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La règle de quatre

La règle de quatre

Titel: La règle de quatre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ian Caldwell
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dans la salle. Paul l’interroge.
    — Comment va Charlie ?
    J’ai l’impression de sentir le souffle d’un train fantôme surgissant du passé. Le médecin porte une blouse vert clair, de la même couleur que les murs de la maison de convalescence où j’ai séjourné après l’accident. Une couleur glauque, comme celle des olives écrasées avec du citron vert. La kinésithérapeute me répétait sans cesse de ne pas baisser la tête. Je ne réapprendrais jamais à marcher si je perdais mon temps à contempler les broches qui me sortaient de la jambe. « Regardez devant vous, me disait-elle. Toujours devant. » Et devant moi, il y avait ces murs lugubres.
    — Son état est stable, déclare l’homme à la blouse verte.
    Le vocabulaire des médecins. Deux jours après qu’ils eurent réussi à stopper l’hémorragie de ma jambe, mon état fut jugé stable. Cela voulait tout simplement dire qu’il évoluait moins rapidement vers la mort.
    — On peut le voir ? demande Paul.
    — Non, répond l’homme. Il est toujours inconscient.
    Paul hésite, comme si « stable » et « inconscient » étaient antinomiques.
    — Il s’en sortira ?
    Le regard du médecin exprime à la fois la compassion et une certitude.
    — Le pire est passé.
    Paul esquisse un sourire, puis remercie l’homme en vert.
    Je ne traduis pas. Je ne lui dis pas ce que ces mots sous-entendent. Dans la salle d’urgence, ils sont en train de se laver les mains et de passer la serpillière pour préparer l’arrivée de la prochaine ambulance, du prochain blessé. Oui, pour les médecins, le pire est passé. Mais pour Charlie, ça ne fait que commencer.
    — Dieu merci ! chuchote Paul, comme pour lui-même.
    Une évidence me saute aux yeux. Je n’ai jamais envisagé que Charlie pouvait mourir de l’explosion dans les tunnels. Je n’ai jamais cru cela possible.
    Paul marmonne quelque chose sur la cruauté des paroles que Taft m’a lancées dans son bureau, tandis que je règle des formalités administratives. Il n’y a pratiquement rien à faire : j’ai une feuille ou deux à signer de ma main valide et une carte d’identité à présenter. La représentante de l’université est passée par là et a tout arrangé. Je me demande ce qu’elle a bien pu raconter à l’inspecteur Gwynn pour qu’on nous libère aussi facilement. Je me remémore alors les paroles de Gil.
    — Curry était là ?
    — Il est parti quelques secondes avant que tu n’arrives. Il n’avait pas l’air dans son assiette.
    — Pourquoi dis-tu ça ?
    — Il portait les mêmes vêtements qu’hier.
    — Il était au courant, pour Bill ?
    — Oui. Mais j’ai eu l’impression qu’il croyait…
    Paul laisse la phrase en suspens. Puis il reprend :
    Il m’a dit : « On se comprend, tous les deux, fiston.
    — Ce qui veut dire…
    — Je ne sais pas. Comme s’il voulait me pardonner.
    —  Te pardonner ?
    — Il m’a dit de ne pas m’inquiéter. Que tout se passerait très bien.
    Je n’en reviens pas.
    — Comment peut-il imaginer une seconde que tu puisses faire une chose pareille ! Que lui as-tu répondu ?
    — Je lui ai dit que ce n’était pas moi, se défend Paul. Et je lui ai parlé de ce que j’ai trouvé.
    — Dans le journal ?
    — Tom, j’étais désemparé. Il était tellement énervé. Il m’a dit qu’il n’arrivait pas à dormir, qu’il était inquiet.
    — Mais pourquoi inquiet ?
    — Inquiet à mon sujet.
    Je le sens au ton de sa voix : il est très affecté par la réaction de Curry.
    — Écoute, Paul, c’est complètement fou. Cet homme raconte n’importe quoi !
    — « Si j’avais pu deviner que tu ferais ça, j’aurais agi autrement. » Voilà ce qu’il m’a dit avant de partir.
    J’ai envie de débiter tout le mal que je pense de Curry. Mais je ne dois pas oublier que l’homme qui a osé proférer des accusations aussi terribles est pratiquement un père pour Paul.
    — Qu’est-ce qu’elle te voulait, la fliquette ? demande-t-il pour changer de sujet.
    — Me faire peur.
    — Elle pense la même chose que Richard ?
    — Oui. Ils ont essayé de te faire avouer ?
    — La représentante de l’université est arrivée avant qu’ils s’y mettent. Elle m’a conseillé de ne pas répondre aux questions.
    — Que vas-tu faire ?
    — Elle m’a suggéré de trouver un avocat.
    Il a parlé sur un ton qui laisse entendre qu’il aurait moins de mal à dénicher un

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