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Lacrimae

Titel: Lacrimae Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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examen de son intimité féminine, je puis vous affirmer que ma dame ne souffre d’aucune malformation de nature à l’empêcher de concevoir. Quant à ses menstrues, elles sont de belle allure, abondantes, bien que pas assez régulières à ma satisfaction. J’ai tout tenté. Les potions, les cataplasmes chauds, les repas relevés d’épices, les suppliques et les offrandes à notre Très Bonne Vierge, les moments propices définis par la position des astres… rien n’y a fait.
    — Une annulation de mariage est-elle…
    — Oh, certes pas ! Le seigneur Philippe est tant épris, d’autant qu’il a deux hoirs, le détrompa la ventrière ! Toutefois, il aimerait chérir le petiot offert par sa douce.
    — À l’évidence. Quelles potions avez-vous recommandées à dame Ivine ?
    — Les plus efficaces : des infusions de feuilles de sauge 8 et de gattilier 9 , des macérations de racines d’aunée 10 , je lui fais aussi porter un testicule droit de belette 11 … Je la gave tant que la pauvre douce en a des migraines, des suées et des vertiges. Néanmoins, elle ne se plaint jamais et me remercie avec effusion. Une belle âme, vous dis-je.
    Druon hochait la tête. Hormis cette tenace superstition concernant le petit carnivore, les potions préparées étaient réputées accroître la fertilité des femmes.
    — J’ai recommandé à mon maître d’honorer tout particulièrement sa dame au plus près des menstrues 12 . Cela étant, comme je vous le disais, il lui rend visite amoureuse presque quotidiennement.
    — À dire vrai, madame, vos soins furent admirables et je ne sais ce que je pourrais y ajouter.
    Satisfaite de son verdict, elle se rengorgea tout en insistant :
    — C’est que, justement, messire, je ne voudrais pas que mon maître… en vienne à penser que je suis bien piètre ventrière. Votre science si vantée, exprimée devant lui, le convaincrait que nul, aussi célèbre et savant fût-il, n’aurait pu faire mieux. (Soudain, l’impérieuse femme se troubla, laissant transparaître sa crainte et sa vulnérabilité. Elle poursuivit dans un murmure :) Il y va, monsieur, de ma position et de mon honneur, car j’ai aidé moult belles dames, désespérées de leur incapacité à produire enfants.
    — Je n’en doute pas. Toutefois…
    La ventrière détacha la bourse pendue à sa ceinture et la tendit à Druon en expliquant :
    — Il y a là cinquante deniers tournois. Bien plus que le prix de l’accouchement de Muguette. De grâce, monsieur, aidez-moi. Il ne vous en coûtera que peu de temps, un nouvel examen, un entretien avec ma dame puis mon seigneur…
    La somme était alléchante pour un mire itinérant, flanqué d’un garçon qui manifestait un appétit d’ogre. De plus, l’hiver arrivait et ils ne pourraient plus dormir à la belle étoile. Druon se laissa tenter. Bah, ainsi que le disait Marie Després, c’était l’affaire d’une ou deux journées.
    Elle le remercia avec effusion lorsqu’il empocha la bourse en signe d’accord, et avoua d’une voix presque amicale :
    — Grand merci, messire. À la vérité… dès que votre excellence me vint aux oreilles, je fonçai prévenir mon maître, insistant sur mon désir de requérir votre sentiment. Cette bourse vient de lui. Il est parfois… brutal, mais il aime tant notre dame, une magnifique âme, si belle, si parfaite ! Rester sans enfant doit l’accabler, même si, par courtoisie, elle le dissimule à tous.
    — Fort bien, madame. Je vous rejoindrai à l’après-midi au château afin de m’entretenir avec ma patiente.

    La ventrière disparue, maîtresse Borgne, dont l’humeur était toujours chagrine d’avoir été tenue à l’écart, les rejoignit. Huguelin y alla d’un commentaire heureux :
    — Fichtre, cinquante deniers ! Pas d’la pisse d’ân… Euh… de la roupie 13  ! Peut-être qu’il ne s’agit que de la première moitié, et que si le seigneur se montrait satisfait de votre art… hasarda l’enfant, plein d’espoir.
    Ce qui lui valut une remontrance sans hargne :
    — Si nous devons nous faire payer notre science, il serait vil de devenir cupide.
    Incapable de juguler sa curiosité, maîtresse Cécile s’enquit :
    — Rapport à la dame Ivine, c’te visite inattendue, hein ?
    — Je ne crois guère trahir une confidence puisque vous-même l’évoquâtes… En effet, à ses difficultés d’enfantement.
    — C’est’y pas pitié ! Y’en a qu’en pondent quand

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