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La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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choit à terre.
    — Que fais-je maintenant ? dit Poussevent. Le
daguerai-je ?
    Mais c’était dit plutôt par manière de gausserie.
    — Fi donc, grosse brute ! dit Pissebœuf sur le
même ton. Je gage que le drole [53] n’est
même pas armé !
    Ce qu’il vérifia d’une main rapide. Après quoi, aidé de
Poussevent, il porta le quidam dans le confessionnal et je les entendis
discuter à voix basse pour savoir s’il valait mieux le mettre à la place du
confessé ou du confesseur. Mais celle-ci prévalut, Pissebœuf pensant qu’étant
donné son inertie, il serait plus facile d’asseoir l’homme que de
l’agenouiller.
    — Quand même ! dit Poussevent. À la place du
prêtre ! C’est ton idée, et tu porteras seul le poids de ce péché-là.
    — Bah ! dit Pissebœuf. Un de plus ! J’en ai
déjà un bon petit paquet pour me tenir chaud cet hiver !
    Les soldats m’ayant donné le champ libre, j’eus tout loisir
d’envisager Philippote, qui me parut valoir tout à plein le dévisagement. Je ne
lui trouvai rien que d’aimable, y compris son prénom qu’à la voir je jugeai
plus fripon que ridicule.
    — Vous n’êtes point moine, Dieu merci ! dit
Philippote, cela se voit, et de reste, vous n’en avez pas l’odeur.
    Je lui remis le pli, lequel elle fourra dans son corps de
cotte d’un air gourmand, accepta sans façon les écus que je glissai dans sa
menotte, et me donna le bel œil. Mais je n’étais point là pour lui conter
fleurette, je la pressai de questions. Et sur sa maîtresse elle ne fut pas
chiche de détails, lesquels je jetai aussitôt dans la gibecière de ma mémoire
pour en repaître le Roi.
    J’en vins enfin au chapitre des espoirs. Sa belle maîtresse
s’apensait que son tourmenteur ne tarderait pas à baisser pavillon et à
rejoindre avec elle Fontainebleau, pour ce qu’il n’avait plus un seul sol
vaillant, Sully, sur le commandement du Roi, ne lui versant plus ses pécunes et
de leur côté, les usuriers juifs ayant appris, Dieu sait comment, que cette
source-là était tarie, ne lui voulaient plus rien prêter.
    Outre ses yeux vifs, son petit nez retroussé et son joli
cou, Philippote avait bon bec et elle aurait tenu le dé à jaser plus longtemps
si mon père ne m’avait mis la main sur l’épaule pour me faire lever le camp,
quelques soupirs et grognements s’échappant du confessionnal et indiquant que
notre assommé revenait à soi.
    — Dieu merci, dit mon père en franchissant d’un pas
allègre le porche de l’église, l’homme de Condé vous a vu et bien vu, mon
fils : vous voilà donc hors jeu et ce genre de mission est fini pour vous.
J’en suis fort aise. Se mettre au hasard de sa vie pour servir le Roi en ses
grandes affaires et pour le bien du royaume, cela est convenable à un
gentilhomme, mais se faire le fourrier de ses plaisirs n’est pas digne de votre
sang maternel, ni du mien.
     
    *
    * *
     
    Henri fut au comble de la joie quand je lui rapportai
l’espoir de la Princesse de se retrouver bientôt à Fontainebleau avec la cour,
son tourmenteur étant en train de fléchir. Il en fut à ce point transporté
d’aise que j’eus l’impression qu’il rajeunissait en un clin d’œil. Il me donna
une forte brassée et se mit à tourner et virer dans la pièce sans trop savoir
ce qu’il faisait, son bonheur éclatant dans ses traits et dans tous ses gestes
avec le naturel et la naïveté d’un enfant à qui on apporte un jouet auquel il a
longtemps rêvé. J’avais peine à croire que j’avais devant moi le plus grand
monarque, et assurément l’un des plus grands esprits, de la chrétienté.
    Son exaltation quelque peu calmée, il me prit les mains, me
fit asseoir sur un tabouret devant une chaire à bras où, s’asseyant à son tour,
il me pressa de lui conter par le menu, et surtout sans rien omettre, ce que
Philippote m’avait dit de la Princesse. Je lui rapportai ses propos mot à mot, ayant
eu le temps de me les bien mettre en mémoire depuis la veille et, pour rendre
la chose plus vivante, l’idée me vint d’utiliser mes dons de comédien et de
retrouver les intonations et les expressions de Philippote. Cela le ravit. Il
eut l’impression qu’en lui rendant au mieux le langage de la chambrière, je le
rapprochais de la maîtresse. Et ma récitation à peine finie, il me la fit
recommencer deux fois, sous le prétexte d’éclaircir des points qu’il avait mal
entendus.
    Quand il eut épuisé tout le plaisir

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