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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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les doigts noueux frémissaient sur
sa canne.
    Elle
reporta son regard sur eux. Ils redoutaient de la colère. Ils furent surpris de
découvrir une gravité amère.
    — Fille
de Râ, fille d’Akébo et de Bilqîs, fidèle d’Almaqah, reine de Saba,
murmura-t-elle, faisant rouler les mots dans sa bouche comme pour les essayer.
Voilà ce que vous voulez de moi. C’est vous qui le voulez, car mon père
n’aurait pas osé avoir cette pensée. Il craint trop mon reproche. Il n’a pas
tué le taureau dans le temple de Bilqîs, à Maryab. Ma mère erre toujours dans
le ciel de l’autre monde sans s’asseoir jamais au côté d’Almaqah.
    Himyam
ouvrit la bouche pour protester. Makéda l’interrompit d’un signe.
    — Tu
as dit ce que tu devais me dire, sage de mon père. Pour le reste, je sais ce
que tu penses. Laisse-moi penser aussi. Sois sans crainte. La sagesse d’Akébo
le Grand coule dans mes veines autant que la colère ou le reproche.
    Elle les
gratifia d’un sourire qui ne monta pas jusqu’à ses yeux.
    Elle
saisit un gâteau et le tendit à Myangabo.
    — Pourquoi
me proposer ce qui est à toi, mon oncle ? Les rois sont des hommes. Des
fils ou des frères. Si mon père venait à faiblir, la coutume te désignerait roi
de Saba. Ce serait plus judicieux qu’une fille jeune au mauvais caractère.
    Myangabo
gloussa et mordit avec soulagement dans le gâteau.
    — En
Egypte, les femmes et les filles de Pharaon deviennent reines. Personne n’y
trouve rien à redire. Celles dont on se souvient n’ont pas été plus mauvais
pharaons que leurs époux, leurs frères, leurs fils ou leurs pères.
    — Nous
sommes à Saba, mon oncle. Même si Râ trouve bientôt des temples dans notre
royaume, nos coutumes ne sont pas celles d’Egypte.
    — Les
coutumes se font et se défont avec le temps, intervint sèchement Himyam. Les
puissants lèguent des coutumes aux peuples, non l’inverse.
    Myangabo
approuva et plaça une main sur sa poitrine.
    — Il
y a aussi que l’envie d’être roi me manque, Makéda. D’abord, je suis plus vieux
que mon frère Akébo. Et je n’ai jamais eu comme lui le goût des batailles. Je
détesterais me faire trancher des parties du corps pour le prix d’une
victoire ! Sans compter que jamais je ne saurais être assez cruel pour
être craint du peuple et des jaloux.
    Il avait
prononcé ces derniers mots doucement mais en soutenant le regard de sa nièce.
Makéda cilla à peine. Himyam, pour une fois, montra un peu d’embarras.
    — Nous
savons que tu peux être une grande reine, dit-il. Ton père le sait depuis
longtemps.
    — Grande
et cruelle ?
    — L’avenir
le dira.
    Ils ne
plaisantaient pas. Myangabo retint son sourire de diplomate.
    — On
peut être cruel si l’on sait être sage tout autant, déclara-t-il.
    — Suis-je
sage à vos yeux ?
    — Tu
as encore l’âge d’apprendre, répondit Himyam.
    — Et
le sage de mon père s’en assurera. L’amusement était revenu dans le ton de
Makéda.
    Elle leva
les yeux vers le ciel. Le soleil passait à peine au-dessus des terrasses.
    Ô Râ,
forme d’éternité, me voici !
    Maître
rayonnant, Seigneur de lumière, Tout ce qui est vient de ton flanc. Moi qui
passe dans ton chemin de vérité Je suis pure, je suis pure. Mon offrande est le
souffle qui vogue Sur mes lèvres, Par ta volonté. Oh permets qu’il dure Forme
d’éternité.
    Makéda
avait chantonné les paupières closes. Myangabo béa de surprise :
    — Tu
connais la prière de Râ ?
    — Tu
serais étonné par mon savoir, mon oncle. Te voilà de retour d’Egypte après deux
longues années. Durant ces saisons, crois-tu que je n’ai fait que dormir et
bavarder avec les servantes ? Je sais, par exemple, que les choses ne vont
pas si bien que cela à Maryab pour le traître Shobwa. Le vieux seigneur Yahyyr,
qui était si fidèle à mon père, a bien œuvré contre lui. Le peuple n’est plus
loin de regretter Akébo le Grand. Les mukaribs du Nord se sont montrés trop
intransigeants pour être aimés. La dissension règne dans les clans. Les
seigneurs de Kamna et Kharibat se sont déjà combattus une fois. Elle considéra
leur stupeur avec plaisir.
    — Comment
as-tu appris cela ? grommela Himyam.
    — Kirisha
a à Kamna des sœurs qui lui manquent. Elles aussi endurent la séparation avec
tristesse. Elles saisissent l’occasion de lui donner des nouvelles dès qu’il se
peut. Vous ignorez trop la parole des femmes. Peut-être as-tu

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