La Vallée des chevaux
bâton, il s’estimerait heureux.
Comme le poulain cherchait à insinuer son museau dans sa main,
il s’arrêta pour le caresser et le gratter et éclata de rire quand, un instant
plus tard, le jeune animal se roula avec délice dans le trou bourbeux où il
avait l’habitude de venir se vautrer avec sa mère. Poussant des petits cris de plaisir,
les pattes en l’air, le poulain se tortillait dans la terre meuble. Au bout
d’un moment, il se remit sur ses pattes, se secoua, en envoyant de la terre
dans toutes les directions, puis il se dirigea vers un saule à l’ombre duquel
il aimait se reposer et s’étendit au pied de l’arbre.
Jondalar avançait lentement, penché en avant pour examiner les
pierres.
— J’en ai trouvé une ! cria-t-il, tout excité.
Son cri fit sursauter le poulain et il se sentit un peu idiot.
— En voilà une autre ! dit-il un moment plus tard en
se baissant pour ramasser la pierre aux reflets cuivrés. (Il s’immobilisa
soudain, l’œil attiré par une pierre beaucoup plus grosse.) Il y a aussi des
silex ! s’écria-t-il.
Voilà donc où Ayla allait chercher les silex dont elle se
servait pour fabriquer ses outils ! Si je pouvais trouver un percuteur et
faire un perçoir... Je pourrais fabriquer des outils ! se dit-il. Des
lames qui couperaient parfaitement et des burins. (Relevant le buste, il
s’approcha du tas d’ossements et de roches projetés par la rivière en crue
contre la saillie rocheuse.) J’ai l’impression que je vais trouver mon bonheur
parmi tous ces os et qu’il y a même des andouillers. Je pourrai aussi fabriquer
une sagaie correcte.
Qui me dit qu’elle en voudra ? Peut-être a-t-elle de bonnes
raisons d’utiliser ses armes. Mais cela ne m’empêche pas de fabriquer une
sagaie pour moi. Ce sera mieux que de passer la journée à ne rien faire. Je
pourrais peut-être aussi sculpter quelque chose. J’étais doué pour la sculpture
avant d’abandonner...
Quand il eut fini de fouiller dans le tas d’ossements et de bois
flottés, il contourna la saillie rocheuse pour examiner l’endroit qui servait
de décharge à Ayla. Après avoir écarté les buissons envahissants, il découvrit
des os, des crânes et des andouillers. En cherchant sur la plage un silex
capable de faire un bon percuteur, il ramassa une poignée de pierres à feu.
Quand il s’attaqua au premier rognon de silex, il avait le sourire aux
lèvres : il ne s’était pas rendu compte à quel point la taille du silex
lui manquait.
Il songea à tout ce qu’il allait fabriquer maintenant qu’il
avait trouvé des silex. Il avait envie d’un couteau, un vrai, avec un manche,
et d’une hache. Il voulait faire des sagaies et attacher les peaux dont il
était vêtu en les trouant grâce à un perçoir. Peut-être Ayla serait-elle
intéressée par ce qu’il faisait et pourrait-il lui montrer les techniques qu’il
utilisait.
Alors qu’il craignait de s’ennuyer en son absence, il ne vit pas
le temps passer et ce n’est qu’à la tombée du jour qu’il s’arrêta de
travailler. Il rangea à l’intérieur d’une peau qu’il avait empruntée à Ayla ses
nouveaux instruments de tailleur de pierre et les outils en silex qu’il venait
de fabriquer, puis il regagna la caverne. Le poulain semblait avide de caresses
et il en déduisit qu’il avait faim. Ayla avait préparé pour lui un gruau peu
épais qu’il avait d’abord refusé, puis qu’il avait mangé, mais c’était à
midi... Où donc était-elle ?
Quand la nuit fut tombée, Jondalar commença à s’inquiéter. Le
poulain avait besoin de sa mère et Ayla aurait dû être rentrée. Il resta un
long moment à l’attendre, debout au bord de la corniche, puis décida d’allumer
un feu, au cas où elle aurait du mal à retrouver le chemin de la caverne. Il
savait très bien qu’il n’y avait aucune chance qu’elle se perde, mais il fit
malgré tout du feu.
Il était tard quand elle arriva enfin. En entendant le
hennissement de Whinney, Jondalar s’engagea sur le sentier pour aller à leur
rencontre, précédé par le poulain qui, lui aussi, avait entendu sa mère. Ayla
descendit de la jument en arrivant sur la plage, puis elle tira une des bêtes
qu’elle rapportait sur le sol et ajusta les deux perches pour que le travois
puisse emprunter l’étroite piste qui menait à la caverne. Jondalar la rencontra
au moment où elle s’engageait dans la côte avec Whinney et il s’écarta pour la
laisser passer.
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