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La Trahison Des Ombres

La Trahison Des Ombres

Titel: La Trahison Des Ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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êtes rendu sur les lieux ?
interrogea Corbett en se tournant vers le bailli.
    — J’ai pris la carriole. J’y ai mis le
corps, l’ai ramené ici et ai dépêché un homme chez le charron.
    — Et le cadavre ? insista-t-il en
tapotant avec douceur l’épaule du malheureux père qui recommençait à pleurer. Y
avait-il trace du tueur ou du garrot dont il s’est servi ?
    Blidscote secoua la tête.
    — Avez-vous vu quelque chose d’insolite
près de la dépouille ?
    Corbett cacha son courroux. Les yeux larmoyants
du bailli lui signifiaient fort clairement qu’il n’avait même pas regardé.
    — Où se trouve cet endroit ? s’enquit-il
d’un ton sec.
    — À Devil’s Oak [7] . C’est un vieil arbre
énorme à Falmer Lane.
    — Mais ce n’est pas le chemin qui mène chez
son père ?
    — En effet.
    — On a donc découvert Elizabeth à un
endroit où elle n’aurait pas dû être. Dans la campagne ?
    — Oui, oui, c’est bien ça.
    — Alors, conclut le magistrat, soit elle
est allée retrouver quelqu’un, soit on l’a emmenée là-bas, avant de la tuer ou
après. Est-ce juste ?
    Blidscote éructa et acquiesça d’un signe de
tête.
    — Et le corps lui-même ? continua
Corbett.
    — La cotte et la chemise de la jouvencelle
étaient retroussées sur son ventre, murmura le bailli. Je pense qu’on l’a tuée
tout près de l’endroit où on a dégagé son cadavre.
    — Et l’autre meurtre ?
    — Près de Brackham Mere.
    — Quel genre de mort ?
    — Tout pareil.
    Le bailli à présent essuyait ses paumes en sueur
sur ses chausses grossières et sales. Il était mal à l’aise, de toute évidence,
assis dans cette crypte froide, devant ce clerc royal avec son implacable liste
de questions. Il avait juste trouvé les cadavres et les avait rapportés, mais
comprenait maintenant qu’il avait commis des erreurs : il aurait dû être
plus minutieux.
    — Qui était la victime ? interrogea
Ranulf.
    — Elle s’appelait Johanna, déclara
Blidscote. Elle avait le même âge qu’Elizabeth. Elles étaient amies. Elle était
allée au marché faire des achats pour sa mère. Des gens l’ont vue et lui ont
parlé, puis elle a disparu jusqu’à ce qu’on la découvre près de Brackham Mere.
    Corbett tapa doucement l’épaule du charron et
lui glissa une autre pièce dans la main.
    — Retournez à l’église, le pressa-t-il.
Allumez un cierge pour vous et pour Elizabeth dans la chapelle de Notre-Dame.
Vous pouvez partir quand vous voulez.
    L’homme s’éloigna en traînant les pieds. Le magistrat
contempla ses mains. Il attendit que l’huis en haut de l’escalier se lût
refermé.
    — Mon père... ces deux jouvencelles
étaient-elles honnêtes ?
    — Oui ; elles appartenaient à de
bonnes familles. Oh, elles se laissaient conter fleurette et aimaient à s’amuser,
mais elles venaient à l’église. La tête pleine de rêves d’amour avec un beau
chevalier. Toujours prêtes à danser et à se divertir, à se chuchoter leurs
secrets l’une à l’autre. Même, ajouta le prêtre en souriant dans sa barbe,
quand elles auraient dû m’écouter !
    Corbett se leva et s’étira.
    — Ces deux dernières victimes, énonça-t-il,
ont été trouvées dans des lieux qu’elles ne fréquentaient point à l’accoutumée.
Je pense qu’elles connaissaient leur agresseur. Mais qu’est-ce qui peut bien
attirer une femme dans un endroit isolé ?
    — L’argent, proposa Ranulf.
    — Insinuez-vous que c’était des catins ?
demanda Burghesh d’un ton rogue.
    — Non, Messire, elles étaient comme vous et
moi : gourmandes, âpres au gain ! C’était de bonnes campagnardes, des
jeunes filles aux joues rouges, précisa Ranulf en effleurant le pommeau de sa
dague. Mais elles étaient pauvres. Vous avez entendu ce qu’a dit le charron.
Pour acquérir un ruban ou un affiquet...
    — Elles auraient été prêtes à vendre leurs
faveurs ! s’indigna Bellen.
    Son pâle visage émacié et ses pommettes s’empourprèrent
de colère.
    — Je ne veux point insulter leur mémoire,
rétorqua Ranulf, mais c’était des paysannes. Les filles comme elles partagent
la chambre de leurs parents et de leurs frères. Elles savent quel plaisir
procure l’acte charnel. Ça ne veut pas dire que ce sont des gueuses. Que Dieu
nous pardonne. Ça veut simplement dire qu’on peut les duper ou les jouer sans
mal.
    — Je n’y crois pas !
    Le vicaire se leva d’un bond.
    — Ah !

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