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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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arrivez plus tôt que prévu. »
    Le visage de Tannhauser était de pierre. Un pistolet à long canon était passé dans sa ceinture, ainsi qu’une dague avec de l’orfèvrerie turque sur la garde et l’étui.
    Ludovico dit : « Amparo doit placer grande foi en vous pour raconter si rapidement sa fable. »
    Anacleto apparut derrière Tannhauser, la main sur le pommeau de son épée.
    Sans se retourner, Tannhauser dit : « Si ton garçon tient au seul œil qui lui reste, il ferait mieux de se faire rare… »
    Ludovico fit un mouvement de tête et Anacleto disparut.
    Tannhauser fouilla dans sa brigantine et en sortit un paquet enrobé de papier paraffiné. Il le lança et il rebondit sur le bureau. « Un quart d’opium, avec mes compliments, dit-il. Un prix plus que décent pour avoir maltraité une fille.
    – Vous avez toute ma gratitude.
    – Si jamais tu parles encore une seule fois à l’une ou l’autre de ces deux femmes, si tu les croises dans la rue, si tu les espionnes de loin, si l’une d’elles se réveille d’un cauchemar en murmurant ton nom, alors je te ferai vraiment regretter le jour où tu as quitté Rome.
    – Avec un peu plus de chance, j’espère, que lors de votre dernière tentative. »
    Tannhauser se pencha sur le bureau. Ludovico sentit ses tripes se serrer.
    « C’était à peine un meurtre. La prochaine fois, tu me regarderas pendant que je me baignerai dans ton sang. »
    Tannhauser le fixa pendant un moment qui parut plus long que la bataille de la matinée.
    Ludovico soutint son regard sans ciller.
    Tannhauser se redressa, fit demi-tour et s’avança vers la porte.
    « Capitaine », dit Ludovico.
    Tannhauser s’arrêta et se retourna.
    « Je préférerais ne pas être votre ennemi. »
    Tannhauser émit un bref éclat de rire.
    « Carla n’est qu’une femme parmi tant d’autres, dit Ludovico. Du moins pour vous. Si c’est un titre que vous cherchez, je peux vous faire arriver à un rang de noblesse qui la ferait passer pour une poissonnière. Beaucoup de ducs ont commencé en tant que soldats, et le Saint-Père est généreux avec ceux qui lui font plaisir. Serrons-nous la main, homme, et je vous promets que vous prospérerez.
    – Devenir un de tes familiers ? dit Tannhauser. Je préférerais avaler un de tes étrons.
    – Vous seriez en auguste compagnie, croyez-moi.
    – Ils doivent avoir des palais plus sensibles que le mien.
    – Vous doutez de ma sincérité ? dit Ludovico.
    – Non, je pisse dessus. » Tannhauser pointa son index droit vers son visage. Le geste était plus offensant que ses mots. « Mais suis bien mon conseil, et ne sois pas assez vain pour douter de moi. »
    Puis Tannhauser tourna les talons et sortit, sans fermer la porte.
    Ludovico ramassa l’opium. Pas un mécréant ordinaire, finalement. L’homme avait ses propres intrigues cachées dans ses manches. Ludovico le sentait, comme un marin voit venir la tempête. Anacleto entra. Son œil tomba sur le paquet qu’il tenait à la main. Ludovico le lui tendit.
    « Va me chercher le Grec, dit-il. Amène-le-moi ici quand les Français seront partis. » Anacleto le regarda ; Ludovico hocha la tête. « Nicodemus. »

JEUDI 23 AOÛT 1565
    Le conseil sacré – Le château Saint-Ange
    OLIVER STARKEY parcourut des yeux la grande table du conseil et, à la lumière tremblotante des chandelles, il vit une compagnie de vieux nobles en robes noires, tous mutilés par la bataille et résignés à la mort. Des cicatrices toutes fraîches défiguraient certains visages. À d’autres, il manquait des doigts ; trois d’entre eux n’avaient plus qu’un bras ou une main. Le désespoir n’entrait pas dans leur tempérament, malgré leur lugubre situation, mais personne parmi les piliers, baillis et chevaliers grands-croix du conseil sacré ne s’attendait à une victoire de la Sainte Religion. Même La Valette, à la droite de qui Starkey était assis, semblait partager leur morosité. L’impression que ceci serait la dernière assemblée suprême de l’histoire de l’ordre était palpable, et, avec elle, une mélancolie poignante planait dans la pièce comme une mélopée inaudible. Le monde ne connaîtrait plus jamais des hommes tels que ceux-là, se disait Starkey, car le monde qui les avait forgés avait disparu. Ils étaient les derniers des vrais.
    Ce même jour, le Grand Turc avait lancé un autre assaut général. Aucun des présents ne

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