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La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)

La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)

Titel: La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: JACQUES GERNET
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et, l’aurait-elle su, elle
n’aurait pu empêcher ces malversations, dit un
contemporain. Alors, ajoute-t-il, qu’il s’agissait
dans le principe de bienfaisance, jamais la
moindre parcelle de drogue ne parvint jusqu’aux
gens du peuple 6 .
    La vie luxueuse que l’on mène dans les villes
de la Chine du Sud-Est, et plus particulièrement
à Hangzhou, a fait naître de nouveaux besoins.Les hautes classes, dans leur ensemble, cherchent
à accroître leurs revenus. De nombreux fonctionnaires de tous les degrés de la hiérarchie, des
membres de la famille impériale, des eunuques
du palais placent leurs capitaux dans des entreprises de caractère commercial. Cependant, toute
activité de ce genre est interdite en principe aux
fonctionnaires. Mais il leur est toujours possible
de trafiquer sans déchoir en ayant recours à des
prête-noms. C’est ainsi qu’un décret de 995 nous
apprend que certains fonctionnaires se livraient
au commerce avec les pays étrangers par l’entremise d’agents d’affaires 7 . Les maisons de prêts
sur gage, dont on comptait plusieurs dizaines en
1275 à Hangzhou et dans ses faubourgs, étaient
d’un très grand rapport.
    Cette institution d’origine indienne avait été
introduite en Chine par les moines bouddhistes
toujours désireux de consolider la puissance économique de leur Eglise et parfois intéressés à grossir leur fortune personnelle. Mais, à Hangzhou,
l’emprise du bouddhisme était moins sensible
que dans la région voisine du Fujian, par
exemple, où l’enseignement, les travaux publics
et les finances mêmes de la province étaient subventionnés par les communautés bouddhiques.
Aussi les maisons de prêts sur gage de
Hangzhou appartenaient-elles à des laïcs, à des
« familles puissantes et riches » , selon l’expression d’un contemporain, c’est-à-dire sans douteà des gens de la haute société (parents de l’empereur, eunuques du palais, fonctionnaires) et à
des marchands enrichis 8 .
    Les entrepôts gardés et à l’abri des incendies
qui avaient été construits dans le nord de la ville
constituaient encore un autre type de placement
très rentable. Loués à prix fort, car la sécurité
contre les voleurs et le feu se paie d’autant plus
cher que ces deux fléaux sont plus communs, ils
appartenaient à de grandes familles, à l’impératrice et à de riches eunuques 9 . De même, bien
des immeubles d’habitation dont les pièces sont
louées au mois aux gens du peuple, bien des
boutiques de commerçants devaient être la propriété de gens des hautes classes, et on comptait
sans doute parmi eux des fonctionnaires. Enfin,
certains hauts personnages de l’administration
centrale, à Hangzhou, possèdent d’immenses
domaines fonciers situés au nord de la ville,
entre le cours du Yangzi et l’estuaire du
Zhejiang. Leur présence à la cour influe sur la
politique impériale : tous les projets de réforme
agraire se heurtent à leur opposition acharnée.
La fortune personnelle de certains fonctionnaires, qui leur permet de vivre très largement
malgré la modicité de leur traitement, les rend
plus indépendants à l’égard de l’Etat. En
même temps, leurs intérêts privés peuvent
entrer en conflit avec les intérêts généraux de
l’empire.
    Il y a donc des indices nets d’une dégradation
du mandarinat à l’époque des Song et plus précisément au XIII e siècle. La puissance des relations
familiales et des relations de clientèle, les luttes
de factions rivales à la cour, la soif de richesses,
les progrès de la corruption, voilà autant de
causes de cet avilissement relatif. Cependant, les
concours de doctorat attirent un nombre toujours
croissant de candidats. Etre fonctionnaire civil,
c’est ouvrir à sa famille la voie des honneurs et
de la considération. Aucune carrière n’est plus
noble ni plus enviée. Un fonctionnaire de grand
mérite a quelque chance de recevoir après sa
mort un titre posthume ou même d’avoir sa biographie incluse dans les Annales dynastiques.
A tout le moins, sa stèle funéraire restera un
témoignage durable de sa gloire, et cette gloire
rejaillira sur ses descendants.
    Malgré les oppositions qui se font jour à l’intérieur de leur groupe, les fonctionnaires-lettrés
forment une petite caste unie par des intérêts
communs. Leur culture littéraire et artistique, la
politesse de leurs mœurs, leurs privilèges enfin
les distinguent des gens du commun envers lesquels ils

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