La Traque des Bannis
Accélérons l’allure.
Aussitôt, ils s’élancèrent au trot pour se diriger vers un petit bosquet d’arbres situé dans la plaine, à quelques centaines de mètres de là. Le jeune Rôdeur jeta un bref coup d’œil derrière lui. Personne à l’horizon.
— Vite ! lança-t-il à Horace et à Malcolm.
Il fallait qu’ils soient à couvert avant que le Génovésien n’atteigne la crête qu’ils venaient de franchir. Ils s’enfoncèrent entre les arbres, puis mirent pied à terre.
— Fais en sorte que les chevaux soient vraiment dans l’ombre, dit Will à Horace.
Celui-ci conduisit Caracole un peu plus loin, tandis que Folâtre et Abelard, sur un geste du Rôdeur, emboîtaient le pas au destrier.
— Je vais voir comment se porte Halt, déclara Malcolm.
Le vieux Rôdeur dormait, allongé dans son sac de couchage, au centre du bosquet. Ils l’avaient transporté en ce lieu la veille, après le coucher du soleil, sur une civière de fortune suspendue entre Folâtre et Abelard. Malcolm était resté auprès de lui toute la nuit. Avant l’aube, le guérisseur était discrètement rentré au campement pour assister aux « funérailles », adoptant une attitude endeuillée pendant qu’Horace et Will enterraient une grosse bûche enveloppée dans une couverture.
— Son état est stable, annonça Malcolm après avoir examiné Halt.
Will était rassuré. L’idée de laisser son ancien maître seul, ne serait-ce que quelques heures, n’avait cessé de l’inquiéter tandis qu’ils feignaient de découvrir le corps de Halt à leur réveil et l’enfouissaient dans le sol en montrant d’ostensibles signes de chagrin. La présence de Malcolm à leurs côtés avait toutefois été indispensable.
Posté à la lisière des arbres, le jeune Rôdeur attendait, le regard rivé vers le sud. Il se savait invisible aux yeux de quiconque observerait le bosquet de loin.
— Alors ? s’enquit doucement le chevalier.
Celui-ci portait toujours la cape que Halt lui avait donnée, et Malcolm avait passé celle de Halt. Will leur avait ordonné de baisser leur capuchon afin de dissimuler au mieux leur visage.
— Non ! chuchota son ami. Et pour l’amour du ciel, cesse un peu de brailler comme ça !
Horace ne put réprimer un sourire. Il savait qu’il n’avait pas « braillé », mais il pardonnait à Will son irritation. La tension du Rôdeur était à son comble. S’il voulait que Halt ait une chance de survivre, il fallait que son subterfuge fonctionne.
— Qu’as-tu en tête, au juste ? demanda Malcolm, en prenant garde de baisser le ton.
Les jeunes gens avaient discuté du plan de Will la nuit précédente, mais comme le guérisseur avait veillé Halt, il ne le connaissait pas en détail.
— J’espère que le Génovésien viendra vérifier que nous sommes bel et bien partis, répondit le Rôdeur.
— Et ensuite ? Tu te jetteras sur lui pour le capturer ? reprit Malcolm, dubitatif face à ce projet hasardeux.
— Bien sûr que non ! rétorqua Will, véhément. Je n’ai aucune envie de me faire abattre. Si je me précipite vers lui, il aura tout le temps de décocher un carreau.
— Tu es meilleur tireur que lui, déclara le guérisseur.
— Possible, mais je le veux vivant. Alors que lui, il cherchera à me tuer.
— Tu ne pourrais pas essayer de seulement le blesser ? proposa Malcolm.
— Non, ce serait trop risqué. Il me faudrait lancer Folâtre au galop ; un seul faux pas, et je pourrais manquer ma cible de quelques centimètres et tuer cet homme sur-le-champ. En outre, même si je parvenais à le blesser, cela ne l’empêcherait sans doute pas de m’abattre à son tour.
— Dans ce cas… que comptes-tu faire ?
— Attendre le moment où il se croira en sécurité. Tant qu’il sera à notre recherche, il restera en alerte, expliqua Will. Je suppose qu’il serendra jusqu’à la prochaine crête ; ensuite, voyant que nous ne sommes plus dans les parages, il est probable qu’il ira retrouver Tennyson.
— Cela paraît logique, commenta Malcolm.
Cependant, le Rôdeur sentait que le guérisseur continuait d’être intrigué par son plan, aussi ajouta-t-il :
— Une fois qu’il sera sur le chemin du retour, il veillera à vérifier de temps à autre ses arrières, puis il relâchera peu à peu son attention, convaincu que nous sommes partis. Nous aurons alors l’occasion de le prendre au dépourvu. Je vais lui laisser un peu d’avance, puis je m’arrangerai pour le rattraper et
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