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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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dix ensemble : bravoure qui
m’émerveilla.
    Au bout de
deux grosses heures qui me durèrent un siècle, le combat s’alentit et à la parfin,
les ligueux se retirèrent, laissant deux cents d’entre eux sur le terrain,
lesquels nous enterrâmes à côté des nôtres, joints dans la mort comme ils
eussent dû l’être dans la vie, étant des Français naturels et sujets du même
roi. M. de Rosny, chancelant sur son cheval – lequel, ayant reçu un coup
de lance tout au travers du nez qui lui traversait la mâchoire, tenait encore
debout –, versa des larmes grosses comme des pois, quand on mit dans la
terre à ses pieds le pauvre page Moineau, duquel il avait coutume de dire qu’il
était trop fluet pour qu’une balle l’atteignît jamais.
    À peine
avait-on porté tous ces pauvres gens en la froidure et obscurité de la glèbe,
que le ciel noircit comme démon. Et creva alors sur nous la plus violente pluie
qui fût jamais, laquelle nous traversa et transperça, n’ayant sur nous que nos
cuirasses, tant est que tout suants que nous étions de la chaleur du
chamaillis, nous devînmes tout ruisselants, et dehors et dedans, de ce déluge.
Cette incommodité porta à son comble la mésaise, tristesse et fatigue où nous
étions et redoubla notre appétit à nous loger, à nous repaître, à nous
remettre. Mais comme nous cherchions bourg ou village où nous rafraîchir,
parvint à M. de Châtillon un avis très certain que Mayenne, ayant su notre
présence par ceux qui avaient réchappé du combat, suivait nos traces avec douze
cents cavaliers. Je gage que Châtillon, à cette nouvelle, dut âprement
regretter les cinq cents arquebusiers à cheval qu’il avait dépêchés sur
Chartres. Mais de toute guise, nous ne pouvions rêver d’affronter Mayenne,
recrus que nous étions et quasiment sans estoc, ni poudre pour nos pistolets,
et les chevaux si las que c’est à peine s’ils pouvaient mettre un sabot devant
l’autre. Toutefois, sur la décision que nous prîmes de chevaucher toute la nuit
sans démonter pour gagner Beaugency qui était au roi, les pauvres et vaillantes
bêtes nous portèrent encore jusque-là, chancelantes et trébuchantes.
    À la parfin,
Beaugency nous ouvrit ses portes à la pique du jour, et qui mieux est, les
referma et reverrouilla derrière nous. Au gîte que l’on nous donna, M. de Rosny
et moi parvînmes si affamés, si altérés et la paupière si lourde que nous ne
savions lequel de ces besoins nous devions de prime satisfaire. Cependant,
Rosny, ayant commandé à son écuyer La Vergne de nous quérir viandes et vin,
s’affala sur l’unique coite, où je le rejoignis incontinent, tous deux sur le
ventre, le cul nous brûlant et ardant d’une trotte sans démonter ni
discontinuer d’un jour et de deux nuits. À peine jetés là, nous ronflâmes à
tels poings fermés que La Vergne et Miroul n’ayant pas failli, en leur adresse,
à nous quérir la collation commandée, faillirent tout à plein à nous
désommeiller pour la manger, tant est qu’ils l’avalèrent eux-mêmes à belles
dents, avant que de s’écrouler sur le plancher, endormis à leur tour comme
plomb et sans même s’ôter de dessus le corps corselet et morion.
     
     
    Le roi de
Navarre était à Beaugency et sur le midi du lendemain, nous ayant fait quérir,
La Vergne et Miroul nous tirèrent à la parfin de notre endormissou et gagnant
le logis du roi, titubant encore de lassitude, nous trouvâmes Navarre qui
conversait amicalement avec Châtillon, le bras passé dessous son bras, lequel
bras, à la vue de Rosny lâchant, il lui bailla tout de gob une forte brassée,
et à moi aussi, me laissant tout béant de cet honneur, d’autant qu’il ajouta de
sa voix gasconne et enjouée :
    — J’ai
bien ouï de vous, Monsieur de Siorac, et en honneur, en ce combat de
Bonneval ! À père vaillant, fils intrépide !
    — Trop,
dit Rosny avec un sourire. Il lui faudrait passer la bride.
    — Je
m’émerveille ! C’est vous qui dites cela, Rosny, mon ami ? dit
Navarre. Vous qui êtes toujours le premier à la mêlée et le dernier à la
quitter !
    — C’est
que je vous imite, Sire, dit Rosny, reprenant un débatement qui était
coutumier, comme je l’appris plus tard, entre le roi et lui, chacun gourmandant
l’autre de se hasarder trop au combat.
    — Or,
laissons cela ! dit Navarre. Et que tout soit liesse, ce jour ! Pour
ce que je viens d’apprendre, mon Rosny, que le brave La Noue,

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