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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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dieu qu’Allah. »
     
    Tannhauser s’éveilla au point du jour, à la poésie de l’appel du muezzin. Depuis dix-sept jours, l’ adhan avait dérivé des hauteurs du Corradino jusqu’aux fenêtres de l’auberge. Après tant d’années parmi les Francs, cette musique le hantait – selon ses rêves – d’effroi respectueux, de crainte, de fierté, d’empressement au combat ; d’une obscure angoisse dont il ne pouvait pas définir la nature. Il importait peu que les mots soient indistincts. L’ Al-Fatihah était gravée dans ce qui passait pour son âme, et ne s’effacerait jamais.
     
    « Guide-nous vers le droit chemin,
    Celui de ceux à qui tu as accordé ta grâce,
    Pas le chemin de ceux qui endurent ta colère,
    Ni de ceux qui errent, égarés. »
     
    Il y avait un vide dans son cœur, aussi vaste que l’univers autour de lui, et, dedans, il ne trouvait ni grâce, ni chemin qui parût droit, et a fortiori aucun guide. Et même en suivant ses propres lumières, il avait erré aussi égaré qu’un homme peut l’être sans se retrouver au gibet. Le bras d’Amparo glissa sur sa poitrine et ses doigts, mus par quelque tendre rêve, caressèrent son cou, et elle émit un petit soupir. Tannhauser respirait sa senteur et avec elle l’espoir inhérent à cette nouvelle et éclatante journée.
    Une pâle lueur citronnée perçait les profondes fenêtres sans carreaux, et éveillait la lueur de sa peau là où elle se lovait contre lui. Le drap rejeté était entortillé sur ses cuisses. Sa tête reposait dans le creux de son épaule, ses cheveux étalaient leur noir sur sa joue, ses lèvres enténébrées étaient entrouvertes et de la couleur d’un grenat précieux. Ses flancs révélaient les lignes de ses côtes tandis qu’elle respirait et il déplaça sa tête d’un pouce ou deux pour étudier les courbes de ses fesses. Elle lui apparaissait comme une véritable beauté, malgré son visage imparfait et son étrange esprit. Ses parties étaient engorgées et cela s’aggrava tandis qu’il laissait sa paume glisser sur les muscles du dos d’Amparo. Du bout des doigts, il palpa les renflements de ses vertèbres, un par un, jusqu’à ce que la dureté de l’os disparaisse dans le nid, entre les courbes qu’il appréciait tant. Un homme pourrait s’abandonner pour toujours à une telle abondance sensuelle, si le monde avait pu le permettre. Mais entre tous les mondes, celui-ci ne le pouvait pas, car son cœur était de pierre. Il envisagea de la réveiller tout doucement, de baisers et de ruses habiles, car il savait désormais que son corps était aussi avide de ses mains que ses mains l’étaient d’elle. Ensuite il s’engouffrerait de sa grosseur et glisserait en elle et la pilonnerait sur le matelas, pratique pour laquelle, il le savait aussi aujourd’hui, elle avait un appétit admirablement grand.
    Son désir penchait vers l’irrépressible, et il changea d’appui pour dégager ses couilles d’un geste de la main. À cet instant Amparo murmura dans son sommeil et se retourna sur le dos. Ses seins descendirent légèrement de chaque côté de sa poitrine, leur peau à peine marbrée de bleu là où ils pendaient le plus, et il regarda ses tétons privés de la chaleur de son corps qui s’assombrissaient à la fraîcheur de l’air. Plus aucun vide ne le troublait désormais. La douleur turbulente qui l’emplissait auparavant, les pensées d’elle qui occupaient de plus en plus son esprit, l’abandon dévorant qui meublait autant de ses journées qu’il pouvait en préserver, tout cela aurait été condamné comme péché et abhorré par les croyants des deux camps entre lesquels il était échoué. Pourtant, alors qu’il admettrait volontiers des vices et crimes sans nombre, il ne parvenait pas à trouver de mal dans les transports qu’Amparo lui procurait. À un demi-mille de là où ils étaient enlacés dans leur demi-sommeil, des milliers d’autres corps étaient enlacés, les uns sur les autres, dans une fosse commune puante, livrés en pâture aux mouettes et aux corbeaux. Les cadavres qui l’emplissaient, et ceux dont les mains avaient rendu cette horreur possible, étaient tous destinés aux champs du paradis, absous de tout péché ; mais la culpabilité des fornicateurs ensommeillant la lueur de l’aube ne faisait aucun doute.
    Il écarta délicatement les cheveux d’Amparo pour découvrir son visage et le regarder, et ses traits étaient si

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