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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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bannière du Philosophe inconnu.
Après tout, la fondation de la ville remontait à une antiquité immémoriale. À
une époque où le dieu des chrétiens n’avait pas encore placé toutes les populations
de Gaule sous sa loi. À une époque où les druides allaient encore cueillir le
gui sacré avant de sacrifier leurs prisonniers sur de sanglants autels.
    « Je délire ! se
dit-il. C’est cette femme avec ses prédictions incohérentes et ses tours de
passe-passe. Ce sont de simples agitateurs qui se sont réfugiés dans les
catacombes ou dans les caves de quelque couvent abandonné ! »
    Pourtant, il avait peur. De
plus en plus peur.
    Leur longue descente prit fin
brutalement. Il sentit qu’on l’effleurait. Le poignard n’appuyait plus dans son
dos. Devant lui, trois coups retentirent à un rythme bien précis. Sans doute un
signe de reconnaissance. Il s’efforça de s’en souvenir : deux coups brefs,
un coup long.
    Une porte s’entrebâilla dans un
grincement.
    — Venez.
    Cette fois-ci, l’homme le
poussa délicatement. Ils avancèrent, et l’atmosphère changea du tout au tout.
Plus d’humidité, plus de remugles de caves. Ils étaient dans un endroit
chauffé. Il y régnait un parfum entêtant. « De l’encens », reconnut-il.
    — Restez ici. N’enlevez pas vos
bandeaux car c’est la mort qui vous attendrait alors à coup sûr.
    Le silence régna sur-le-champ
dans la pièce.
    — Où sommes-nous ?
demanda-t-il sur un ton plus inquiet qu’il ne l’aurait voulu.
    — Dans le pronaos, lui répondit
Marie-Adélaïde.
    — C’est-à-dire ?
    — Dans le vestibule du temple,
si tu préfères.
    Il se tut un instant. Elle
était tout à côté de lui, aveuglée, elle aussi. Il parla le plus doucement
qu’il put :
    — Penses-tu qu’il était
sérieux ?
    — Que veux-tu dire ?
    — Lorsqu’il nous a menacés de
mort si nous retirions nos bandeaux.
    — Certainement. Ils n’auraient
alors pas le choix. Sans doute plusieurs frères nous surveillent-ils en ce
moment même, les armes à la main. Tu représentes les Comités, et si l’ennemi
qui les poursuit est encore plus terrible que Vadier et Robespierre réunis,
vous êtes néanmoins redoutables. Si tu les reconnaissais, ils n’auraient pas le
choix. Maintenant, tais-toi et écoute, la cérémonie est commencée.
    Effectivement, il perçut un
vague murmure. Une voix étouffée, comme provenant d’une très grande distance.
Elle s’exprimait sur un rythme monocorde presque hypnotique :
    « Architecte suprême de
tous les mondes ! Père de toute chose, toi dont la volonté s’accomplit par
ses propres puissances ! Toi qui veux être éternellement et qui es !
Toi qui as constitué les êtres par la parole ! Reçois donc, Éternel
Architecte, le pur sacrifice verbal des âmes et des cœurs ! Qu’il monte
vers toi avec cet encens, ô Inexprimable, Ineffable que seul le silence peut
définir ! Ne permets point que nous nous égarions, donne-nous la force,
illumine de ta gnose les hommes encore dans les ténèbres de l’ignorance. Tes propres
enfants ! Puissions-nous donc, maçons des temples de Memphis, marcher vers
toi, dans la lumière, puisque l’homme qui t’appartient peut partager ta
sainteté et ta lumière, ainsi que tu lui en as donné le pouvoir… »
    Ce galimatias se prolongea
encore longtemps.
    — Que font-ils ? murmura
le secrétaire rédacteur.
    — Chut, ils ouvrent les
travaux. Je pense qu’ils vont nous auditionner.
    — Y en a-t-il encore pour
longtemps ?
    — Je ne crois pas.
Écoute !
    La voix continua, plus
forte :
    — À la gloire du Grand Architecte
de l’Univers, au nom du souverain sanctuaire des Gaules, des Sublimes ordres
universels d’Égypte, en vertu des pouvoirs qui m’ont été conférés, je déclare
ouverts les travaux de cette vénérable loge. Unissons-nous par le signe et
célébrons cet heureux moment par la batterie suivie de l’acclamation.
    À ce moment retentirent les
mêmes trois coups qui avaient été frappés à la porte mais infiniment plus
puissants, comme si une foule nombreuse les scandait. Puis il sursauta en
entendant la triple acclamation sortie de dizaines de bouches :
    — ALLELUIA !
ALLELUIA ! ALLELUIA !
    Il n’eut pas le temps
d’interroger sa compagne que la voix se fit de nouveau entendre :
    — Mes frères, nous ne sommes
plus dans le monde profane. Que nos travaux qui reprennent force et vigueur
demeurent conformes à l’Harmonie universelle

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