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La Religion

La Religion

Titel: La Religion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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profanation musulmane. Dispersés sur les murailles comme une bande de corbeaux, nous serons détruits, que ce soit peu à peu ou d’un seul coup. Mais si nous regroupons tous nos combattants dans Saint-Ange et que nous faisons sauter le pont qui le relie au Borgo, un millier d’entre nous rassemblés ici pourraient résister aux Turcs pendant tout l’hiver. Quelqu’un me contredira-t-il ? »
    Personne ne le fit.
    L’amiral Del Monte échangea un regard avec Ludovico, qui était assis à côté de lui, mais ils ne dirent mot. Starkey regardait La Valette. La Valette n’avait pas cillé.
    Claramont continua : « Une juste raison militaire exige par conséquent une seule conclusion. » Il hésita. « Nous devons abandonner le Borgo. Et Saint-Michel et L’Isola également. En cela, je peux parler au nom du conseil sacré, car nous sommes tous d’accord. »
    Claramont se rassit. Un long silence suivit, notable par l’absence de dissension entre tous les membres de la suprême assemblée et par l’intensité avec laquelle tous observaient leur grand maître et attendaient sa décision. Ils savaient qu’en abandonnant les fortifications extérieures ils abandonneraient la population survivante – douze mille Maltais au moins, pour la plupart femmes et enfants, tous virtuellement sans recours – à un funeste destin. La Valette se leva enfin, une main posée sur la table pour soulager ses blessures.
    « Mes honorables et bien-aimés frères, dit-il, j’ai écouté votre avis avec le plus grand soin, et le plus profond respect, mais je le rejette. »
    Les membres du conseil se raidirent sur leurs fauteuils. Certains se penchèrent en avant.
    « Les raisons militaires pour abandonner la ville sont puissantes, et vous les exprimez bien. Peut-être, comme vous le suggérez, est-ce incontournable. Mais nous ne sommes pas ici seulement pour des raisons militaires. »
    Une tête acquiesça, discrètement. Starkey remarqua que c’était Ludovico.
    La Valette poursuivit. « Dieu a voulu que nous fassions face à cet instant pour une bonne raison. Notre foi rencontre aujourd’hui sa plus terrible épreuve, et nous devons nous demander : quel est le sens de notre Sainte Religion ? »
    Il parcourut la tablée des yeux.
    « Quelle est sa justification ? Son essence ? Quelle est sa raison d’être ? »
    Personne ne répondit, car ils savaient qu’il allait le faire.
    « Nous ne sommes pas seulement des soldats, aussi noble que soit pourtant cette appellation. Nous sommes les chevaliers de l’hôpital de Saint-Jean-Baptiste de Jérusalem. Nous sommes les hospitaliers. Notre but originel était de défendre les pèlerins en route vers Jérusalem. Tuitio fidei et obsequium pauperum . C’est la première et la dernière règle de notre ordre : “Protéger la foi et servir le pauvre.” Nous défendons véritablement la foi non par des faits d’armes, mais en servant les pauvres. Et en retour, servir les pauvres renforce et protège notre foi. Vous vous rappelez tous que dans notre profession de chevaliers nous avons fait une promesse solennelle : être les serviteurs, les esclaves, des pauvres de Jésus-Christ. Des bénis, de nos seigneurs les malades. N’appartiennent-ils pas à Notre-Seigneur Jésus-Christ ? Et ne doit-on pas les traiter et les protéger comme nous traiterions et protégerions Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même ? »
    Il s’exprimait avec une passion intense mais tranquille.
    Starkey aperçut, chez les vieux chevaliers, des larmes qui coulaient sur leurs barbes.
    « Nous sommes des lions encerclés dans leurs tanières, dit La Valette. Et dans cette situation, est-ce le moment d’abandonner nos seigneurs les malades ? De laisser nos innombrables blessés à la merci de l’ennemi turc ? De condamner nos braves frères d’armes maltais, et leurs femmes et leurs enfants aussi, aux chaînes des galères turques ? Devons-nous abandonner notre très sainte Infirmerie en ces heures de si grand péril ? »
    Ses yeux firent le tour de la table. Beaucoup avaient trop honte pour croiser son regard.
    « Cette forteresse ne pourrait pas s’accommoder de plus de mille hommes, vous avez raison. Mais hors de ses murs, il en est des milliers d’autres. Il se peut que la volonté divine soit que notre Sainte Religion finisse enterrée dans ces ruines, et que notre ordre ne soit plus. Cela, en soi, n’est pas quelque chose dont il faut avoir peur, car Dieu,

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