Labyrinthe

l'éclair, Alaïs tira son épée et, d'une rapide volte-face, frappa de taille le flanc du soldat qui était à sa portée. L'homme s'effondra. Le second s'élança et, dans une gerbe d'étincelles, se mit à croiser le fer.
    Bien qu'avantagée par sa position surélevée, Alaïs ne pouvait rivaliser ni par la taille ni par la force.
    Émergeant de sa cachette, Guilhem accourut et parvint jusqu'à elle au moment même où elle perdait pied. Le soldat se fendit, la touchant à l'intérieur du bras. Alaïs lâcha son épée en poussant un cri de douleur. Puis, à l'aide de son gant, tenta fébrilement d'endiguer le flot de sang qui coulait de sa blessure.
    « Mamà ! »
    En deux enjambées, Guilhem avait rejoint le soldat pour lui planter son épée dans la panse. Un flot de sang jaillit de sa bouche. Les yeux exorbités par le choc, il s'effondra.
    Ce répit ne laissa pas à Guilhem le temps de reprendre son souffle.
    « Guilhem ! le prévint Alaïs. Prenez garde derrière vous ! »
    Pivotant sur ses talons, il vit deux autres soudards escalader la côte en courant. L'arme haute, il décida de charger en poussant un hurlement de rage. La lame fendait l'air alors qu'il les repoussait, frappant au hasard et sans trêve, tantôt l'un, tantôt l'autre.
    Si bon bretteur que fût Guilhem, l'ennemi le dépassait en nombre.
    Sajhë était à présent à genoux, mains liées. Un soldat le surveillait, un couteau pointé sur son cou, pendant que le dernier des six allait prêter main-forte à ses compères. Alaïs perdait beaucoup de sang. Elle parvint cependant à tirer son couteau de sa ceinture et, au moment où l'homme passa à proximité, rassembla ses dernières forces pour le lui plonger dans la cuisse.
    Aveuglé par la douleur, l'homme poussa un affreux hurlement et fendit l'air de son épée. Guilhem vit Alaïs tomber en arrière et sa tête heurter violemment le rocher. Elle essaya de se lever, mais, chancelante et désemparée, s'effondra sur le sol, le sang ruisselant de son crâne fracturé.
    La dague toujours plantée dans la jambe, le soldat tituba en direction de Guilhem, tel un ours acculé dans un fossé. En voulant éviter sa charge, il glissa sur les pierres qui roulèrent en bas de la colline. Les deux assaillants mirent cet instant à profit pour le terrasser, et le clouer sur le sol, face contre terre.
    Comme l'un d'eux lui administrait un terrible coup de pied, il sentit ses côtes craquer. Les hommes redoublèrent de violence. Son corps sursauta sous l'intense douleur. Un goût de sang lui monta dans la bouche.
    Alaïs demeurait inerte, sans la moindre réaction. Guilhem releva la tête et entendit Sajhë pousser un cri, alors que le soldat qui le gardait le frappait du plat de l'épée, lui faisant perdre connaissance.
    Oriane avait disparu dans la grotte en entraînant Bertrande.
    Avec un hurlement de désespoir, Guilhem rassembla ses dernières énergies et, se remettant sur ses pieds, envoya rouler un des soldats en bas de la colline. Empoignant son épée, il l'enfonça dans la gorge du second, tandis qu'Alaïs se hissait sur ses genoux pour frapper le troisième avec son propre couteau.
    Guilhem prit conscience que tout était redevenu silencieux.
    Il demeura un instant immobile, fixant intensément Alaïs, comme s'il ne pouvait encore se rendre à l'évidence, et qu'il craignait qu'elle ne lui fût, une fois encore, enlevée. Finalement, il lui tendit la main.
    Leurs doigts s'enlacèrent. Il éprouva le contact de sa peau, déchirée et meurtrie, comme la sienne. Alaïs était aussi frigorifiée que lui. Mais bien réelle.
    « Je pensais…
    — Je sais », l'interrompit-elle.
    Guilhem désirait par-dessus tout ne pas la lâcher, sauf que la pensée de Bertrande le ramena à la réalité.
    « Sajhë est blessé, dit-il en escaladant les dernières toises qui le séparaient de l'entrée de la grotte. Prenez soin de lui. Je m'en vais poursuivre Oriane. »
    Alaïs se pencha un instant sur Sajhë, puis s'empressa de rejoindre son époux.
    « Il n'est qu'inconscient, lui apprit-elle. Vous, restez près de lui. Dites-lui de quoi il retourne. Je dois retrouver Bertrande.
    — Nenni, c'est ce qu'espère Oriane. Elle vous contraindra à révéler où est caché le livre, puis elle vous tuera toutes deux. J'ai plus de chance de vous ramener votre fille saine et sauve, seul, comprenez-vous ?
    — Notre fille », rectifia-t-elle.
    Guilhem entendit ces paroles, sans parvenir à en comprendre le