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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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miliciens du
secteur, attirés par le bruit de la bagarre. Il devait s’échapper, très vite.
    — Monsieur Sénart, nous savons
que vous êtes là. Vous n’avez aucune crainte à avoir.
    Le ton doucereux de dom Gerle
l’appelait du rez-de-chaussée. Un instant soulagé, une nouvelle peur
l’étreignit. Qu’arriverait-il s’il trouvait Marie-Adélaïde ? Mais celle-ci
réagit très vite. Elle se précipita à la fenêtre, y jeta un coup d’œil, vérifia
que personne ne l’observait d’en bas, puis l’escalada. Il tenta de la retenir
en vain. Il eut droit à un petit clin d’œil et elle disparut de sa vue. Pas de
choc en contrebas, alors il comprit : elle avait dû se glisser sur la
corniche et s’y agripper. Mais il n’eut pas le temps de s’extasier sur la
souplesse et l’à-propos de sa compagne, déjà l’ancien ecclésiastique entrait
dans la pièce.
    — Monsieur Sénart, je voudrais
vous féliciter au nom de l’ordre que je représente. Vous avez remporté
l’épreuve la plus délicate sur le chemin parsemé d’embûches qui mène jusqu’à
nous.
    — Comment avez-vous su que
c’était moi ?
    Dom Gerle sourit.
    — Il était convenu avec notre
ancien frère Prunelle de Lierre que celui-ci nous ferait un signal si jamais il
triomphait de votre volonté. Mais il ne l’a pas fait.
    Sénart ouvrit de grands
yeux :
    — J’ai tué un de vos
frères ?
    Le chartreux défroqué fit un
geste vague comme si tout cela n’avait pas la moindre importance :
    — Au fur et à mesure que vous
pénétrerez nos mystères, vous comprendrez mieux. Nous devons être
quatre-vingt-dix-neuf, pas un de plus, pas un de moins. Une fois par an, l’un
d’entre nous est désigné par le sort. Il doit alors franchir cette nouvelle
épreuve : triompher du profane qui nous a sollicités pour rejoindre notre
ordre, ou mourir. Prunelle de Lierre avait été choisi. Nous avons eu, par cette
ruse que vous nous pardonnerez, l’occasion de jauger votre détermination et
votre courage.
    — Et le centième membre de
votre loge, le démon : est-ce lui ?
    Il désigna le singe naturalisé.
Dom Gerle rit :
    — Voyons, monsieur Sénart,
pensez-vous vraiment que nous disposerions d’un tel pouvoir armé de cette
pauvre marionnette. Maintenant, vous devez me suivre. Il reste encore une dernière
formalité avant que vous ne soyez définitivement des nôtres.
    — Une formalité ?
    Dom Gerle lui renvoya un
sourire mielleux :
    — Bien sûr, votre initiation.
La venue d’un nouveau frère est toujours l’occasion pour nous d’une cérémonie
un peu particulière. Nous voyagerons en voiture et, par précaution, vous aurez
les yeux bandés. Évidemment, dès demain, ce genre de dispositif n’aura plus
lieu d’être. Voulez-vous bien vous retourner s’il vous plaît ?
     
    Ils avaient longtemps voyagé à
travers les rues de Paris. Gabriel-Jérôme en avait assez de cette mission,
assez de ces mensonges. Il aurait voulu revenir dans un monde normal, régi par
des règles normales et non plus circuler parmi les illuminés et les criminels.
À la réflexion, il se demanda si son propre univers  – le Comité de sûreté
générale  – était bien normal. Qu’est-ce qui était pire ? Assassiner
au couteau, voire en se servant de l’aide de soi-disant démons, ou livrer des
centaines de ci-devant ni totalement innocents ni assurément coupables au bourreau
Sanson et à ses sbires ? Et puis il s’inquiéta pour Marie-Adélaïde avant de
se rassurer bien vite : elle avait du courage, une intelligence
remarquable… et son don. Elle se tirerait d’affaire sans doute plus sûrement
que lui. Si seulement elle avait pu être à ses côtés !
    Pestant contre son sort et pris
d’une vague mélancolie, il se laissa aller au fond de la voiture.
     
    On l’avait fait descendre puis
accompagné à l’intérieur d’un bâtiment. Il y avait eu des marches. Un escalier
tournant sur lui-même, en pierre. Proche de celui qu’il avait emprunté pour se
rendre dans les sous-sols de la Contrescarpe. Enfin, on l’avait fait asseoir.
Puis plus rien.
    Il n’y avait personne dans les
environs. Il était assis sur un bloc de pierre ou sur un banc. L’endroit puait
l’humidité et autre chose. Une sorte de corruption comme…
    Y avait-il des corps en
décomposition, non loin ? Sénart avait déjà senti cette odeur, aux
environs des charniers qui entouraient la ville de Nantes à l’époque des
noyades !
    Il eut un

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