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La véritable histoire d'Ernesto Guevara

La véritable histoire d'Ernesto Guevara

Titel: La véritable histoire d'Ernesto Guevara Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Rigoulot
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voulaient s’opposer au bonheur de n’avoir qu’un seul parti et un seul chef, des tickets de rationnement et des camions brinquebalants comme moyens de transport ? Leurs morts ne comptent pas… Mais, même à s’en tenir aux morts nobles, aux guérilleros tombés au combat, on arrive à un joli résultat. Le Che appuyait les guérillas dans la plupart des pays d’Amérique latine. Il lançait même ses amis dans de folles aventures. Combien ont été inutilement sacrifiés sur l’autel du Grand Soir latino-américain ?
    Combien, comme Massetti en 1963, au nord de l’Argentine, ont-ils traîné comme des âmes en peine dans des endroits déserts au milieu de gens qui ne voulaient pas d’eux ou ne les comprenaient pas avant d’être abattus comme des animaux errants dans l’indifférence générale ?
    Combien ont été massacrés d’avoir tenté l’impossible dès 1959, en débarquant au Nicaragua ou en Haïti, au Panamá ou au Paraguay avec la bénédiction de Guevara et de son camarade Fidel Castro ?
    Et combien, parce que le Che leur avait assuré que c’était la voie royale de la liberté, oui, combien, sur la foi de ce guérillero modèle, se sont lancés dans la lutte armée avant de finir leurs jours, sales, hirsutes, dans une forêt perdue ou au fond d’un ravin ?
    Combien enfin, qui n’ont pas payé cette erreur de leur vie, ont travaillé à nier que l’Amérique latine eût besoin de réformes, persuadés que, comme le répétait sur tous les tons Ernesto Guevara, la seule alternative qui faisait sens était entre les peuples et l’impérialisme, une alternative qui ne trouverait de solution que dans un affrontement nécessairement armé ?
    En guise de quoi, les guérillas – dont celle du Che – ont échoué, le travail demandé pour pousser aux réformes n’a pas été mené par ces jeunes intellectuels fascinés par la voie révolutionnaire et il a fallu attendre trente ou quarante ans de plus pour qu’enfin, aujourd’hui, des gouvernements démocratiques et réformateurs se mettent en place pour susciter les réformes dont le cône sud des Amériques a tant besoin…
    Certes, Guevara refusait la Révolution comme un but lointain dont on travaillerait à réduire l’éloignement par divers moyens militants et militaires. Le Che voulait dès maintenant mettre en œuvre l’Homme nouveau pour se débarrasser du passé. Mais le mode de construction employé – la lutte armée –, les présupposés que ce type de lutte implique (l’adversaire ne peut qu’être tué ou terrorisé par les armes), les suites prévisibles antidémocratiques d’un mouvement formé dans et par la lutte armée, les objectifs mêmes du Che – un parti/État révolutionnaire interdisant tout autre type d’expression – le condamnaient à la réalisation d’un modèle pervers interdisant toute évolution vers la démocratie et la prospérité.
    Des objectifs qui ne touchent plus
    Et pourtant : le Che est toujours admiré. Comment l’expliquer ? Ce n’est pas pour l’efficacité de ses choix politiques et stratégiques : il a partout échoué – à Cuba, au Congo, en Bolivie. Ni la dénonciation des pratiques de la bureaucratie soviétique. Le radicalisme révolutionnaire, le « plus de socialisme encore », peut toucher Olivier Besancenot ou Alain Badiou. Mais l’ensemble de la population est vacciné. Nul ne souhaite voir dans la tragédie du Che une bouée de sauvetage pour une révolution socialiste moribonde. Notre système économique et politique est imparfait. Son existence même semble faite de la résolution plus ou moins satisfaisante des problèmes qu’il rencontre à mesure qu’il se développe. Mais, de là à remettre à flot une fois encore l’utopie d’un monde fraternel sous la direction d’un parti unique et d’une étatisation totale, comme souhaitait s’y frayer un chemin à coups de fusil Ernesto Guevara, non merci.
    Si on le tire trop du côté politique, Guevara perd de son aura. « Adversaire irréconciliable de l’impérialisme – machine à broyer les peuples – et du capitalisme, système intrinsèquement pervers, Guevara était un révolutionnaire marxiste », soutiennent les thuriféraires du Che. La belle affaire ! On sait trop ce que ça donne, un « révolutionnaire marxiste », pour en faire une idole ou un modèle… Seuls ou presque, les trotskistes et les radicaux de tout poil peuvent encenser Guevara parce qu’il

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