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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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savais que j’allais
mourir, pourquoi es-tu venue me voir ?
    Elle se détacha de son
compagnon et lui lança un œil sévère :
    — Et tu crois que je serais
restée comme ça, sans rien faire, sachant que tu étais en danger ? Et puis
j’ai bien fait, non ? Je t’ai vu couvert de sang et…
    — Tu as vu, pour cet homme… et
pour le couteau.
    — Oui, à l’instant, alors que
j’étais derrière la porte, j’ai senti ce couteau dans ta poche.
    Il hocha la tête
machinalement : elle venait en une phrase de lui en apprendre plus sur son
art que depuis qu’il la connaissait. Son jeu de tarots n’était qu’un vulgaire
tour de passe-passe, un support destiné à asseoir sa réputation et en même
temps à donner une explication sinon rationnelle du moins plausible pour les
esprits crédules. La réalité était tout autre : Marie-Adélaïde voyait
l’avenir. Elle avait conscience de ce qui allait arriver avant même que les
événements concernés ne se produisent. Il en conçut un certain vertige :
combien de temps vivrait-elle si Vadier prenait conscience de ce don
unique ? Pour lui, elle n’était qu’une habile mystificatrice introduite
dans cet univers interlope de faux mages, d’ordres secrets, de prophétesses
folles, rien de plus. Alors que maintenant, il le savait, la Sibylle portait
bien son surnom.
    Elle dut deviner ses pensées
car son regard se fit à la fois inquiet et interrogateur.
    — Ne t’inquiète pas,
laissa-t-il tomber sur un ton bourru. Je ne dirai rien. Par contre, je veux te
montrer quelque chose. Peut-être l’as-tu vu dans tes visions. Montons.
    Avec d’infinies précautions,
ils gravirent les marches. Sur le palier, l’homme frappé de plusieurs coups de
couteau baignait toujours dans sa mare de sang. Il avait bougé depuis que
Sénart était descendu et avait tenté de ramper jusqu’à l’intérieur de la pièce
où se trouvait la chose, mais la mort l’avait rattrapé.
    Elle eut une grimace où
l’horreur le disputait au dégoût, puis contourna le cadavre avec d’infinies
précautions.
    — C’est par là, viens !
    Il entra dans la pièce et,
ignorant la monstrueuse silhouette immobile, se dirigea vers la fenêtre. Elle
était fermée et les montants en bois en avaient été fixés grâce à des clous,
mais le bois était tellement vermoulu qu’il n’eut guère de difficulté à
l’arracher du dormant. Ce fut ensuite au tour du volet, fixé de la même
manière.
    La lumière entra dans la pièce.
Une lumière bien timide car la rue des Cornes, étroite et encaissée, ne
recevait directement le soleil qu’en été à midi, mais suffisamment pour qu’ils
ferment leurs yeux habitués à la pénombre.
    Lorsqu’ils les rouvrirent, la
chose était devant eux.
     
    Curieusement, Marie-Adélaïde ne
parut pas effrayée et s’en rapprocha. Touchant les membres pétrifiés, passant
sa main d’une grande finesse sur les chairs à vif et torturées.
    — Comment s’appelait
l’homme ? demanda-t-elle à brûle-pourpoint.
    — Prunelle de Lierre, répondit-il
automatiquement.
    Elle approuva :
    — Voilà qui explique tout.
Prunelle de Lierre n’était pas seulement maire de Grenoble, il était également
naturaliste.
    Dans la lumière, la chose
paraissait beaucoup moins effrayante que précédemment. Les muscles étaient teintés
en rouge, de même que les veines et les artères. Les yeux si effrayants
n’étaient que deux boules de porcelaine peinte. Il avait entendu parler d’une
telle technique. Ce genre d’objet servait aux étudiants en médecine pour
apprendre comment étaient disposés le corps humain et ses organes.
    Cependant, à quoi pouvait donc
servir l’étude de ce genre de monstre ?
    — C’est un orang-outan,
expliqua la jeune femme. Une race de singes que l’on ne trouve que dans les
parties les plus éloignées de l’Asie. Ils ressemblent tellement aux humains que
les tribus qui vivent à l’orée des forêts qu’ils fréquentent les appellent
« hommes des bois ».
    — Tu penses que c’est Prunelle
de Lierre qui aurait préparé cette chose ?
    — Non, je ne crois pas, car un
tel travail demande une technique et  – le mot te paraîtra sans doute
étrange pour un résultat aussi morbide  – un art que peu de praticiens
maîtrisent. Je pense plutôt que…
    Soudain, ils sursautèrent. La
porte venait de s’ouvrir en bas.
     
    Immédiatement, il chercha une
issue : ce ne pouvait être que la garde nationale ou quelques

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