La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)
Alors, dit-on, la peau de leur
visage, maintenue longtemps à l’abri du soleil
et du vent, avait la beauté du jade 26 . Cependant,
de tout temps à Hangzhou où la température est
plus clémente, le maquillage des dames est
composé d’un fond de teint blanc et d’une
poudre rose foncé qui est disposée sur les pommettes. Les femmes de Hangzhou prennent également grand soin de leurs ongles. Elles les
teignent avec un produit à base de feuilles de
balsamine rouge pilées avec de l’alun. La couleur, tout d’abord assez pâle, s’accentue au bout
de plusieurs applications, et cette teinture reste
ensuite indélébile pendant plusieurs semaines.
« Actuellement, dit un auteur, les vieilles dames
se teignent ainsi les ongles tous les soixante ou
soixante-dix jours. Mais les femmes musulmanes adorent cette teinture, et il y en a qui s’en
appliquent même sur toute la main. Certaines
personnes s’amusent aussi à teindre chats et
chiens avec ce produit 27 . » Les dames se servent
volontiers d’huile pour entretenir leur chevelure
et lui donner de l’éclat. On cite le cas d’une
jeune femme fort coquette qui, pour s’être servie
d’une huile qui ne convenait pas à un pareil
usage, vit ses cheveux se coaguler en une massesi compacte et si solide qu’elle n’eut d’autre ressource que de se tondre 28 . Un autre usage, connu
en Chine dès avant notre ère, rappelle une mode
répandue en Europe avant la dernière guerre.
C’est l’épilation et le remplacement des sourcils
par un trait noir au crayon, ce qui permet de
donner au visage une expression souvent impersonnelle, mais qui est jugée généralement plus
agréable.
Le bandage des pieds des fillettes est un autre
moyen pour corriger la nature : les petits pieds
atrophiés donnent plus de grâce à la démarche.
Le bandage des pieds semble n’apparaître en
Chine que dans le courant du X e siècle 29 . Peut-être cette pratique n’est-elle pas encore très
répandue à Hangzhou trois siècles plus tard.
Peut-être reste-t-elle employée surtout pour les
fillettes qu’on destine à la vie galante.
Dans tous les cas, les dames de la haute
société, les femmes des riches marchands et les
courtisanes prennent toutes un soin extrême de
leur beauté et de leur parure. Elles renferment
leurs cosmétiques, leurs bijoux et leur miroir en
métal poli dans des coffrets en bois laqué, en
jade, en or ou en argent, et portent suspendues à
leur ceinture des bourses à parfums.
LE VÊTEMENT
La fonction essentielle attribuée au vêtement
en Chine est de protéger contre le froid. Les
moyens de chauffage sont en effet rudimentaires
même dans les maisons riches et, chez les
pauvres, ils sont presque inexistants dans la
Chine du Sud-Est. Le charbon y est rare et coûteux. Aussi compte-t-on beaucoup sur les vêtements doublés de bourre de soie, et sur les
pelisses au moment des grands froids. Mais le
costume est aussi l’un des signes de distinction
sociale les plus évidents. Dans la classe dirigeante, le vêtement témoigne, au même titre que
les insignes, le nombre et la qualité de l’escorte,
de la position hiérarchique de l’individu. La couleur et les dessins de la robe, la forme et le type
du bonnet, le genre de la ceinture, tous ces
détails sont fixés pour chaque usage et pour
chaque grade par des ordonnances impériales en
fonction de considérations rituelles.
Il existe, dans les histoires officielles, des traités qui sont uniquement consacrés à décrire dans
leurs moindres détails les costumes, les bonnets,
les ceintures, les voitures, les sceaux de l’empereur, de ses proches, des grands personnages de
la cour et des autres fonctionnaires. Un grand
nombre de décrets sont relatifs à ces questions
qui nous semblent, à nous modernes, d’un intérêt
mineur. Elles ne l’étaient pas pour les Chinois,car cette étiquette minutieuse visait à la fois à
une réglementation des dépenses et à des effets
psychologiques. Elle entretenait un attachement
vivace aux signes extérieurs du prestige et, par
l’importance même qui lui était attribuée, elle
influait sur les sentiments. Elle visait, selon l’expression chinoise, à mettre en accord l’intérieur
et l’extérieur. Pour croire, rien de mieux que de
se plier d’abord et sans réticence aux gestes
rituels qu’accomplissent les croyants : la foi
viendra de surcroît et sans qu’on l’ait sollicitée.
Seule l’armée, avec ses grades, ses uniformes
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