La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
honorifique et perçoive alors
une pension égale à la moitié du traitement
prévu pour ce poste. Dans tous les cas, il n’y a
pas de pension de retraite régulière, car il est
admis, en vertu des principes traditionnels, que
les enfants doivent entretenir leurs parents sur
leurs vieux jours.
Le fonctionnement des concours atteint à la
perfection à l’époque des Song (960-1279) et,
d’autre part, l’avancement des fonctionnaires est
réglé par un ensemble de critères objectifs qui
les mettent à l’abri de toute injustice et favorisent les meilleurs d’entre eux. Le très grandnombre des candidats aux concours – ils sont
plusieurs milliers par province – est une preuve
claire de la diffusion de l’instruction à cette
époque, surtout dans les provinces du Sud-Est
(actuels Zhejiang, Jiangsu et Fujian) d’où proviennent les candidats les meilleurs et les plus
nombreux. Bien que la moitié des reçus soient
fils ou petits-fils de fonctionnaires, le recrutement est beaucoup plus large qu’aux époques
antérieures et, de toute évidence, de nouvelles
couches sociales ont pu accéder à la carrière
prestigieuse de fonctionnaire-lettré 4 .
Mais ce tableau a son envers. Les concours de
doctorat ne sont pas la seule voie d’accès à la
fonction publique, et les promotions ne sont pas
toujours régulières. Nombreux en effet sont les
fils, parents ou amis de personnages haut placés
qui ont été nommés par protection, et dont
l’avancement trop rapide n’est pas justifié par
leurs mérites. Un système de recommandation
qui, dans le principe, visait à tirer de l’ombre les
talents cachés en assurant des promotions rapides
à des fonctionnaires obscurs mais de grande
valeur a été détourné de son objet. Il profite en
fin de compte à la clientèle des grandes familles
et il est devenu l’instrument du népotisme.
D’autre part, la vénalité des titres et des charges
est un expédient auquel le pouvoir central
recourt assez fréquemment pour remédier à desdifficultés permanentes de trésorerie. L’avènement d’une classe de très riches marchands a
porté une grave atteinte aux prérogatives du
mandarinat et de la noblesse impériale. Il y
avait en effet, traditionnellement, tout un
ensemble de lois qui réglementaient le costume, le logement, les insignes et l’ensemble
du train de vie 5 . Mais la puissance des marchands parvenus a réduit peu à peu les différences hiérarchiques entre les détenteurs du
pouvoir politique, les personnes anoblies en
récompense de leurs mérites exceptionnels, les
parents de la famille impériale, en un mot tous
les membres des hautes classes d’une part, et
les familles enrichies dans cette activité vile et
méprisée qu’est le commerce d’autre part.
Certains riches marchands ont un train de vie
égal ou supérieur à celui des plus hauts mandarins. Cependant, c’est une nécessité pour l’Etat
que d’assurer à ses fonctionnaires le prestige le
plus éclatant.
Il y a plus. La menace des Mongols, leurs
incursions dans les provinces du Nord vers la fin
de la dynastie obligent à maintenir sur le pied de
guerre une très nombreuse armée. Les dépenses
somptuaires de la cour, l’appauvrissement général de la Chine, le déficit de sa balance commerciale sont la cause d’une inflation de plus en
plus précipitée et d’une crise de trésorerie dramatique. Les fonctionnaires, trop nombreux,sont mal payés. Aussi, la corruption progresse-t-elle de jour en jour, non seulement au niveau
des petits employés de recrutement local chez
lesquels elle avait sévi de tout temps, mais
même aux plus hauts échelons administratifs.
Un exemple suffira : il existait à Hangzhou un
dispensaire de drogues pharmaceutiques destinées aux gens du peuple. Cette institution dont
la fondation remontait au début du XII e siècle
recevait une subvention annuelle de plusieurs
centaines de millions de sapèques qui était avancée par le ministère des Finances et remboursée
ensuite par le trésor privé de l’empereur. Le personnel administratif et celui des préparateurs
étaient formés de fonctionnaires et d’employés
de l’Etat. Or, cette institution charitable fut l’occasion de trafics éhontés. Détournements de produits et substitutions frauduleuses étaient
continuels. Dès qu’une drogue était prête, des
fonctionnaires de la cour et « tous ceux qui
avaient quelque pouvoir » s’en emparaient. La
cour n’en savait rien
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