La Traque des Bannis
le dépasser sans me montrer, en chevauchant sur une piste parallèle à la sienne. Là, je lui couperai la route.
— Il te faudra néanmoins le pourchasser.
— En effet, mais il sera fatigué, sous le choc. Voilà pourquoi j’aurai de meilleures chances de l’attraper vivant si je patiente encore quelques heures.
Malcolm comprenait. Il affichait pourtant une mine préoccupée.
— Il ne reste pas plus de quelques heures à Halt, tu sais.
Le jeune Rôdeur soupira.
— Oui. Mais si je me faisais tuer, cela ne lui serait d’aucune utilité.
Soudain, il leva la main pour prévenir ses compagnons. Un frémissement à peine visible venait de parcourir le corps de Folâtre, signalant qu’il avait perçu quelque chose.
— C’est bien, mon grand, murmura son maître.
Will entendit un léger martèlement de sabots à l’approche. Il se baissa en indiquant à ses compagnons de l’imiter.
— N’oubliez pas : s’il regarde de ce côté, ne bougez plus un muscle.
L’espace de quelques secondes, ils ne virent rien. Puis le bruit de sabots ralentit et un cavalier apparut à l’horizon. Le Rôdeur eut une moue de mépris. Le Génovésien était peut-être un adversaire redoutable dans les rues et les venelles d’une cité, pensa-t-il. En revanche, il manquait singulièrement d’expérience sur le terrain ; croyait-il qu’avancer avec prudence le rendrait moins visible ?
Will l’avait reconnu sans mal grâce à sa cape mauve et à son arbalète. L’arme était chargée, posée devant lui en travers de sa selle. L’homme se dressa sur ses étriers et, la main en visière, fouilla du regard la campagne vallonnée. Ne voyant nul signe des trois cavaliers qu’il recherchait, il dut se douter que ceux-ci avaient déjà franchi la crête suivante.
Le Génovésien pressa sa monture et descendit la pente douce. Il n’avait rien d’un pisteur, songea Will, c’était évident. Pour preuve, les indices maladroits que ses camarades et lui avaient laissés dans la forêt noyée et le fait qu’à présent, il n’examinait pas même le sol en quête d’empreintes.
L’homme passa au trot à cent cinquante mètres environ du bosquet, puis gravit la colline suivante et, dès qu’il fut au sommet, s’immobilisa. Ne voyant toujours rien, il resta indécis quelques minutes avant de faire demi-tour et de repartir d’où il était venu, vers le sud.
Il ne prêta pas attention à la cachette de Will et de ses compagnons, et poursuivit sa route sans marquer de pause sur la crête. Le martèlement des sabots s’éloigna. Le jeune Rôdeur attendit un court moment et se tourna vers Folâtre.
— Tu entends quelque chose ?
Secouant la tête, le cheval hennit doucement. Il baissa les oreilles, les releva : il n’avait perçu aucun son alarmant. Pour la première fois depuis une bonne demi-heure, Will se détendit.
— Tu crois qu’il s’est laissé prendre ? s’enquit Horace.
— Oui, je crois, répondit Will après une seconde d’hésitation. À moins qu’il ne joue double jeu, mais je doute que ce soit le cas. Il n’est pas très doué pour pister qui que ce soit. Même toi, Horace, tu serais capable de le berner, ajouta-t-il avec un sourire.
— Merci pour cette remarque, rétorqua le guerrier en haussant un sourcil – expression à laquelle il commençait à prendre goût.
— Tu n’es pas censé bouger l’autre sourcil, tu sais, fit observer Will. Sinon, ça ne marche pas.
Horace dévisagea son ami d’un air dédaigneux. Il était convaincu qu’il s’y prenait très bien et que les Rôdeurs étaient tout simplementvexés de voir qu’il maîtrisait désormais l’une de leurs mimiques préférées.
Malcolm, devinant que ce petit échange était susceptible de durer un bon moment, les interrompit :
— Et maintenant, que faisons-nous ?
Will se tourna vers lui et se concentra de nouveau sur la situation présente.
— Je vais patienter une heure ou deux. Je veux que notre adversaire soit convaincu de notre départ. Ensuite, je me mettrai en route. Je le rattraperai avant qu’il ait atteint le campement de Tennyson.
— Et tu le captureras, déclara Horace.
— Avec un peu de chance, oui.
Le guérisseur regarda le jeune Rôdeur avec admiration.
— Aussi facilement que ça ?
— Oui, répliqua Will avec sérieux.
Puis, pensant qu’il se montrait peut-être un peu trop vantard, il précisa :
— Je n’ai pas d’autre choix, Malcolm, n’est-ce pas ? Tu as besoin de savoir quel
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