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La véritable histoire d'Ernesto Guevara

La véritable histoire d'Ernesto Guevara

Titel: La véritable histoire d'Ernesto Guevara Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Rigoulot
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eux-mêmes sur le chemin de l’Homme nouveau. Et puis, ils n’étaient pas particulièrement demandeurs de sa présence. Dans la lettre qu’il avait adressée à Castro, Guevara assurait que « d’autres nations du monde demandaient ses modestes efforts ». Le Congo n’en faisait visiblement pas partie !
    Mais il ne se formalisait pas pour de si piètres obstacles. Que l’entreprise paraisse impossible le motivait même davantage. Piment supplémentaire : il manquait totalement de connaissances sur le Congo et ses problèmes. Il procédera de la même manière deux ans plus tard en Bolivie. C’est pourquoi son « aventure » au Congo, certes moins connue que celle de Bolivie, est intéressante. On y retrouve tout ce qui a conduit Guevara à l’échec au Congo et à la mort en Bolivie : méconnaissance du terrain, impréparation, communications faibles ou inexistantes avec des réseaux urbains ou étrangers, puis, sur place comme on va le voir, la même discipline outrancière, la même indifférence à la vie et à la mort, le même flou sur les objectifs finaux… Une froide mécanique mortifère, sans doute, et bien éloignée du groupe de guérilleros romantiques qu’on nous sert encore trop souvent, mais une mécanique qui avait du jeu, et dont les serveurs connaissaient mal les conditions de fonctionnement et les effets produits.
    Parfaitement grimé, Guevara arrive le 19 avril à Dar es-Salaam après un voyage un peu tortueux par Moscou et Le Caire. Guevara semble ne pas y avoir rencontré à nouveau Nasser, sérieusement méfiant à l’égard du projet : « Je ne veux pas m’en mêler, lui avait dit le Raïs, mais si vous voulez devenir un autre Tarzan, l’homme blanc parmi les Noirs, les dirigeant et les protégeant, cela ne doit pas être fait ». La réponse que lui fit Guevara sur le fait qu’il fallait bien apporter un soutien aux mouvements révolutionnaires de par le monde fut tout sauf convaincante, aux yeux de Nasser 138 …
    A-t-il quand même eu le sentiment que quelque chose « clochait » dans l’entreprise et dans son parcours propre ? Dans une lettre qu’il leur adressa alors, il se présenta lui-même à ses parents comme un Don Quichotte, un aventurier, un « petit condottiere du xx e  siècle ». Il leur assura qu’il n’avait changé en rien depuis qu’il était parti en moto près de quinze ans auparavant ou sur le Granma. Je n’ai changé sur « rien d’essentiel, leur expliqua-t-il, sauf que je suis plus conscient [ de quoi, il ne le dit pas ] et sauf que mon marxisme est plus profond et plus structuré [ c’est vrai : il n’a depuis longtemps plus le moindre doute ]. Je crois à la lutte armée comme la seule solution pour les peuples qui luttent pour se libérer et je suis conséquent avec mes convictions. » « La seule » dit-il, en passant discrètement sur les difficultés qu’une telle position entraînait avec les Soviétiques qui portaient Cuba à bout de bras, avec Fidel donc, et sur le fait que ces difficultés étaient la cause directe de son éloignement de l’île.
    Le 24 avril 1965, Guevara entra clandestinement au Congo 139 avec treize Cubains. Les autres, un peu plus d’une centaine, suivant par petits groupes.
    Dès les premières heures, on est frappé par le côté artisanal de l’entreprise. Il faut imaginer le Che donnant des coups de pied dans le moteur poussif du bateau qui le fait traverser le lac Tanganyika. Le fait est qu’il repart, mais ce n’est pas Tarzan en Afrique comme l’a suggéré Nasser : peut-être un peu Tintin mâtiné de professeur Nimbus. Car il est arrivé avec ses livres et il commence rapidement à mettre en place un système d’études : cours de swahili, de français, de culture générale. De son côté, Guevara lit la biographie de Marx par Franz Mehring. Autour de lui, les combattants congolais ne sont pas préparés militairement, n’ont pas de chefs sérieux, beaucoup sont persuadés d’être protégés de la mort par on ne sait quel procédé magique. Les désertions se multiplient, des attaques sont lancées en pure perte. Comme Guevara s’est seulement infiltré dans la zone déjà « libérée », il se place clairement sous le commandement de Kabila.
    Mais, même mieux disciplinés, mieux instruits, les combattants autour de lui auraient-ils eu des chances de faire triompher le socialisme ? L’idée que l’Afrique était riche de promesses révolutionnaires, dernier

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