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La Revanche de Blanche

La Revanche de Blanche

Titel: La Revanche de Blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emmanuelle Boysson (de)
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l’annoncer.
    — Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous fâcher, s’afflige Louise.
    — Vous pensez peut-être que cet enfant vous attachera au roi, poursuit Athénaïs. Êtes-vous assez sotte pour ne pas voir qu’il vous traite comme un rebut ? N’avez-vous pas été éclairée, hier soir, quand il a traversé votre chambre avec Malice, son épagneul, et qu’il vous l’a jeté dans les bras en déclarant : « Tenez, Madame, voilà votre compagnie, cela vous suffira. »
    — Je vous plains : vous n’avez pas de cœur.
    — J’en ai plus qu’il ne m’en faut, la mouche la marquise. Sous vos airs de dévote, vous n’êtes qu’une égoïste. Vous n’avez même pas voulu me prêter le fard mystérieux avec lequel vous vous enduisez. J’en parlerai à Louis dès ce soir.
    Blanche attend qu’Athénaïs s’éloigne pour embrasser Louise. Elle lui fait si pitié :
    — Bonsoir, Louise. Vous êtes bien pâle. Seriez-vous malade ?
    — Je souffre, ma chère. Louis me fuit. C’est une terrible épreuve que j’offre à Dieu.
    Longue perruque noire, pourpoint d’argent, le roi apparaît. Il salue d’un coup de chapeau les jeunes femmes, se débotte, s’adresse à Blanche :
    — Quel plaisir de vous savoir parmi nous ! Vos rires nous ont manqué et votre belle humeur qui nous fait oublier les désagréments qu’on nous inflige. Il nous serait agréable que vous suiviez la chasse de demain.
    — Que refuser à Votre Majesté ? sourit Blanche.
    — Nous vous attendons, insiste le roi avant de filer chez la Montespan.
    Agenouillée sur un prie-Dieu, Louise récite son chapelet. Flattée par l’invitation du roi, Blanche supplie le Seigneur de rester fidèle à Charles. Sous ses draps, elle déchire les lettres qu’elle lui a écrites. Il finira par s’inquiéter du silence qu’elle s’impose. À dix-huit ans, elle se sent plus mûre, plus confiante, plus patiente aussi.
     
    Au matin, Athénaïs boucle ses bagages. Elle part accoucher à Paris dans une petite maison qu’elle a louée, rue de L’Échelle. Son énorme ventre recouvert d’une superposition de volants, selon la mode de l’« innocente », la robe bouffante qu’elle a lancée, elle se hisse avec difficulté dans le carrosse, se tourne vers Blanche :
    — Aglaé et la bande de greluches vont profiter de mon absence pour séduire Louis. Surveille-les !
    Dès que la voiture s’ébranle, le roi ordonne à ses gens de préparer les chevaux de chasse. En tête de la cavalcade, Blanche galope à ses côtés. Louis tire le premier : il ne rate jamais sa cible. Dix sangliers, vingt perdrix, six biches. Un massacre. Près d’une ferme cossue, des paysans font griller des cuisses de sanglier. Aimable, un rien distant, Louis annonce à ses gens qu’il va se reposer – les fermiers sont priés de lui laisser leur chambre. Il fait signe à Blanche de le suivre. Elle ne sait comment se dérober. Louis la conduit vers une pièce dotée d’un galetas et de vieux coffres. Une image de saint Antoine surplombe la cheminée. Le roi la décroche, la pose sur le sol. Il ôte ses bottes, se rince les mains dans une bassine, s’assied sur le bord du lit. Près de la porte, Blanche n’ose bouger.
    — Approchez ma douce, la prie Louis. Votre prénom vous sied à merveille. Votre jeunesse et votre innocence ne pouvaient trouver là meilleur écho. Vous ignorez sans doute combien vous m’avez fait souffrir.
    Blanche n’arrive pas à le croire : serait-il comédien, lui aussi ? La taille élancée, des yeux bleu nuit, il se dégage de lui un mélange de délicatesse et d’autorité qui intimide.
    — Vous pouvez vous vanter d’avoir été cruelle avec le plus grand roi de la terre, poursuit Louis. J’étais à la torture d’attendre ce moment ; je ne pouvais vous parler, ma vie étant soumise à quantité de fâcheux. Quand je vous vis pour la première fois, vous n’étiez qu’une enfant. Voulez-vous que je vous dise ? Je m’étonnais moi-même de l’état où vous me mettiez. On me disait : ne la trouvez-vous pas cocasse, cette petite Bretonne crottée ? Je ne répondais point. Vous aviez ce visage adorable qui l’est encore, ce teint clair et frais, cette abondante chevelure sans apprêt et ces yeux d’un vert si tendre qu’il fait penser aux jeunes pousses qui naissent au printemps. Ah, ma mie, abrégez mes souffrances, je vous en conjure ! Ne craignez rien, je suis un homme presque comme les autres.
    D’un

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