Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
tirai sur le
plus proche une fois et tout aussitôt sautant à bas de la tombe, je m’abritai
derrière elle tandis qu’éclatait autour de moi une assourdissante escopeterie.
    Quand la fumée
s’en fut dissipée, je risquai un œil au-dessus de la tombe et ne vis que deux
corps étendus et au-delà, le feu flambant et grésillant et rien d’autre. Mais
craignant quelque ruse, je criai en oc à Pissebœuf et Poussevent de ne bouger
mie et d’espérer.
    — Quelle
étrange parladure est-ce là ? dit Tronson, qui s’était de moi rapproché.
    — C’est
patois de pays, dis-je, bien connaissant l’ignorance des Parisiens touchant nos
provinces du Midi, et ne voulant pas prononcer le mot oc qui pour eux
était quasi synonyme de huguenot, afin, ajoutai-je, de n’être point entendu des
lansquenets qui, se peut, auraient compris mon français.
    — C’est
bien pensé, dit Tronson gravement.
    — Moussu,
cria Pissebœuf en oc, peux-je aller reconnaître ?
    — Va,
brave Pissebœuf ! cria-je, et recommande à tes galapians de ne point faire
feu, quoi qu’il advienne.
    Recommandation
que je répétai en français à haute voix pour le bénéfice de tous, ne voulant
pas qu’on me tue mon Pissebœuf par des tirs hasardeux. Mais quant à moi et
Miroul qui avait rechargé, et je gage aussi quant à Poussevent sur mon aile
senestre, nous restâmes fort vigilants, l’œil fiché sur les corps immobiles et
le doigt sur la détente. La Dieu merci, il ne se passa rien, et pas d’autre
noise que le glissement furtif de Pissebœuf parmi les tombes et le feu
sinistrement grésillant de toute la graisse qu’il recevait.
    — Ville
gagnée ! cria Pissebœuf, qui aimait à tout grossir.
    Même alors je
ne voulus point que personne branlât avant d’y aller voir moi-même, et Miroul
me suivant, je lui dis de se poster avec Pissebœuf sur le mur écroulé afin
d’éviter un retour des quatre lansquenets enfuis, toute cette grande
mousqueterie des nôtres n’ayant fait que deux morts et cette « ville
gagnée » se réduisant à un grand feu qui rôtissait, que je le dise enfin,
le cœur au bord des lèvres, non point un enfantelet, mais une garce.
    Sur un signe,
le reste de la troupe me vint rejoindre et je leur dis de ramasser les armes
par lesquelles il se pourrait faire que le capitaine des lansquenets identifiât
ces scélérats. Cependant, comme ils obéissaient, on entendit tout soudain une
faible voix de femme crier dans l’ombre :
    — À
moi ! À mon rescous !
    Ce qui frappa
mes compagnons de male peur et terreur.
    — Monsieur,
dit Guillaume, les lèvres tremblantes, la garce a parlé, toute rôtie qu’elle
est !
    — Sottise,
Guillaume ! dis-je, comment parlerait-elle, ayant la tête coupée ? Et
cette broche enfoncée par le mitan du corps !
    — Monsieur,
oyez ! dit un autre qui me parut si pâle sous la lune que je crus qu’il
allait pâmer.
    — Monsieur,
dit Guillaume à Tronson, ne voilât-il pas d’un autre miracle !
Ramentez-vous l’aubépine de la Saint-Barthélemy qui fleurit en août !
La morte parle, la tête coupée !
    — Paix-là,
coquefredouille ! dit le maître menuisier Tronson, paonnant, mais à ce que
je vis, fort mal assuré en son assiette. Si femme de Paris a bon bec, peut-elle
parler sans bec du tout ?
    — Voire
mais ! dit Guillaume, se peut que la pauvrette se croie jà en enfer, étant
par les flammes rôtie, et appelle au secours !
    — Monsieur,
dit un autre en me poignant le bras d’une main fort trémulante, elle parle
derechef, oyez !
    Et en effet,
s’élevant de l’ombre une voix de femme, distincte, pressante, encore que fort
faible, et comme étouffée, appelait au rescous et cette fois sans discontinuer.
    — Cela ne
vient pas de la morte, dit un compagnon menuisier, mais de la terre.
    — Monsieur
mon maître, dit Guillaume, la voix blèze et bégayante, avec votre bénigne
permission, je m’en vais ! Miracle se peut, mais de Satan ! Si une
voix de femme peut saillir de terre, alors c’est que la terre se peut déclore
tout soudain et nous engloutir tous !
    — Paix-là,
pendard ! dit Tronson, pâle mais piaffant, es-tu si déshonté ? Ventre
Saint-Antoine, qui a peur céans d’une petite voix de garcelette le dise !
Et qu’il s’ensauve la queue entre les gambes et la chausse foireuse ! Je
ne le connais plus !
    À quoi tous
s’accoisèrent qui tous, pourtant, tremblaient, sauf mon Miroul et se peut, nos
deux

Weitere Kostenlose Bücher