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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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possédée, et ayant failli à la faire
exorciser par un capucin de Montpellier, craignit qu’on ne la brûlât vive comme
étant habitée par le diable, et la serra dans un couvent dont, après quelques
années, le jésuite Samarcas, ayant établi sur elle une complète domination, la fit
sortir, curée apparemment de ses folies. Avec le consentement de M. de
Montcalm, Samarcas, alors, se l’attacha au point qu’elle ne le quitta plus,
même en ses périlleuses expéditions à Londres, car plus encharné ligueux et
plus indéfatigable comploteur que ce jésuite jamais ne fut, lequel, à la
parfin, perdit la vie au milieu des toiles qu’il avait tissées, condamné à mort
par les juges d’Elizabeth et supplicié sur la place publique pour avoir pris
part à la conspiration de Babington. Ceci se passait dans le moment de ma
mission (dans les bagages du pompeux Pomponne) à Londres, et tant fut
satisfaite la reine de mon secret message qu’en récompense de mon truchement,
elle voulut bien déclore Larissa de sa geôle où, comme complice et connivente
de Samarcas, on l’avait enfermée et me permit de la ramener en ce royaume, où
le maître en fait d’armes Giacomi, qui en était de longue date raffolé, la
maria.
    Je fus à la
vérité fort soulagé de ce mariage pour ce qu’il mit fin à la mésaise où me
jetait avec Larissa un commerce ambigueux. Et comment eût-il pu ne pas être
tel, ni mon cœur ni mon corps ne pouvant rester à elle tout à plein
indifférent, Larissa étant si étrangement semblable à mon aimée et se voulant
en outre tant identique à elle que l’amour que je trouvais dans l’œil de mon
Angelina, je rencontrais coutumièrement dans le sien, mais sans la réserve et
pudeur que mon épouse y mettait, mais bien au rebours, criant et appétant. Ces
regards, si fort que je les réprouvasse, ne manquaient pas de me troubler, et de
ce trouble concevant des remords, je ne laissais pas de garder à Larissa
quelque mauvaise dent de ce qu’elle les eût provoqués et, me cuirassant
d’autant, je mettais entre elle et moi une distance et une froidure qui
n’étaient assurément point en mes sentiments, et dont Angelina, dans sa
colombine innocence, me faisait parfois reproche.
    Le lendemain
du jour qui m’apporta de si larmoyables nouvelles, M. de Rosny me vint visiter
pour se condouloir de prime avec moi, et pour me dire ensuite que le roi, levant
le siège de Paris faute d’une armée suffisante pour le poursuivre et s’en
allant se remparer à Dieppe, il avait quis de lui et obtenu mon congé, pour que
je pusse aller convalescer en ma seigneurie du Chêne Rogneux en Montfort
l’Amaury et conforter ma famille des pertes qu’elle avait subies. En sa
coutumière et quasi paternelle bénignité de cœur (combien que je fusse de dix
ans son aîné) M. de Rosny me prêta une demi-douzaine d’arquebusiers pour
renforcer ma petite suite, et me recommanda de me bien garnir en pécunes pour
payer péage aux troupes papistes, sur lesquelles, en mon chemin, je me pourrais
buter. Mais la Dieu merci, je n’en encontrai pas la moindre, Mayenne, en ces
temps-là, battant tambour et sonnant trompettes, pour rameuter les zélés contre
leur légitime souverain.
     
     
    Mon cœur me
toqua en mon poitrail dilaté quand j’aperçus dans les brumes de l’aube les
tours de ma baronnie. Mon pauvre bien-aimé maître avait été avec moi tant
libéral à récompenser mes services que j’avais, au cours des ans, avec les
clicailles qu’il m’avait baillées, non point seulement étendu mes terres par de
judicieux achats, mais immensément fortifié le château même, au point de le
rendre inexpugnable, sauf par une troupe qui possédât canons. Je sais bien
qu’il n’est bons murs que de bons hommes, et que le plus abrupt rempart n’est
rien, s’il n’est bien défendu. Mais justement, les six arquebusiers de Rosny,
ajoutés à mon domestique, faisaient une troupe d’une bonne vingtaine de gens de
pié, à qui je donnais Pissebœuf comme sergent et mon écuyer Saint-Ange, comme
capitaine, lesquels, de tout le temps que je fus là, les exercèrent
quotidiennement dans les murs et hors les murs, ce déploiement devant imposer
quelque respect aux ligueux circonvoisins. Il est vrai que les plus encharnés
d’entre eux avaient rejoint Mayenne, mi par zèle, mi par appétit de sac et de
forcement – comme s’était bien vu à Tours – et que ne restaient en le
plat pays que les plus

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