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La Trahison Des Ombres

La Trahison Des Ombres

Titel: La Trahison Des Ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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Edmund se préparait pour l’enterrement d’Elizabeth, la
fille du charron.
    Le magistrat revint près du lit et écarta les
courtines. Le cadavre de Deverell était caché sous un drap ensanglanté. Corbett
l’ôta avec précaution et tressaillit devant l’affreuse blessure. Le carreau
avait été tiré de très près et la moitié de la tête du charpentier n’était plus
que bouillie sanglante. Le trait avait pénétré juste sous l’œil. C’était un
spectacle pitoyable et horrible. Le clerc récita le requiem à voix basse. Dieu
ne pouvait qu’avoir pitié de cet homme, si épouvanté, et envoyé si promptement
dans les ténèbres.
    Bien qu’éprouvant un réel regret, Corbett savait
que la véritable cause du meurtre de Deverell se trouvait dans la mort de Sir
Roger. Le charpentier avait certainement menti devant le tribunal, mais
pourquoi ? Qu’est-ce qui avait obligé cet artisan prospère à se parjurer,
à envoyer un homme à la potence ? Qui, à Melford, pouvait exercer un tel
pouvoir, exploiter ainsi de terrifiants cauchemars ? Deverell en personne
s’était-il mis à avoir des remords ? Était-ce lui qui avait barbouillé la
tombe de Chapeleys et épinglé le message sur le gibet ? Deverell, en fait,
était-il l’inconnu qui l’avait attaqué de façon si mystérieuse la veille, un
homme affolé qui avait frappé puis avait pris peur et avait fui ?
    — Quelle mort abominable ! murmura
Corbett en remontant le drap souillé de sang.
    Il ouït du bruit derrière lui ; ce devait
être Ranulf.
    — J’ai vu moult cadavres, mais c’est
différent chaque fois.
    Le plancher craqua derechef. Corbett pivota sur
ses talons. Ysabeau s’avançait vers lui à pas de loup, brandissant un couteau à
large lame. Corbett, coincé contre le lit, ne pouvait reculer. Il fit un écart.
Elle imita son mouvement et affermit sa prise sans quitter le clerc de ses yeux
noirs. Le magistrat se savait en danger de mort. Ysabeau avait une idée fixe :
tuer l’homme responsable du trépas de son époux. Corbett fit un pas de côté.
Elle l’imita. Il feinta pour l’attirer. En vain : elle garda sa position,
sur la pointe des pieds, comme une danseuse. Le clerc n’avait pas le choix. Il
se rapprocha. Plus rapide, Ysabeau brandit le couteau. Il lui saisit alors le
bras et fut surpris par sa force. Corbett posa la main sur le poignet qui
levait l’arme. Il essaya de relever le menton de la femme pour la repousser.
Elle était raide et tendue comme la corde d’un arc.
    Corbett prit peur. Il comptait bien se défendre
mais, quoi qu’il fît, il ne pouvait la blesser. Ce n’était ni un truand ni un
bandit ; elle était seulement folle de douleur. Il l’accula contre la
porte entrebâillée.
    — Ranulf ! hurla-t-il.
    Ysabeau, les yeux étincelants de haine, rabattit
soudain son autre main et griffa le visage de son adversaire. Le clerc la
frappa et la repoussa dans la galerie où elle se heurta contre Ranulf. Elle se retourna.
Ranulf, d’un coup de pied, lui fit sauter le couteau des mains. Les autres
accouraient dans l’escalier tandis que Ranulf se saisissait d’Ysabeau, la
tenant serrée comme dans un étau en lui maintenant les bras le long du corps.
    — Putassier ! vociféra-t-elle en
écumant. Gibier de potence !
    Elle se débattait. Le clerc ne desserrait pas
son étreinte. La voisine surgit, un gobelet à la main. Ranulf traîna la
malheureuse dans la galerie, ouvrit d’un coup de pied la porte d’une chambre et
y poussa Ysabeau. La voisine, accompagnée de Blidscote, la suivit, claquant l’huis
derrière eux. Corbett entendit que l’on tirait les verrous. Il tamponna les
égratignures de son visage, ramassa le couteau et le jeta dans l’escalier.
    — Je suis navré, haleta Sir Maurice. Elle
était assise là, puis a dit qu’elle voulait voir le corps de son mari et vous
présenter ses excuses. Elle avait dû cacher le couteau.
    — C’est bon, c’est bon, répondit Corbett
hors d’haleine.
    Il regagna la chambre, aspergea d’eau ses mains
et sa figure et se sécha à l’aide d’une toaille.
    — Ce ne sont que petites écorchures,
commenta Ranulf tout à trac. Vous n’en serez que plus beau !
    — Merci, Ranulf !
    Le magistrat essuya ses sourcils mouillés.
    — Elle avait de la force. Sir Louis, vous
êtes le juge local, n’est-ce pas ? Je veux que vous envoyiez Chanson
quérir un apothicaire ou un mire. Elle a besoin d’une potion pour dormir et il
lui faut

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