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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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J’aurais pu avorter. Tu n’aurais rien su. Mais je n’ai pas trouvé la force. Je ne savais plus qui j’étais, ce que je voulais. Tu me rejetais. Je t’ai supplié de rester, souviens-toi. Je t’aime, Constant. J’ai tant rêvé que tu me pardonnes.
    —  Elle dit vrai. À cause de cela, elle a refusé de m’épouser, plaida Jean.
    Le regard de Constant alla de l’un à l’autre, puis il se redressa hagard et lâcha :
    —  Tu aurais dû accepter car je ne te pardonnerai jamais.
    Il recula contre la rambarde sculptée. Il était ivre de douleur. La tête lui tournait. En contemplant un instant les passants qui circulaient sur le parvis de la cathédrale si loin en contrebas, il se demanda si Marie se rappelait leurs jeux, quand il aimait se suspendre par les pieds aux gargouilles, pour l’effrayer… Elle était à lui, à lui seul. Jean allait payer pour avoir changé cela.
    D’un violent coup de reins, il se jeta sur son rival qui se trouva catapulté avec force en arrière. Les deux hommes roulèrent l’un sur l’autre sur l’étroite coursive.
    Le coup de poing de Constant atteignit le visage de Jean. Marie hurla, puis se laissa choir de nouveau, bouleversée. C’était pour elle qu’ils allaient s’entretuer.
    L’affrontement dura un long moment sans qu’elle puisse voir lequel avait le dessus, puis tout bascula. Constant sentit sous ses doigts la dague tombée à terre et s’en empara. Il la pointa sur la gorge de Jean qui le tenait à merci. Jean lâcha prise aussitôt et s’immobilisa, à califourchon sur ses cuisses.
    —  Vas-y, Constant, réclama-t-il le regard froid. Tu m’as sauvé la vie autrefois. Nous serons quittes. Alors, finissons-en.
    La lame s’enfonça délicatement dans la peau, laissant perler sur l’acier une goutte de sang. Jean ne broncha pas. Marie pleurait doucement, sans oser intervenir de peur d’accroître la colère de Constant. Mais Jean s’y employa :
    —  J’ai abusé de son innocence pour la forcer à m’aimer. C’était facile car elle t’a dit vrai, elle était terrorisée et j’étais son ami. Elle avait confiance en moi. Je l’ai prise sans remords, persuadé que je saurais mieux la satisfaire que toi.
    —  Salaud ! Gronda-t-il en faisant pénétrer plus loin la lame tandis que ces mots le poignardaient lui-même.
    Marie n’en supporta pas davantage. Elle rampa jusqu’à Constant et supplia :
    —  Assez. Je t’en prie. Je ne vaux pas la mort d’un homme.
    —  Ne l’écoute pas, Constant. Vivre m’indiffère. J’ai perdu. Elle ne m’aimera jamais.
    Constant hésita encore un instant puis retira sa dague.
    —  Je ne te rendrai pas ce service, l’ami. Tu vivras avec cette souffrance. Comme moi. J’y veillerai. À présent, partez ! Tous les deux !
    —  Constant… supplia Marie.
    —  Peut-être un jour, Marie. Pour l’heure, tu as choisi ton camp. Ton camp et ton roi.
    —  Viens, Marie, insista Jean en se redressant, indifférent au sang qui ruisselait sur sa gorge.
    Marie essuya ses larmes d’un revers de main et murmura, comme Constant ne bougeait pas :
    —  Si j’ai d’autres enfants un jour, je jure qu’ils seront de toi, Constant.
    Puis elle se laissa emmener.
     
    Les mois qui suivirent ne furent que folie. Les arrestations, les procès, les supplices s’accélérèrent. Marie courait en tous sens, de cette cour frivole où elle apprenait la docilité d’une dame d’honneur auprès d’une jouvencelle austère, aux souterrains du Temple où se réunissaient souvent les hérétiques. Calvin avait fini par accepter son soutien, aidé sans doute par le poing convaincant de Jean Latour. Constant ne lui parlait pas. Lorsqu’ils se croisaient, il baissait les yeux et tournait les talons. Marie ne désespérait pas. Elle se réconfortait de ce « peut-être » lancé sur les ailes de Nostre-Dame. Elle s’étourdissait d’italien, assistait aux fêtes données par le roi dans ses divers châteaux et s’écartait prudemment de toute discussion animée où l’on traitait d’hérésie. Isabeau tenait encore son échoppe ouverte, mais les rumeurs affirmant son appartenance aux luthériens avaient amoindri sa clientèle. Il y avait désormais deux camps qui s’opposaient ouvertement. Et Isabeau sentait chaque jour davantage la précarité de sa situation. Son nom pourtant restait absent des listes.
    Puis, un matin de mars, Jean Latour entra chez elle, l’air soucieux.
    —  Ils viennent

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