Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)

La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition)

Titel: La vie quotidienne en chine: A la veille de l'invasion mongole (1250-1276) (Picquier poche) (French Edition) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: JACQUES GERNET
Vom Netzwerk:
un dicton, « que deux fois dans leur vie : à
leur naissance et à leur mort 18  », car ce sont là
des lavages rituels obligatoires. Mais la région
de Hangzhou est au contraire l’une de celles où
le goût des bains est le plus vif. La ville elle-même et ses habitants sont propres. Les parasites
sont rares, alors que dans la Chine du Nord et
dans les régions de l’intérieur puces et poux sont
les hôtes permanents de l’homme. Un auteur qui
cite les différents moyens pour se débarrasser
des poux raconte avoir vu à Yanzhou (petite
ville située à 150 km en amont de Hangzhou sur
le fleuve Zhejiang) une jeune femme fort élégante et richement parée, propriétaire d’une
belle maison de thé dont la porte était laquée en
or – signe évident de richesse – qui faisait la
chasse aux poux. Ses vêtements étalés sur une
petite table, elle jetait dans sa bouche tous les
poux qui lui tombaient sous la main. Et cette
opération était menée avec tant d’adresse et si
rapidement qu’elle n’arrêtait presque pas de porter sa main à sa bouche. Or, ajoute notre auteur,
les gens qui étaient là s’en amusaient et n’en
étaient pas offusqués le moins du monde : la
chose leur semblait toute naturelle 19 .
    Une très ancienne coutume voulait que, dans
les hautes classes, on prît un bain chez soi tous
les dix jours, et ce bain était l’occasion d’uncongé pour les fonctionnaires. On se lavait alors
non seulement le corps mais les cheveux. Aussi
le traitement d’un fonctionnaire fut-il appelé
« émoluments du bain et du lavage des cheveux »
et le terme de bain finit par prendre le sens de
décade, les bains supérieur, moyen et inférieur
désignant les trois décades de chaque mois. Bain
et lavage des cheveux constituaient une opération importante au cours de laquelle il n’était pas
contraire aux règles de la politesse de faire
attendre les visiteurs. Pour tout dire, c’était une
sorte de rite qu’il est permis de rapprocher de
tout un ensemble d’ablutions à fins rituelles plus
nettement caractérisées : bains pris avant les
audiences impériales par les fonctionnaires qui
sont autorisés à approcher l’empereur, bains
purificateurs pris avant les sacrifices importants,
bain du nouveau-né, bain pris avant le mariage,
lavage rituel du cadavre avant son habillement.
    La fréquence des bains à Hangzhou et dans
les régions méridionales de la Chine s’explique
sans doute par d’anciennes pratiques paysannes
mieux conservées dans le Sud que dans le Nord.
Les fêtes d’accordailles chez les populations non
chinoises des provinces du Sud comportaient
encore une baignade en commun des garçons et
des filles dans les eaux fécondantes d’une rivière
ou d’un lac, rite connu de la Chine ancienne
telle que l’ont révélée les Fêtes et chansons de
Marcel Granet. Mais la pudibonderie nordique,qui s’est imposée à toutes les classes dirigeantes,
reste très hostile à ces baignades où hommes et
femmes se trouvent réunis. Les Chinois de
bonne éducation ne se baignent pas en présence
d’une femme ou d’un proche d’une autre génération. Cette pudeur, qui est poussée à son plus
haut degré chez les lettrés-fonctionnaires, n’exclut d’ailleurs pas un goût très prononcé pour les
raffinements érotiques et pour les jeux amoureux
à l’occasion des bains. Cette attitude pudibonde,
qui est en fait très répandue, rend compte de la
remarque d’un auteur du XIII e siècle à propos des
coutumes du Cambodge. Les Cambodgiennes,
dit-il, aiment beaucoup à se laver nues dans les
étangs, et les marchands chinois du pays viennent
en groupe les regarder 20 . Si la signification religieuse des bains subsiste dans certains usages
définis, à Hangzhou, on se baigne le plus souvent pour le plaisir. Il y a, dans la ville, un très
grand nombre d’établissements de bain signalés
par un pot suspendu au-dessus de la porte. A son
passage à Hangzhou en 1072, le pèlerin japonais
Jôjun qui pénétra dans une de ces maisons de
bain note dans son journal de voyage que le prix
d’entrée était de dix sapèques 21 . Au dire de
Marco Polo, ces entreprises commerciales auraient
été au nombre de trois mille, et chaque établissement aurait pu recevoir à la fois cent baigneurs.
On pouvait sans doute s’y faire masser, y boire
du thé ou de l’alcool, et il est à présumer que laprostitution n’était pas absente de ces lieux.
Fréquentés presque journellement

Weitere Kostenlose Bücher