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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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ils ne sont que des hommes. Ils se fatigueront d’être gaspillés. Ils se lasseront de la mauvaise nourriture, de l’eau sale et de la chaleur brutale. Sapez leur foi envers Allah, goutte à goutte. Minez la fierté de Mustapha. » Il regarda La Valette. « Mais si vous voulez briser le cœur turc – et je ne connais personne qui l’ait fait –, vous devez endurcir le vôtre au-delà de toute mesure. »
    La Valette dit : « Vous ne vous offenserez pas si je vous dis que vous pensez comme un Turc.
    – Au contraire, répliqua Tannhauser. Ils vous considèrent comme de pauvres barbares. »
    À la surprise générale, La Valette éclata de rire, comme s’il n’avait jamais rien entendu d’aussi flatteur. C’est cet instant que choisit Nicodemus pour s’effondrer, tête la première, tout droit, juste devant le crucifix accroché au mur qu’il regardait depuis un bon moment.
    Tannhauser se précipita, s’agenouilla près de lui et le retourna sur le dos. Il était connu que les pierres d’immortalité pouvaient s’avérer aussi bonnes que leur nom l’indiquait ; certains ne s’éveillaient jamais du rêve d’infini. Mais la respiration de Nicodemus était régulière et ses lèvres arboraient un sourire. Tannhauser décida d’être moins généreux en opium quand il referait une série de ces pierres. Les chevaliers qui s’étaient rassemblés autour d’eux, et qui ignoraient l’intoxication du jeune homme, virent dans son évanouissement un signe d’extase religieuse. Tannhauser ne les détrompa pas. Avec l’aide de Le Mas, il souleva le jeune Macédonien et le porta sur son épaule.
    « Nous reparlerons », dit La Valette.
    Tannhauser titubait un peu en partant, car le jeune homme était loin d’être nain, mais il le porta jusqu’à l’auberge. Le lendemain, quelques gifles le réveillèrent, et, toujours en extase, Nicodemus fut baptisé à San Lorenzo et la tache de l’islam effacée de son âme pour toujours.
     
    TOUJOURS ASSIS DANS son tonneau d’eau de mer, Tannhauser sentait maintenant l’odeur du feu de bois et du café qui passait par la porte ouverte. Dans le bazar, il avait acquis une aiguière de cuivre et un service à café, de délicates tasses venues d’Izmit – en turquoises serties d’or –, et deux sacs de grains torréfiés. Il avait trouvé en Nicodemus quelqu’un sachant le préparer de la bonne manière. Le Macédonien, qui traitait Tannhauser avec la vénération qu’on accorde à un mage, était désormais résident à l’auberge d’Angleterre, et comme – au grand désappointement de Tannhauser – aucune des deux femmes ne montrait un quelconque intérêt pour l’art culinaire, il s’honorait de préparer le petit déjeuner de Tannhauser.
    Tannhauser escalada le tonneau d’eau salée, complètement rafraîchi, et laissa l’air sécher sa peau avant de s’habiller. Tout en mangeant des rognons d’agneau, du fromage de chèvre et du pain frit, il réfléchissait à l’énigme du fils de la comtesse. Ils étaient sur l’île depuis presque trois semaines et si le garçon était là, ils ne l’avaient pas trouvé. Ils ignoraient toujours son nom. Les registres baptismaux des églises du Borgo n’avaient rien donné, et ce malgré le fait que les prêtres de douze des églises de l’extérieur avaient emporté les registres avec eux quand ils avaient fui les Turcs. Pendant ses sorties dans l’île, Tannhauser avait fait des recherches dans sept autres églises et chapelles, dont Malte abondait. Il avait trouvé cinq autres registres enterrés sous les pierres des autels, mais eux non plus n’avaient rien donné.
    Son plan pour retrouver le garçon par cette méthode – qui avait semblé si inspiré alors qu’il était ivre de musique, de roses et de seins devinés – s’était avéré tout aussi ridicule que l’entreprise dans son entièreté. Le désir ardent d’impressionner une femme avait mené d’innombrables hommes de bon sens vers des désastres qu’ils auraient pu éviter. Il était assez peu réconfortant de penser qu’il était le dernier d’une rangée d’imbéciles qui remontait jusqu’au paradis perdu.
    Il y avait des centaines de garçons dans la ville. Ce n’était pas chose facile d’identifier parmi eux un bâtard né douze ans auparavant la veille de la Toussaint. Il lui venait maintenant à l’esprit qu’un tel garçon pouvait très bien ignorer jusqu’à sa propre date

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