La ville qui n'aimait pas son roi
essayé de l’embrasser?
Il se leva.
— Madame, je sais que vous êtes sa tante, je lui ai demandé de m’épouser. Raisonnez-la, je vous en prie.
Il la salua et partit.
Au début du mois de mars, comme il était revenu à Blois avec son épouse et ses deux enfants, Nicolas Poulain apprit que son
malheureux père emprisonné avait été désigné comme roi sous le nom de Charles X par l’assemblée de la Ligue. Comme le cardinal
ne pouvait régner, les ligueurs, qui s’étaient baptisés Conseil de l’Union, avaient désigné le duc de Mayenne Lieutenant général de l’État royal et Couronne de France . Il avait même prêté serment devant un parlement réduit à sa plus simple expression.
Le premier acte de Mayenne fut cependant de remettre en liberté la plupart des présidents et conseillers que Le Clerc avait
emprisonnés, à l’exception du premier président, car sa sœur lui avait expliqué son dessein concernant le roi. Dessein qu’il avait approuvé, après y avoir bien réfléchi.
Ayant appris que Mayenne avait repris le rôle de son frère, nul ne doutait à la cour que les Lorrains allaient lancer une
offensive militaire contre Blois. Le roi jugea donc prudent de quitter cette ville mal protégée pour Tours, bien fortifiée
par de solides remparts.
Tandis que la cour se préparait au départ, Nicolas Poulain reçut une visite. Baron de Dunois, il avait commencé à monter sa
maison dès le début du mois de janvier. Jusqu’alors, il avait eu à son service un seul valet de chambre nommé Charles dont
il était très satisfait. Il lui avait donc demandé d’engager quelques serviteurs, et lui-même choisit cinq hommes d’armes
qui l’accompagneraient à Rouen. Trois étaient des frères qui venaient de Bourges où ils avaient été quelque temps au service
d’un riche drapier, l’un d’eux était marié et sa femme cherchait une place de domestique. Les deux autres gardes étaient des
anciens du régiment de Picardie : un piquier et un arquebusier.
Le nouveau baron de Dunois avait aussi besoin d’un logement, et comme beaucoup de maisons étaient libres avec la fin des États
généraux et le départ des ligueurs, il en avait trouvé une non loin de l’hôtel Sardini.
C’est là qu’on vint donc frapper à sa porte un soir de la fin mars. Le concierge fit entrer un homme à longue barbe, casqué,
cuirassé, solidement armé. C’était le baron de Rosny. Nicolas le reçut dans sa chambre en compagnie de son épouse, car il
jugeait que, maintenant baronne, ses amis devaient la connaître.
Après s’être mutuellement accolés et embrassés, Maximilien de Rosny expliqua la raison de sa présence.
— Monsieur Poulain, personne ne sait que je suis à Blois. C’est à l’hôtel Sardini que l’on m’a dit où vous trouver. J’ai besoin de rencontrer le roi.
— Mais vous pourriez demander audience, monsieur! Le duc de Guise n’est plus là pour vous chercher noise!
— Non, mon ami, on doit ignorer ma présence. Je viens proposer à Henri III une alliance de la part de mon maître.
— Ce n’est pas la première fois, soupira Poulain, mais le roi a toujours refusé, à tort selon moi.
— En effet, seulement il n’aura bientôt plus le choix. J’arrive de Rosny. Tout le monde sait à Paris que Mayenne part en campagne. Il se dirige par ici.
Nicolas comprit le danger.
— Quand voulez-vous voir le roi?
— Le plus tôt. Le temps joue contre moi et, plus je reste, plus facilement je serai reconnu. Ce soir serait-il possible?
— Sans doute. Je peux obtenir ça de M. de Rambouillet qui est le gentilhomme de service à la garde au château.
Ils partirent sur l’heure. M. de Rambouillet était un homme droit. Connaissant Rosny, il ne posa aucune question et les introduisit
auprès du roi qui se trouvait dans son cabinet vieux avec le seigneur d’O et le maréchal d’Aumont. Henri III demanda à Poulain
de rester tandis que Rosny expliquait la proposition de son maître de mettre son armée au service du roi de France en échange
d’une lettre d’accord et d’une ville de sûreté afin de garantir le libre passage sur la Loire.
Rambouillet et Aumont approuvèrent la demande, O resta silencieux et le roi refusa.
— Sixte Quint me menace d’excommunication, monsieur de Rosny, dit-il. Je suis ici sous la double surveillance de M. Morosini et du duc de Nevers, tous deux au service du Saint-Siège. Que cette
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