La Traque des Bannis
monture ; mais jamais le cheval de ferme, lourd et maladroit, ne parviendrait à distancer Folâtre, au pied si léger.
Le Rôdeur, voyant l’homme faire glisser son arbalète le long de son bras, rangea ses percuteurs dans sa ceinture et s’empara de son arc. Le Génovésien porta la main à son carquois, choisit un carreau qu’il entreprit d’encocher. Will sentit sa gorge se serrer à l’idée du trait empoisonné qu’il allait devoir éviter. Dans des circonstances normales, il aurait tiré le premier, car tous les avantages étaient de son côté – son adversaire devrait se tourner sur sa selle pour décocher, alors que Will était déjà en position ; en outre, à cette distance, il aurait aisément abattu le Génovésien.
Mais le Rôdeur le voulait vivant.
L’arbalétrier avait fini par charger son arme. Secoué par les mouvements saccadés de son cheval, il se tourna, non sans mal, du côté droit. Will, guidant Folâtre à l’aide des genoux, vira sur la gauche afin d’obliger son adversaire à pivoter un peu plus, ce qui allait le gêner pour viser.
Le Génovésien, s’en rendant compte, se tourna brusquement sur la droite ; aussitôt, le Rôdeur zigzagua de nouveau et passa à gauche. Une manœuvre fructueuse, car l’homme ne put ajuster son tir. Entre-temps, Folâtre ne cessait de se rapprocher.
Le Génovésien pivota encore sur la gauche. Cette fois, Will continua de galoper en ligne droite tout en encochant une flèche ; même s’il n’avait nulle intention de tuer son ennemi, ce dernier l’ignorait et tenterait sûrement sa chance en décochant un unique carreau – car ensuite, il n’aurait pas le temps de recharger son arme.
Le Rôdeur était confiant : il était capable de tirer rapidement plusieurs flèches successives, en visant assez près du visage de sonadversaire pour le déstabiliser, mais sans le toucher. Il se souvint du duel qui l’avait opposé à l’un des Génovésiens ; ces hommes étaient avant tout des assassins habitués à abattre des cibles faciles, lesquelles n’avaient pas conscience de leur présence. En revanche, ils n’étaient pas accoutumés aux combats rapprochés, ni à des ennemis prêts à riposter et ce, avec une extrême précision.
Folâtre se rapprochait, filant à une allure soutenue et régulière, à la différence du pesant cheval de ferme, lequel était éreinté.
Tout à coup, Will vit le Génovésien lever son arme et serrer le déclencheur entre ses doigts… il s’apprêtait à tirer ! En quelques gestes fluides, le Rôdeur banda son arc, décocha, et prit une autre flèche dans son carquois pour l’encocher aussitôt ; tout se déroula si vite que trois traits avaient déjà franchi la distance le séparant du Génovésien avant même que celui-ci n’ait pu actionner le déclencheur de l’arbalète.
L’assassin se rendit soudain compte du danger. Il entendit quelque chose siffler tout près de son oreille et aperçut les deux autres flèches qui se dirigeaient vers lui, à quelques secondes d’écart de la première. Dans pareilles conditions, seul un individu aux nerfs extrêmement solides aurait été capable de décocher un carreau sans flancher. Le Génovésien se baissa en laissant échapper un juron et sa main enclencha l’arbalète, projetant le carreau très haut dans les airs ; celui-ci retomba dans les herbes à près d’une centaine de mètres de Will.
Tout danger était écarté. Le Rôdeur jeta son arc sur le côté – il n’avait pas le temps de le passer de nouveau en bandoulière, et il pourrait le ramasser plus tard –, sortit ses percuteurs de sa ceinture et fit subitement accélérer Folâtre. L’assassin, constatant que Will ne se trouvait plus qu’à une quarantaine de mètres, se mit à éperonner sa monture avec frénésie. L’animal épuisé, qui avait profité de l’inattention de son cavalier pour passer au trot, s’efforça vainement de reprendre son galop. Il était déjà trop tard quand le Génovésien eut l’idée de dégainer l’un de ses nombreuses dagues. Au même instant, Will leva le bras et l’abaissa d’un geste fluide et puissant.
Les percuteurs étincelants tournoyèrent vers leur cible. Dès que l’assassin aperçut le projectile, il se plaqua contre l’encolure de son cheval.
Cet homme avait des réflexes de félin, songea le Rôdeur en voyant les cylindres de cuivre tourner dans le vide au-dessus de la tête du Génovésien avant de disparaître dans les
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