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L'absent

L'absent

Titel: L'absent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Rambaud
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l’arrière-garde, un escadron, avaient refusé de
suivre le mouvement suspect ; que Mortier demandait des instructions,
qu’il étirait son corps d’armée jusqu’à Corbeil afin de protéger Fontainebleau.
    Puis l’Empereur s’était couché.
    Il n’était pas levé, en fin de matinée, lorsque
Caulaincourt, les traits bouleversés, sortit d’une calèche qui venait de Paris.
Le duc se précipita vers les appartements de l’entresol, se cogna au premier
valet :
    — Je dois voir immédiatement l’Empereur !
    — Mais il dort…
    — Ça m’est égal ! Réveillez-le, monsieur Constant,
réveillez-le !
    Comme le valet de chambre n’osait pas une pareille
familiarité, Caulaincourt entra sans hésiter dans la chambre et, de sa main
rude, secoua le dormeur jusqu’à ce qu’il ouvre ses yeux encapotés et
soupire :
    — Ah ! Caulaincourt…
    Très dépeigné, le teint jaune, bouffi, l’Empereur se dressa
péniblement contre ses oreillers, puis il s’assit au bord du lit, les pieds sur
l’escabeau qui permettait d’y grimper. Constant accourut, il lui chaussa ses
vilaines pantoufles rouges, l’aida à enfiler une robe de chambre tandis que
Caulaincourt lui relatait sa malheureuse mission ; il lui expliquait
comment le tsar Alexandre avait changé de sentiments en apprenant la défection
du 6 e  corps d’armée, comment il rejetait la régence qu’il
soutenait jusqu’à présent contre les autres souverains, réclamait désormais
comme eux une abdication pure et simple, et l’exil, mais l’Empereur écoutait à
peine, il ne pensait qu’à Marmont, ce duc de Raguse qu’il croyait si dévoué :
    — Marmont ! disait-il, déserter devant
l’ennemi ! Et quand ? Au moment où notre victoire était
certaine ! Il foule aux pieds la cocarde nationale pour se parer du signe
des traîtres qu’il a combattus depuis vingt-cinq ans ! Qui aurait pu
croire cela de lui ? Je l’aimais, Caulaincourt. Un homme avec qui j’ai
partagé mon pain, que j’ai tiré de la misère, dont j’ai fait la fortune et la
réputation ! L’ingrat ! Il sera plus malheureux que moi, vous verrez.
    — Talleyrand a tout fait pour qu’il nous abandonne.
    — Talleyrand ? Pour lui, trahir c’était se sauver.
Son rôle était écrit. Il savait que j’avais voulu le faire arrêter, mais les
autres, quels intérêts avaient-ils à me trahir ? Et ce sont ceux que j’ai
le plus élevés qui me quittent les premiers : avant un an, Caulaincourt,
ils seront honteux d’avoir cédé au lieu de combattre, d’avoir été livrés aux
Bourbons et aux Russes !
    Caulaincourt lui raconta que Talleyrand avait envoyé à
Marmont, pour l’amadouer, son ancien aide de camp d’Égypte, Montessuy, costumé
en cosaque ; celui-ci caressa la vanité du duc de Raguse, il lui montra
qu’en désertant avec son armée lui seul pouvait épargner à Paris le pillage et
consolider la paix en Europe. Le maréchal avait donc signé une convention avec
l’état-major allié, mais en apprenant que l’Empereur abdiquait pour son fils,
que la régence était possible, il se ravisa, rentra à Paris dans la voiture de
Ney pour plaider sa propre cause devant les souverains étrangers. Hélas, il
avait confié l’armée à ses divisionnaires ; en son absence ils avaient
exécuté le plan initial et livré leurs régiments à l’ennemi.
    — Lorsqu’il a appris la défection, en même temps que
nous, le duc de Raguse s’est senti déshonoré.
    — Il l’est !
    — Le général Souham, qui le remplaçait, a convaincu ses
pairs…
    — Souham ? dit l’Empereur, il m’a hier réclamé six
mille francs, je les lui ai accordés. L’argent, l’ambition, leurs places, voilà
ce qui les mène, avec leurs cervelles de moineaux ! Les soldats ?
    — Arrivés à Versailles, ils ont réalisé le piège et se
sont mutinés, ils voulaient vous rejoindre, sire.
    — C’était trop tard…
    — Oui.
    Caulaincourt revint au récit de sa mission, il ajouta que
les alliés espéraient envoyer Napoléon au bout du monde, mais que lui, il avait
combiné avec le tsar un exil moins dur, sur une île au large de la Toscane,
parce que les côtes en étaient fortifiées et que…
    — Merci, Caulaincourt.
    D’un geste du menton l’Empereur congédia le duc de Vicence.
     
    Ney arriva quelques heures plus tard en compagnie de
Macdonald, il était passé à son hôtel parisien des bords de Seine, il avait
juré à sa femme d’empêcher

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