Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
Vom Netzwerk:
qui les
isolait dans cette mer de nuit les assoupissaient par instants.
    Les
serviteurs disposaient maintenant les gâteaux de miel et d’amandes, les
marmelades de fruits rouges aux épices piquantes. Les galettes de dattes au fromage
étaient encore tièdes.
    Himyam
n’avait guère mangé tandis que Myangabo avait avalé de tout, faisant ainsi
honneur à sa réputation.
    De temps à
autre, il observait le visage de son frère. Il connaissait le caractère d’Akébo
comme un pêcheur connaît les fonds invisibles d’une rivière.
    Considérant
les gâteaux de miel sans tendre ses doigts boudinés vers eux, il déclara
soudain :
    — Sois
sans crainte, mon frère. Pharaon aime nos bateaux qui descendent le Nil jusqu’à
lui, chargés de jarres d’encens, de miel et de paniers lourds de cailloux d’or.
    Akébo
parut surpris par le son de sa voix et ne répondit pas. Himyam leva son bâton
au-dessus de leur tête d’une manière un peu théâtrale.
    — Et
il les aimera tant qu’il ne pourra venir les chercher lui-même ici.
    — Venir
les chercher ici ? Que veux-tu dire ? s’étonna Akébo.
    Myangabo
répondit à la place du sage :
    — Pharaon
n’aime le commerce que lorsqu’il ne lui coûte pas trop. Himyam a raison, mon
frère. L’avidité de Pharaon est un chameau qui ne sait pas trouver son maître
et n’écoute que les caprices de sa bosse.
    — Explique-toi.
    — Pharaon
supporte notre commerce mais n’aime guère le payer à son juste prix. Avant que
notre caravane quitte Thèbes, les conseillers m’ont appris que la prochaine
caravane devra acquitter un droit supplémentaire.
    — Un
droit ?
    — L’eau
du Nil est l’eau de Pharaon. Sur dix barcasses, une ira à Pharaon sans qu’il
ait à en payer le contenu. Sinon, la caravane ne dépassera pas Méroé.
    Akébo
était trop stupéfait pour gronder.
    — C’est
du vol !
    — C’est
la loi du plus fort, répliqua doucement Himyam. La loi de Pharaon.
    — En
ce cas, pourquoi ces cadeaux que tu as rapportés ? Ils valent bien une ou
deux barcasses de nos encens.
    Myangabo
approuva. Il avait retrouvé toute sa vivacité. Son regard brillant passa
d’Himyam à Akébo.
    — Mon
frère, le commerce, quand on le fait avec Pharaon, est aussi plein de surprises
qu’une guerre. Ces cadeaux sont le langage de Pharaon. Avec ses lions d’or et
son lit d’ébène, il te dit : Deviens mon vassal et je serai bon pour toi.
    — Moi ?
Moi, son vassal ? Le commerce ne lui suffit pas ?
    — Le
royaume de Saba possède des biens dont Pharaon a besoin. Il n’aime pas dépendre
d’un autre pour ce qui lui est précieux. Le commerce se fait un jour, se défait
le lendemain. Si tu es son allié fidèle et le reconnais comme Puissant des
Puissants, le commerce sera pour lui plus sûr.
    Ce
qu’Akébo avait pressenti en contemplant un peu plus tôt les présents venus
d’Egypte devenait réalité par la bouche de son frère. Pour adoucir ses mots, en
bon diplomate qu’il était, Myangabo ajouta :
    — Pharaon
ne s’offusque pas de notre peau noire. Il en a l’habitude. Ses plus vaillants
guerriers viennent de l’ancien pays de Kouch. Homme blanc, homme noir, cela n’a
pas d’importance pour lui.
    Akébo
balaya la remarque de la main.
    — Dois-je
comprendre qu’il me faut accepter ? Et pourquoi me soumettrais-je ?
Je ne plie la nuque que devant Almaqah. Si Pharaon ne veut pas notre commerce
sur le Nil, nous retournerons sur la mer Pourpre. J’ai fait construire un port
pour cela. Nous savons qu’il existe des peuples du Nord aussi avides d’or et
d’encens que Pharaon.
    Devant la
dureté du ton d’Akébo, Myangabo hésita à répondre. Himyam s’en chargea :
    — Si
tu ne deviens pas le vassal de Pharaon, il te fera la guerre.
    — Ah !
nous sommes loin de son bras !
    — Il
a besoin de nos richesses. Son bras sera assez long pour trouver nos têtes.
    Il y eut
un court silence. La pluie s’apaisait. Les hululements sourds des chevêches
résonnaient autour du palais. En tendant l’oreille on percevait les jappements
des charognards nocturnes dans les collines.
    Avec la
griffe de ses doigts de guerre, Akébo saisit un gâteau de dattes fourré de
fromage. Il mâcha sans laisser paraître d’émotion, se gratta la barbe et dit
enfin en soupirant :
    — Qui
a envie de la guerre ? Pas moi. Je deviens trop vieux pour en désirer la
folie. Ma fille me le reproche assez.
    — Quel
regret éprouveras-tu ?

Weitere Kostenlose Bücher