La Traque des Bannis
parfaitement équilibré. Toutefois, il ne fallait pas se trouver à plus de vingt mètres de sa cible pour faire mouche – chose qui ne serait pas une mince affaire.
Le Génovésien avait presque atteint une nouvelle crête. D’instinct, Will comprit que l’homme, fort logiquement, allait jeter un dernier regard derrière lui avant de la franchir. Il arrêta brusquement Folâtre, qui manqua déraper, glissa de selle et tira de biais les rênes en plongeant vers le sol. Le cheval, qui connaissait tous les signaux que son maître était susceptible de lui transmettre, réagit aussitôt : il s’agenouilla, puis roula sur le côté et s’immobilisa lorsque Will posa un bras sur son encolure. Ils restèrent ainsi, à moitié dissimulés par les herbes. Vus de loin, le cavalier enveloppé dans sa cape et sa monture à la robe grise ne paraîtraient pas plus menaçants qu’une grosse roche entourée de broussailles. Sous son capuchon, le Rôdeur vit le Génovésien marquer une pause au sommet de la colline.
Will poussa un soupir de soulagement. Par bonheur, il s’était tenu prêt à une telle éventualité.
L’homme se tourna sur sa selle et lança un coup d’œil nonchalant derrière lui, comme il l’avait fait chaque fois qu’il franchissait une nouvelle crête. Convaincu qu’il ne verrait personne, le Génovésien procédait ainsi pour la forme, songea le Rôdeur.
Voilà pourquoi il parcourait à présent la plaine du regard, mais sans grande conviction, un mouvement qui semblait davantage destiné à délasser ses muscles raidis qu’à repérer d’éventuels poursuivants. Ainsi que Halt l’avait si souvent répété à Will, neuf fois surdix, les gens ne voient que ce qu’ils s’attendent à voir : ce fut le cas du Génovésien, qui ne prêta pas la moindre attention au monticule gris et vert, de forme indéterminée.
Au bout d’une ou deux minutes, il reprit sa route et disparut de l’autre côté. Will attendit un instant, l’astuce la plus courante consistant à feindre de s’éloigner pour soudain revenir vérifier ses arrières. Mais l’homme ne rebroussa pas chemin.
Le Rôdeur tapota l’épaule de Folâtre et, tandis que le cheval se redressait d’une roulade, il l’enfourcha. Comme le bruit des sabots était atténué par la masse de la colline, Will en profita pour lancer sa monture au grand galop. Dès qu’il serait sur la crête, il ne se trouverait plus qu’à quelques centaines de mètres de l’autre cavalier.
Cette fois, il ne marqua pas de pause au sommet de la colline. Il était temps de passer à l’action. Ils chevauchaient depuis près de quatre heures et, selon les estimations de Will, ils n’étaient plus très loin de la destination du Génovésien. Au moment où ils franchissaient la crête à vive allure, Will ne put réprimer un cri de surprise.
Les oreilles de Folâtre se dressèrent, mais son maître s’empressa de le rassurer.
— Continue ! lui lança-t-il.
Le petit cheval poursuivit au galop, sans modifier son rythme.
Devant eux, le paysage avait changé : une longue pente menait à une vaste vallée. Le campement de Tennyson, à trois kilomètres environ, était visible. À l’évidence, les rangs de ses partisans, au nombre d’une quinzaine quand le Banni avait quitté Hibernia, avaient grossi : une bonne centaine de gens devaient être rassemblés dans cet endroit, calcula Will.
Mais, dans l’immédiat, il lui fallait s’occuper du Génovésien, qui se trouvait à deux cents mètres devant lui. Par chance, l’homme, qui chevauchait au pas et dont la monture semblait exténuée, n’avait pas encore perçu le bruit des sabots de Folâtre.
Soudain, la tête du Génovésien pivota – il avait dû finir par entendre Folâtre. Après avoir laissé échapper un cri de stupéfaction, il encouragea son cheval à accélérer, d’abord au trot, puis au galop. Une erreur tactique, songea le Rôdeur, à mettre sur le compte de la surprise. Selon lui, l’homme aurait mieux fait de mettre pied à terre, de préparer son arbalète et de faire face à son poursuivant.
Toutefois, il ne se doutait pas que Will cherchait à le capturer et non à le tuer. Et peut-être n’avait-il aucune envie d’affronter le jeune archer, dont il connaissait l’adresse. Il devait être conscient que seule la chance l’avait sauvé lors de leur précédente confrontation.
Will gagnait rapidement du terrain, tandis que le Génovésien éperonnait sans relâche sa
Weitere Kostenlose Bücher