Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'abandon de la mésange

L'abandon de la mésange

Titel: L'abandon de la mésange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
Vom Netzwerk:
sec, elle sourit de voir en
activité ce joli jouet pour veuve et orphelines. Il leur arrivait d’y passer
tellement d’heures qu’elles se demandaient si ce n’était pas irresponsable
d’utiliser ainsi leur temps.
    Devant son désœuvrement, sa mère lui offrit
d’aller en Abitibi, chez son oncle qu’elle connaissait à peine. Elle refusa,
sachant que sa mère, malhabilement, voulait la distraire de son interminable et
incompréhensible attente.
    – Tu veux pas ? Ce serait bien que
tu voies tes cousins et leurs amis, que tu sortes un peu…
    – Je veux pas prendre le train, maman.
    – Il va bien falloir que tu le fasses un
jour.
    – Pas forcément. Il y a des autobus.
    Élise se mordit les lèvres. Elle aurait
évidemment accepté de faire une nouvelle tentative si cela avait été pour
retourner chez les Vandersmissen. Côme ne lui avait pas donné signe de vie et,
sournoisement, elle commençait à lui en tenir rigueur. C’est près de lui et de
ses parents qu’elle voulait être, pour plaider sa cause en expliquant son amour
et pour comprendre le silence qui l’enrobait. Malgré ses protestations, elle se
retrouva au terminus Craig du boulevard Dorchester.
    – Tu aurais été plus confortable en
train. Douze heures de route, c’est long.
    – Je suis mieux ici.
    Élise venait de se faire extirper du rêve de
sa vie. Toute l’année, elle avait attendu le retour de Côme et la récolte des
pommes de terre. Au lieu de fouiller la terre pour en tirer les tubercules,
c’est son âme qu’elle creusait pour y enfouir ses amours. Le visage inquiet de
sa mère lui apparut de l’autre côté de la fenêtre. Pour la rassurer, Élise posa
la main sur la vitre, et Blanche fit de même de l’extérieur. L’autobus commença
à reculer. Élise, assise sur le bout des fesses, prête à bondir, fit un pâle
sourire à sa mère tandis que celle-ci lui faisait au revoir de la main.
    Blanche suivit des yeux le mastodonte jusqu’à
ce qu’il s’enfonce dans la ville. Dans quatre heures, il serait dans le parc de
La Vérendrye. Elle ne vit pas pleurer sa fille qui tenait contre sa bouche la
carte de vœux de Côme, toujours protégée par son enveloppe. Elle ne vit pas
l’autobus s’arrêter ni Élise en sortir. Pas plus qu’elle ne la vit revenir au
terminus et prendre un autobus pour Drummondville.

– 10 –
     
     
    –  Mais enfin,
Élise, vous n’êtes quand même pas partie sans en aviser votre mère ?
    Élise était confuse. Si les Vandersmissen
furent étonnés de la voir arriver, ils furent davantage choqués d’apprendre
qu’elle avait, en quelque sorte, fugué.
    – C’est ici que je voulais être, pas en
Abitibi.
    Elle n’avait d’yeux que pour Côme, qui
semblait aussi décontenancé que ses parents, d’autant plus qu’il n’y avait pas
de place pour loger Élise puisqu’il avait accepté d’accueillir la cousine d’un
de ses collègues.
    – Françoise est venue pour la récolte de
pommes de terre.
    – J’aurais pu venir aussi.
    Élise regarda les mains de Françoise, qui lui
apparurent dangereusement propres.
    – Vous allez quand même manger avec nous,
mon petit.
    Élise aurait pleuré. Elle n’était pas venue
pour manger avec eux, mais pour la récolte. Elle était là pour les bras de
Côme, qui ne cessait de la regarder d’un air incrédule, sans sourire. Quant à
la cousine Françoise, elle ne cessait de se dandiner, ce qui énervait Élise.
    Elle était là aussi pour demander conseil.
Elle n’avait aucune envie de retourner aux études et elle voulait offrir ses
services. Apparemment elle n’était pas autant la bienvenue qu’elle l’aurait
souhaité.
    – Je vais repartir. Pardonnez-moi de
m’être imposée.
    – Pas du tout, pas du tout, mon petit.
C’est que…
    Côme l’emmena dehors. À peine furent-ils
éloignés qu’il lui mangea goulûment la moue.
    – Mais qu’est-ce qui t’a pris ? J’ai
cru mourir quand je t’ai aperçue. Je me suis dit que tu venais m’annoncer que
tu voulais rompre.
    – Rompre ?
    – Je croyais qu’on avait dit qu’on se
reverrait en mai soixante et un.
    – Pas vraiment. Moi, Côme, je ne peux pas
attendre aussi longtemps. Tu ne m’aimes visiblement pas autant que je t’aime.
    – Je t’aime comme un fou, mais j’ai une
famille à ne pas décevoir. Je t’aime tellement que si je te vois, je sais que
je vais tout lâcher pour être avec toi.
    – Et alors ?
    – Qu’est-ce que tu veux

Weitere Kostenlose Bücher