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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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salut des miens, Sire, j’accepte.
    —  Alors, donnez en paix.
    Il posa affectueusement un baiser sur son front et s’éclipsa aussitôt. Marie resta longtemps assise. En face d’elle, une large fenêtre à meneaux quadrillait une nuit sans nuages. Une nuit de pleine lune.
    Pour donner à Philippus et Isabeau la possibilité d’aller au bout de leurs recherches et sauver sa race de sa malédiction, elle devait accomplir sa propre destinée.
    « Sorcière, bûcher, hérétique ». Ces mots tournoyaient dans sa tête et lui donnaient la nausée. Au loin, un loup hurla et son cœur se mit à battre plus fort encore. Si elle n’avait été si loin de l’Auvergne, elle eût pu croire qu’Albérie pleurait.
     
    Moins d’un mois plus tard, comme décembre s’annonçait, la folie commença.

15
     
     
    La tombe était petite. À peine celle d’un enfant. De cet enfant qu’il n’avait somme toute jamais cessé d’être. Marie était arrivée trop tard à Paris. Trop tard pour ses funérailles, trop tard pour lui dire adieu.
    À peine la cour s’était-elle posée à Fontainebleau qu’elle rejoignait le domicile d’Isabeau pour la prévenir de sa nouvelle charge. Elle l’avait trouvée en deuil, les yeux bouffis.
    —  Croquemitaine est mort, furent ses paroles d’accueil.
    Et Marie se retrouva en pleurs dans les bras de sa grand-mère.
    Il était vieux. Les fièvres de l’hiver l’avaient emporté. Isabeau n’avait rien pu y changer. Cela faisait une semaine déjà qu’elle avait perdu son plus fidèle ami. Presque un père. Marie comprenait d’autant mieux sa tristesse qu’elle était aussi la sienne. Combien de fois les avait-il fait sauter sur ses genoux, avec Constant et Solène. Jusqu’à ce qu’ils deviennent des « géants », disait-il, des géants tout petits dans l’âme.
    Lorsqu’elles eurent l’une et l’autre étanché le trop-plein de leur peine, Marie raconta. Isabeau la conforta dans sa décision. Elle avait toujours tenu le roi en grande estime et les luthériens la connaissaient assez bien pour l’entendre. Sauf Jean Calvin. Il se moquait de ses contemporains, avait édicté ses propres règles, s’opposant par bien des dires à Luther. Cela n’avait semblé qu’un jeu à ses disciples. Mais aujourd’hui on parlait à couvert du mouvement calviniste. Isabeau n’y était pas opposée, car il allait dans le sens de sa propre réflexion, mais l’homme lui déplaisait de jour en jour davantage. Il tirait profit de toutes actions en parfait opportuniste, et laissait souvent les autres en première ligne. Il avait su les persuader qu’il fallait protéger le maître pour que ses idées se développent et perdurent. Même Clément Marot avait fini par s’écarter de lui. Il continuait ouvertement de plaider la foi des hérétiques mais le faisait dans le sillage de la sœur du roi, laquelle n’y cherchait aucune gloire. Seul Constant se perdait dans son souffle, effectuant en son nom les plus viles besognes, les plus hardies aussi. Ce qui rendait Lilvia et Bertille folles d’inquiétude, ainsi qu’Isabeau qui l’aimait tel un fils. Alors Jean suivait. Pas à pas. Pour le protéger de lui-même.
     
    —  Que fais-tu ici ?
    La voix était sèche et Marie sentit sa peine redoubler. Elle s’était assise sur la tombe de terre, se moquant bien de souiller sa toilette de velours, égrenant de fins cailloux entre ses doigts comme autant d’années de bonheur perdues.
    —  Bonjour, Constant, parvint-elle à dire sans se retourner.
    Il s’approcha d’elle et s’assit à son côté. Son regard était dur, de cette rage sourde que l’on met sur la souffrance. Mais Marie s’en moquait. Elle tendit la main, effleura sa joue hérissée d’une barbe indisciplinée et, l’instant suivant, pelotonnée dans ses bras, se mit à pleurer.
    Ils restèrent longuement de la sorte, comme si Croquemitaine pouvait entendre bien au-delà des mots leur dernier message, s’attendant presque à voir ses bras torses jaillir de la terre et les enserrer, sa voix fluette ne moquer de leur chagrin et déclamer, pince-sans-rire : « Quand vous serez grands, comme moi, ça vous passera ! »
    Puis Constant releva la tête et un faible sourire éclaira son visage.
    —  C’est à nous à présent de le remplacer, affirma-t-il.
    Marie baissa les yeux et, sans trouver la force de résister, se laissa entraîner. Elle avait espéré un tête-à-tête avec lui. Il n’en fut rien.

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