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Lacrimae

Titel: Lacrimae Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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hormis pour réclamer la mort. Borée a témoigné lors de son procès, exigeant l’absence de l’inculpée par crainte des représailles, a-t-il soutenu. Un accablant témoignage durant lequel il a relaté qu’elle s’accouplait avec des boucs, suspendait des croix à l’envers après leur avoir craché dessus.
    — Et votre secrétaire ?
    — Il a bien sûr été cité par-devant le tribunal ecclésiastique. Il a insisté sur le fait qu’il s’agissait dans son cas de connaissances d’ouï-dire. Bref, des affirmations de Borée. Une autre personne est venue témoigner. Là encore, des narrations épouvantables qui ont contribué à signer l’arrêt de mort de cette femme.
    — Qui ?
    — Je l’ignore. Ainsi que vous le savez, le pouvoir séculier n’a nul accès aux rapports secrets des tribunaux religieux. Ils jugent, condamnent et nous remettent le coupable pour l’exécution de la sentence afin de ne pas souiller leurs mains de sang.
    — Sauf lorsqu’il périt sur la table de torture.
    — Les bourreaux sont des laïcs, rectifia Louis d’Avre en lui jetant un regard appuyé.
    Comprenant qu’il avait été maladroit, Druon reprit :
    — Mabyn… un prénom peu usité.
    — En tout cas dans notre contrée.
    — Est-elle décrite dans l’une des transcriptions d’audience inquisitoire ?
    — Si fait, et cela a concouru à sa condamnation. Mieux vaut ne pas être laideronne ou étonnante beauté lorsque pèsent sur vous des soupçons de commerce avec le diable.
    — Or elle était fort belle ?
    — Si l’on s’en fie à deux lignes de description, un grand ange pâle et blond, n’eût été son regard noir qualifié d’intense et démoniaque, bien sûr.
    — Bien sûr.

    Il s’agissait donc de la femme qu’Agnès Grosjean avait vue chez Borée une nuit. La veille servante avait mal saisi son prénom, le transformant en Mabile.
    Mabyn… un prénom qu’il n’avait jamais rencontré en territoire chrétien. Tout comme Igraine… Sottise ! Même en admettant que la mage n’ait pas péri dans les flammes du brasier qu’elle avait allumé, que viendrait-elle faire dans cette charade ? Elle poursuivait sa route ailleurs, dans leur monde ou un autre, puisqu’elle affirmait leur multiplicité.
    Comme s’il avait été influencé par les pensées du jeune mire, Louis d’Avre se souvint d’un détail :
    — Ah… Ses bijoux furent confisqués lors de son arrestation. Nulle croix ou médaille pieuse. De lourds bracelets d’argent, gravés de symboles ou lettres incompréhensibles sur lesquels elle refusa de s’expliquer, ainsi qu’une bague de même métal, très large, représentant deux serpents enlacés. Produits devant le tribunal, ils furent du plus fâcheux effet, je ne vous surprendrai pas.

    Druon avala la fin de son gobelet de vin afin de dissimuler son trouble et regagner un peu de contenance.
    Dieu du ciel ! Les mêmes bijoux que ceux d’Igraine, ces bijoux inquiétants qui avaient semé les premiers doutes dans son esprit. Et puis, un jour, lors d’une conversation avec le seigneur Béatrice d’Antigny 8 , il avait enfin compris : Igraine était une des descendantes des druides païens. Son père lui avait expliqué que ces êtres avaient détenu de prodigieuses connaissances, issues de leur subtile compréhension de la nature. Leur immense savoir s’était perdu avec eux, faisant reculer l’humanité pour des siècles 9 . Igraine ne lui avait-elle pas confié que ses anciens dieux s’étaient mêlés au Dieu unique, responsable de l’amenuisement progressif de ses pouvoirs ? Elle ne trouvait plus de divinités avec qui discuter, négocier, tout en restant défiante puisque, ainsi qu’elle l’avait dit, les dieux sont trompeurs. Une païenne, sans doute à l’image de cette Mabyn. La coïncidence était trop énorme pour qu’il ne s’agisse que de cela : d’une coïncidence. Et Druon sut qu’Igraine était toute proche. Pourquoi avait-elle feint son immolation ? Pourquoi se trouvait-elle dans ses pas ? L’avait-elle suivi ? Avait-elle un rapport avec ces meurtres ?
    Un autre éclair de compréhension : des meurtres haineux, de vengeance, ainsi qu’il l’avait toujours déduit. Toutefois, la main tranchée, le supplice réservé aux voleurs, l’avait égaré. Une interprétation de précipitation, lui qui exécrait les conclusions hâtives. A prêté serment sur les quatre Évangiles, qu’il touchait de sa main droite, de dire toute

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