La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
s’étonne pas que les habitants de Hangzhou aient été souvent taxés de gourmandise.
« Quiconque verrait l’approvisionnement de
poisson dans les marchés, dit Marco Polo, se figurerait qu’il est impossible d’arriver à en vendre une
pareille quantité ; et pourtant, en quelques heures,
le tout aura disparu, tant est grand le nombre des
citadins habitués à la bonne chère, qui mangent
et poisson et viande à un même repas 63 . »
La multitude et la diversité des commerces
sont un des agréments de Hangzhou. Ce n’est
pas le seul. En dehors des remparts et principalement le long du lac et dans la banlieue sud se
trouvent des parcs et des jardins où les habitants
ont libre accès. Les jours de fête, ces lieux sontenvahis par une foule endimanchée qui vient
admirer les fleurs rares et les arbres exotiques.
Certains promeneurs, munis de provisions de
bouche, portant des instruments de musique, s’en
vont en excursion pour la journée sur le pourtour
du lac ou sur les hauteurs qui l’entourent.
D’autres louent des barques pour quelques
sapèques et se plaisent à voir défiler sous leurs
yeux un des paysages les plus beaux et les plus
célèbres de la Chine.
Au lac s’attache le souvenir de deux des plus
grands poètes des Tang et des Song : Bai Juyi et
Su Dongpo qui furent préfets de Hangzhou l’un
au début du IX e siècle, l’autre à la fin du XI e .
Agrandi artificiellement au cours des siècles, le
lac était toujours menacé par la vase et par les
plantes aquatiques. Au cours des années 1041-1048, il avait été élargi après expropriation de
terrains appartenant à de grandes familles et à
des monastères bouddhiques. En 1086-1093,
Su Dongpo envoya une adresse à l’empereur
demandant des fonds pour l’embellissement du
lac et afin de le remettre dans l’état où il se trouvait à l’époque des Tang. « Le lac de l’Ouest,
disait-il dans son mémoire, est comme les sourcils et les yeux d’un visage. Ce serait un crime de
le laisser à l’abandon. » En conséquence, la cour
lui octroya des certificats d’ordination pour religieux (ces diplômes constituaient alors une sorte
de monnaie de papier), qu’il échangea contre dessapèques et du riz. Des paysans recrutés furent
chargés de curer le lac et de l’agrandir 64 .
Vers 1275, le lac avait plus de quinze kilomètres de tour et il était profond de trois mètres.
Des gardes militaires, placés sous le commandement de fonctionnaires spéciaux, assuraient la
police et l’entretien du lac : il était défendu d’y
jeter des détritus et d’y planter des lotus et des
châtaigniers d’eau. Les soins apportés au cours
des siècles à l’entretien du lac de Hangzhou
témoignent du goût et du souci extrême des
Chinois de l’époque des Tang et des Song pour
les beaux paysages. Les plus beaux sites sont
conservés jalousement et chaque construction
doit s’inscrire de façon harmonieuse dans leur
cadre. Il en est ainsi des pavillons et des tours
bouddhiques qui s’élèvent sur les collines qui
entourent le lac de l’Ouest. Entre autres édifices
de ce genre, mentionnons la « pagode » qui se
dressait au XIII e siècle sur le pic du Tonnerre, petit
promontoire qui fait saillie dans la partie sud du
lac. Cette tour octogonale de 53 mètres de haut
avait été construite en briques bleues en 975 65 .
D’après la description de Hangzhou en 1275,
il y avait constamment sur le lac plusieurs centaines d’embarcations de toutes tailles et de tous
genres : petites barques semblables à celles des
canaux de la ville, mues au moyen d’une grande
rame fixée à l’arrière et que le batelier maniait
avec le pied 66 ; bateaux rapides à roues et pédales ;grosses embarcations à fond plat longues de 30
à 60 mètres et qui pouvaient porter 30, 50 ou
même 100 passagers ; bateaux de 6 à 9 mètres
de long où pouvaient prendre place une vingtaine de personnes. Tous ces bateaux étaient
construits avec le plus grand soin, et les parties
apparentes ornées de fines sculptures et peintes
de couleurs vives. Quand ils se déplaçaient,
« on n’y sentait pas plus de mouvement que sur
la terre ferme ». Chacun portait un nom : Les
Cent Fleurs , Les Sept Joyaux , Le Lion d’or , Le
Bateau jaune , etc. Près du parc du Petit Lac
(partie du lac délimitée par une petite digue),
étaient amarrés les bateaux de l’empereur
construits entièrement en bois de cèdre, aux
sculptures magnifiques.
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