’incarcération de ses fils, sa décision, dès lors, de renoncer à s’engager plus avant envers sa nouvelle femme...
    — Je suis maudite, murmura-t-elle.
    Se pouvait-il qu’à la veille d’un mariage enfin désiré, au moment même où elle allait toucher du doigt son bonheur, les jeux infernaux de la diplomatie ne vinssent lui jouer le plus vilain tour et la priver de son mari, de son mariage ?
    — Je dois être maudite.
    Forteresse de Villalba.
    C ’était un cabinet magnifique, de chêne sombre sculpté, avec des ferrures brillamment ciselées, et tout un jeu de clés et de rouages qui permettait de le rendre inviolable. Grâce à un piètement amovible, il pouvait suivre le duc de Brissac dans ses déplacements. L’intérieur, de bois précieux et doré, recelait, dans un ensemble ajusté de tiroirs à secret, tous les documents, certificats, lettres patentes, effets de crédit divers, dont la régente avait muni le gouverneur pour son importante mission.
    D’un geste habitué, le duc déverrouilla le cabinet pour en faire basculer le battant. Il actionna des mécanismes, et libéra une cachette, d’où il sortit un petit sac de velours contenant des pierres de valeur. C’étaient des joyaux que Louise de Savoie, la mort dans l’âme, avait confiés à ses soins, pour le cas où ses petits-enfants seraient venus à manquer du nécessaire... Le négociant prêt à les échanger contre de vulgaires deniers attendait dans la pièce attenante. Brissac choisit plusieurs belles émeraudes, resserra les autres dans le sac et le replaça, en soupirant, dans sa cachette.
    Puis il referma le cabinet.

    À la Couronne de France incombait, selon les termes du traité, l’entretien des quelques

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