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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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qu’il s’en faut saisir et s’en assurer, les autres, plus
méchants et plus audacieux, qu’il me faut dépêcher, car, opinent-ils, tels
oiseaux que moi ne valent rien à garder en cage !
    Une longue et
angoissée silence suivit ce discours, lequel me laissa pantois, tant Navarre me
parut exagérer les complots qu’on tissait contre lui dans son propre camp,
lesquels ne pouvaient être le fait que de quelques brouillons, Henri étant si
aimé et respecté par sa noblesse et ses soldats. Et comme je m’en étonnai en
mon for, il me sembla, cependant, entendre, à une certaine lueur que je surpris
dans l’œil de Sa Majesté, tandis qu’Elle envisageait Rosny, que cette
exagération ne laissait pas d’être voulue, comme si le roi, en plongeant son
plus fidèle serviteur dans les craintes et alarmes, eût désiré l’amener à se
prononcer plus nettement sur le sujet de sa conversion que Rosny n’avait fait
jusqu’à ce jour. Si c’était bien là l’adroit propos de Sa Majesté, il faut bien
avouer qu’Elle réussit à merveille, car Rosny, ayant de prime pâli, puis rougi,
dit avec une véhémence assez éloignée de sa coutumière circonspection :
    — Ha !
Sire ! De vous conseiller d’aller à messe, c’est chose que vous ne devez
pas, ce me semble, attendre de moi, étant huguenot !
    Ayant fait
cette déclaration à seule fin de rassurer sa propre conscience, et celle-ci se
trouvant apazimée, pour le moins verbalement, Rosny poursuivit en donnant au
roi le conseil même qu’il venait de refuser si hautement de lui bailler.
    — Mais,
Sire, reprit-il d’une voix nette et résolue, si vous dirais-je bien, cependant,
que la messe est le plus court, le plus prompt et le plus facile moyen pour
dissiper en fumée les méchants projets qu’on tisse contre vous. Car, Sire, il
le faut dire clairement à la parfin : vous ne parviendrez jamais à la
paisible jouissance de votre royaume que par deux moyens : par le premier,
qui est la force des armes, il vous faudra user de sévérités, violences et
rigueurs qui sont toutes contraires à votre inclination ; passer, en
outre, par un milliasse de périls, de peines et de travaux ; avoir
continuellement le cul sur selle, le corselet sur le dos, le pistolet au poing
et, qui plus est, dire Adieu repos ! Chiens ! Chasse !
Amours ! Maîtresse ! (À quoi Henri Quatrième sourit.) Au lieu. Sire,
que par l’autre voie, qui est de vous accommoder, touchant la religion, à la
volonté du plus grand nombre de vos sujets, vous ne rencontrerez pas tant de
traverses, du moins en ce monde-ci.
    — Et dans
l’autre ? dit le roi en levant le sourcil d’un air mi-sérieux,
mi-gaussant.
    — Ha !
Dans l’autre, dit Rosny en riant, je ne vous en réponds pas !
    À quoi le roi
rit à gueule bec, puis se mettant sur son séant il se gratta la tête (geste
qu’il avait accoutumé à faire, quand il balançait ou contrefeignait de
balancer, en son esprit) et dit à la parfin :
    — Tout ce
que vous dites est vrai, mon ami. Il n’empêche que touchant les deux moyens que
vous envisagez, je vois tant d’épines des deux côtés qu’il ne se peut que
quelques-unes d’ycelles ne me piquent bien serré. Car d’une part, les seigneurs
que vous savez, et qui sont dans mon camp, me pressent incessamment de me faire
catholique, faute de quoi ils menacent, de façon voilée ou découverte, de
former un tiers-parti. Mais d’autre part, Turenne et La Trémoille, et autres
seigneurs huguenots menacent de remuer prou, si je me fais catholique. Pis
même : Ils feraient, disent-ils, par une assemblée, élire un protecteur de
l’Église réformée : Contre-pouvoir que je ne saurais souffrir. Et s’il me
fallait leur déclarer la guerre, ce me serait le plus grand dol que je saurais
jamais recevoir, mon cœur ne pouvant souffrir de faire mal à ceux qui ont si
longtemps couru ma fortune et employé leurs biens et leurs vies à défendre la
mienne.
    Ce discours,
qui était à la fois ferme et habile – car tout en disant qu’il ne
tolérerait pas une rébellion huguenote, le roi témoignait d’un grand
attachement à ses coreligionnaires – produisit sur Rosny un effet inouï.
Saisissant les mains du roi, il les baisa à plusieurs reprises en versant les
pleurs (lesquels n’étaient pas chez lui si faciles que chez son maître) et dès
qu’il put retrouver sa voix, s’écria avec les accents du plus profond
émeuvement :
    — Ha !
Sire ! Je me

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