La reine de Saba
sagesse
dit :
Il n’y
a qu’un souffle pour l’homme, mais la beauté est
la respiration éternelle.
Celui
qui la voit et l’emporte dans son cœur connaît
la paix du temps.
Puissante
reine, tu l’écris : le commerce entre nous peut fleurir par l’abondance de
nos désirs.
Il
n’est pas de cadeau que je puisse t’envoyer pour répondre avec dignité à tes
présents. Je m’incline devant toi, humblement, et t’offre en retour de venir à
Jérusalem, en mon royaume, béni soit-il par l’Eternel notre Dieu. Ici, tu
pourras désigner, prendre et jouir de tout ce qu’il te plaira.
On dit
que moi, Salomon, fils de David, fils de Jessé, je suis ici le maître des
hommes et des oiseaux, des fleurs et des sources, du juste et de l’injuste. En
ta présence, je n’y serai que ton serviteur. La gloire de mes jours sera
d’accomplir ta paix et ton bonheur.
Les
vents ne sont pas à la navigation vers le sud. J’envoie vers toi, à l’est et à
l’ouest, des messagers certains de t’atteindre.
Puissante
reine, Makéda fille d’Akébo, Salomon, roi de Juda et Israël, guette ta venue
aux portes de Jérusalem.
Que
Yahvé, le Tout-Puissant, te bénisse pour mille ans.
Elle
aurait pu lire la lettre de Salomon sans l’aide d’Elihoreph. Elle connaissait à
présent assez d’hébreu pour la retenir par cœur. Mais si elle prenait le
rouleau dans ses mains, ses doigts trembleraient.
Elle ne
savait que penser de la fougue qu’elle y devinait.
Était-ce
là la lettre d’un roi qui veut faire du commerce ? ou celle d’un puissant
seigneur, plein de fougue et empli d’une assurance juvénile sur son pouvoir de
plaire ?
Pourtant
n’était-ce pas aussi le ton qu’elle avait espéré ?
N’était-ce
pas ainsi qu’elle avait deviné follement une présence dans la nuit, le soir de
son retour à Maryab ?
Et
maintenant, avec ces mots d’encre sur le papyrus, il lui semblait pouvoir
imaginer la silhouette de Salomon bien qu’elle ne l’ait jamais vu ni n’ait
demandé à Zacharias de le décrire.
Folle qui
n’a plus la tête sur le corps, qui rêve et imagine ! Qui fait danser
l’illusion dans un battement de paupières et les coups trop violents du
cœur !
À nouveau,
elle voulait se moquer d’elle-même.
Cependant
les mots de Salomon tournaient et creusaient leur sillon dans son esprit. Y
semaient un trouble qui ne trouvait pas d’apaisement.
Pour s’en
protéger, elle pensait : « Tamrin et Zacharias sont des idiots. Ils
n’ont su lui parler que de mon apparence et pas de ce que je pense ! Pas
un mot dans sa lettre sur ma sagesse. Ou est-ce son orgueil qui l’étouffé et
l’empêche de songer ainsi à une femme, lui qui accumule les épouses et les
concubines dans sa couche ? Oui, vraiment, que lui importe la cervelle
d’une femme ! Et toi, que t’importe d’être séduite ? »
Elle se
disait : Il n’y aura pas de réponse pour Salomon. Elle était Makéda et non
une fleur, une source ou un oiseau, et même un jardin tout entier dont il était
maître dans son palais de Jérusalem !
Elle se
disait : Oublie et occupe-toi de ton royaume. Elle allait du haut en bas
de son palais, sur les terrasses et les chemins de ronde voir si la pluie ne
voulait pas cesser et, quand elle cessait, trouvait le soleil pâle et bien trop
froid. Elle houspillait les servantes sans raison.
Elle se
divertit à consoler Élihoreph qui n’avait retenu, de la lettre de Salomon, que
l’absence du nom de son fils.
— Il
est arrivé quelque chose à mon A’hia, gémissait-il.
— Et
comment Salomon aurait-il compris ce que lui disait Tamrin, si ton fils n’était
pas sa bouche ? se moquait Makéda.
Elle se
divertit en faisant passer un message au seigneur Yahyyr’an pour lui signifier
qu’elle était souffrante et ne pouvait, contre son cœur, le recevoir, lui qui
demandait, pour la centième fois peut-être, à la saluer.
Elle en
rit un peu avec Tan’Amar. Mais elle évitait aussi de s’asseoir à côté de lui.
Elle ne pouvait ouvrir ses pensées et son cœur à personne.
Elle cessa
de se divertir, s’aperçut à peine que la saison des pluies cédait devant le
soleil. À nouveau, les verts de la plaine des parfums, devant Maryab,
resplendissaient.
Si bien
que ce fut Tan’Amar qui remarqua :
— Les
messagers de Salomon s’impatientent. On leur a demandé de rentrer avec une
réponse. Au moins un oui ou un non.
Avec une
froideur qui mentait mal, elle
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