La Traque des Bannis
de main prennent de l’avance !
— Farrell ? s’étonna Horace, préoccupé. Mais enfin, Halt, nous poursuivons Tennyson. Farrell est le chef des Bannis que vous avez chassé de Selsey !
Le chevalier avait raison. Ce Farrell avait tenté de berner les habitants d’un petit village de pêcheurs isolé, sur la côte ouest du royaume d’Araluen. C’était cet événement qui avait permis à Halt de découvrir les projets que les Bannis fomentaient en Hibernia.
Halt jeta un regard noir à Horace.
— Évidemment ! rétorqua-t-il sèchement. Qu’est-ce que tu crois ? Tu penses peut-être que je perds la tête ?
Un silence suivit cette question. Will et Horace ne savaient plus que dire.
— Alors ? Penses-tu vraiment que je perds la tête ? répéta le vieux Rôdeur.
Voyant que les deux jeunes gens ne desserraient pas les dents, il secoua brutalement les rênes d’Abelard, qui partit au petit trot.
Vers l’ouest.
— Que se passe-t-il, Will ? demanda Horace.
— Je l’ignore. Je suis néanmoins certain d’une chose : la situation est grave, répondit son compagnon avant de s’élancer derrière son mentor.
— Halt ! Reviens ! cria-t-il.
Non sans hésitation, Horace se mit en route à son tour. Le vieux Rôdeur ne se retourna pas, mais se contenta de préciser :
— Dépêche-toi un peu ! Nous perdons du temps et les Temujai ne doivent plus être très loin derrière nous !
— Les Temujai ? s’exclama Horace. Ils sont à des milliers de kilomètres d’ici !
Will secoua tristement la tête et fit presser le pas à Folâtre.
— Il n’a plus toute sa tête, en effet, constata-t-il d’un air sombre.
Il comprenait, à présent. Quelque chose avait fait perdre tous ses repères à Halt, lequel s’imaginait être en train de vivre des situations passées, certaines datant de plusieurs années.
— Halt ! Attends-moi ! appela-t-il.
Tout à coup, son ancien maître leva les bras au ciel, laissa échapper un cri étranglé et vida les étriers à la grande surprise d’Abelard, très alarmé. Will s’élança au galop pour le rejoindre.
Il trouva Halt étendu sur le sol, sans connaissance.
— Halt ! hurla Will en bondissant de sa selle pour s’agenouiller près du vieux Rôdeur.
Abelard, nerveux, baissa la tête et donna de petits coups de nez à son maître, comme pour essayer de le réveiller. Le petit cheval hennissait souvent, mais, cette fois, Will détecta dans son timbre une inhabituelle note d’anxiété.
— Doucement, Abelard, ordonna-t-il en agitant la main pour lui faire signe de reculer. Écarte-toi.
À contrecœur, le cheval obtempéra. D’ordinaire, il n’obéissait qu’à Halt ; il était malgré tout assez intelligent pour saisir que celui-ci n’était pas en état de s’adresser à lui et que Will avait pris le relais. Rassuré par le calme de ce dernier, il se tut et resta tranquille, les oreilles dressées, sans pourtant lâcher son maître du regard.
Halt gisait face contre terre. Will le retourna doucement et releva son capuchon. Il avait les yeux fermés. Son visage était d’une pâleur mortelle. Il semblait avoir cessé de respirer et, l’espace d’un atroce instant, le jeune Rôdeur sentit une vague de panique le submerger.
Halt, mort ? C’était impossible ! Will ne pouvait imaginer un monde sans son mentor.
Puis un long frisson traversa le vieux Rôdeur et Will en éprouva un profond soulagement. Horace, qui les rejoignait tout juste, vint s’agenouiller à son tour près d’eux. Son inquiétude était visible.
— Il n’est pas… commença-t-il, hésitant.
— Non, il est en vie. Mais il n’est pas encore revenu à lui.
Halt laissa échapper un autre souffle frémissant, qui parut secouer son corps tout entier. Sa respiration, plus régulière, restait cependant courte et saccadée, comme s’il manquait d’air.
Will se releva prestement, ôta sa cape et la plia.
— Redresse-lui la tête, dit-il à Horace.
Le jeune guerrier s’y prit avec douceur tandis que son ami glissait l’oreiller de fortune sous le crâne de Halt.
— Will, qu’allons-nous faire ? demanda le chevalier d’un air désespéré. Que lui arrive-t-il ?
Le jeune Rôdeur se pencha vers Halt et, délicatement, souleva l’une de ses paupières. Il n’y eut aucune réaction. Will, examinant son œil, remarqua que la pupille restait dilatée au contact de la lumière du jour, pourtant vive. D’ordinaire, il le savait, la pupille se rétractait automatiquement
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