La Vallée des chevaux
chacun notre tour ou marcher à côté
d’elle.
Lorsqu’ils eurent atteint le gros rocher qui se trouvait dans le
pré, Ayla monta sur la jument, puis elle s’avança un peu et tint l’animal d’une
main ferme pendant que Jondalar se hissait derrière elle. Whinney baissa les
oreilles. Même si elle n’était pas habituée à porter ce poids supplémentaire,
elle était robuste et se mit en route sur un signe d’Ayla. La jeune femme la
maintint à une allure raisonnable et l’arrêta dès qu’elle sentit qu’elle avait
besoin de se reposer.
Quand ils repartirent, Jondalar était déjà moins nerveux – mais
il aurait préféré que ce soit le contraire. Maintenant qu’il se détendait, il
était beaucoup plus sensible à la présence de la jeune femme devant lui. Il
sentait qu’il s’appuyait contre son dos et que ses cuisses touchaient les
siennes. Ayla elle-même commençait à sentir autre chose que le simple contact
de la jument : une dure et chaude pression s’exerçait dans son dos que
Jondalar était bien incapable de contrôler. A chaque cahot, ils étaient
projetés l’un contre l’autre. Ayla souhaitait que cela s’arrête et, à la fois,
elle n’en avait nulle envie.
Jondalar souffrait en silence. Jamais encore il n’avait été
obligé de se retenir à ce point. Depuis sa puberté, il avait toujours trouvé le
moyen d’assouvir ses désirs. Mais Ayla mise à part, il n’y avait aucune femme.
Et il ne voulait pas à nouveau aller se soulager en solitaire.
— Ayla... dit-il d’une voix étouffée. Je crois... Je crois
qu’il est temps de se reposer.
Ayla arrêta la jument et descendit le plus vite possible.
— Nous ne sommes plus très loin, dit-elle. Nous pouvons
parcourir le reste du chemin à pied.
— Cela reposera Whinney.
Ayla savait que ce n’était pas à cause de Whinney qu’ils étaient
descendus, mais elle ne dit rien. Ils marchèrent tous les trois de front, la
jument étant au milieu. Ayla avait bien du mal à se concentrer sur les repères
qu’elle avait enregistrés la veille et Jondalar, l’aine douloureuse, se
félicitait de l’écran que lui fournissait la jument.
Quand ils aperçurent le troupeau, l’idée de chasser pour la
première fois avec les propulseurs éteignit en partie leur ardeur. Malgré tout,
ils prirent bien garde à ne pas se retrouver trop près l’un de l’autre.
Le troupeau de bisons était massé autour d’un ruisseau. Il était
plus important que la veille. Des petits groupes étaient venus se joindre au
troupeau qu’Ayla avait aperçu et d’autres suivraient. En fin de compte, des
dizaines de milliers d’animaux à la toison brun-noir se rassembleraient sur des
hectares de collines moutonnantes et de vallées, et formeraient un véritable
tapis vivant qui résonnerait du bruit de leurs sabots et de leurs beuglements.
Au sein d’une telle masse, la notion d’individu n’avait plus aucun sens :
la survie de chacun dépendait du nombre.
Même si le troupeau qui se tenait autour du ruisseau était encore
relativement petit, les animaux qui le composaient n’obéissaient déjà plus qu’à
l’instinct grégaire. Plus tard, pour résister aux périodes de disette, ils
seraient obligés de se scinder à nouveau en petits groupes familiaux et de se
disperser à la recherche du fourrage.
Ayla emmena Whinney au bord de la rivière, près d’un pin courbé
par le vent. Utilisant le langage par signes du Clan, elle dit à la jument de
ne pas s’éloigner. Voyant qu’elle gardait instinctivement son petit près
d’elle, elle se dit qu’elle avait eu tort de s’inquiéter : Whinney était
parfaitement capable de veiller sur son poulain en cas de danger. Malgré tout,
Jondalar s’était creusé la tête pour trouver un système capable de retenir le
poulain et elle était curieuse de voir si cela allait marcher.
Après avoir pris chacun un propulseur et une poignée de sagaies,
Ayla et Jondalar se dirigèrent vers le troupeau. Les sabots des bisons avaient
eu raison de la croûte de terre qui recouvrait les steppes et la poussière
soulevée par leur passage maculait les fourrures sombres et hirsutes. Cette
poussière âcre et suffocante était semblable à la fumée qui signale le parcours
d’un feu de prairie : elle permettait de suivre le troupeau à la trace. Et
quand celui-ci était passé, on observait le même spectacle de désolation
qu’après un feu de prairie.
Ayla et Jondalar firent le tour du
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